Le tête-à-tête du 15 août entre Donald Trump et Vladimir Poutine à Anchorage est perçu, côté russe, comme un succès majeur pour le Kremlin. La presse pro-gouvernementale se félicite du revirement de Washington, qui ne parle plus de cessez-le-feu mais d’un accord de paix, présenté comme une avancée stratégique pour Moscou.
À Anchorage, en Alaska, le 15 août, Donald Trump a accueilli Vladimir Poutine avec tapis rouge et gestes symboliques, avant un sommet de trois heures. Si aucune mesure concrète n’a été rendue publique, la rhétorique qui a suivi est abondamment exploitée par les médias russes. À leurs yeux, le président américain aurait franchi un pas important en abandonnant l’idée d’un cessez-le-feu pour privilégier la signature d’un accord de paix.
Le média indépendant Verstka cite des proches du Kremlin assurant que la rencontre s’est déroulée « selon un scénario planifié » et a permis d’établir un climat de confiance. Pour ces conseillers, l’essentiel réside dans le changement de discours américain : « Trump a renoncé à l’idée d’un cessez-le-feu, qui n’est pas dans notre intérêt. À la place, il parle désormais d’un accord de paix. »
Dans les colonnes du Moskovski Komsomolets, le ton est triomphal : « Une grande victoire de la diplomatie russe ». Le quotidien populaire souligne que la Russie n’a pas bougé de sa ligne et que Donald Trump a fini par « partager cette position ». Sur son réseau social Truth Social, l’ancien président américain a d’ailleurs écrit : « Tous s’accordent désormais : la solution passe par un accord de paix, pas par un cessez-le-feu, qui échoue toujours. »
Les journaux proches du pouvoir estiment que Donald Trump entend désormais présenter ce tournant comme un fait accompli. Le quotidien Vedomosti assure qu’il dévoilera son « ultimatum de paix » à Volodymyr Zelensky lors d’une rencontre multilatérale prévue à Washington le 18 août, en présence d’Emmanuel Macron, Friedrich Merz, Keir Starmer et Ursula von der Leyen. Leur mission sera de convaincre le président américain que « son deal avec Poutine est mauvais ».
Mais à Moscou, les experts cités par Kommersant et d’autres titres jugent que les marges de manœuvre européennes sont faibles. Artiom Sokolov, de l’Institut d’études internationales, estime que « l’Europe n’a ni la force militaire ni les moyens économiques pour soutenir l’Ukraine sans les États-Unis ». Pour Vladimir Vassiliev, politologue russe, Donald Trump cherche à obtenir de Volodymyr Zelensky qu’il accepte des concessions territoriales, ce que Kiev a toujours refusé.
Dmitri Souslov, du Centre d’études européennes et internationales complexes, avertit même qu’un rejet de la formule esquissée à Anchorage pourrait entraîner « une suspension partielle ou totale du soutien militaire » américain à l’Ukraine. Selon Fiodor Voïtolovski, directeur de l’Institut de l’économie mondiale et des relations internationales, le temps joue contre Kiev : plus l’Ukraine tarde à s’engager dans ce processus, plus ses options se réduisent.
Ainsi, vue de Moscou, la rencontre d’Anchorage a renforcé la position de Vladimir Poutine, transformant un sommet incertain en démonstration de force diplomatique.
Sources : Courrier international, Verstka, Moskovski Komsomolets, Vedomosti, Kommersant.