Alors qu’il était question d’une possible rencontre entre Donald Trump et Xi Jinping, Pékin a annoncé de nouvelles restrictions sur l’exportation de terres rares, ces minéraux indispensables à l’industrie technologique et militaire. Washington a aussitôt répliqué par la menace de nouveaux droits de douane. Une escalade qui met fin à la trêve commerciale et réactive la rivalité économique entre les deux superpuissances.
La guerre commerciale sino-américaine, que l’on croyait momentanément apaisée, reprend de plus belle. Le 9 octobre, la Chine a dévoilé une réglementation renforçant le contrôle sur les exportations de terres rares, ces métaux essentiels à la fabrication des semi-conducteurs, des batteries ou encore des équipements militaires. En réponse, Donald Trump a annoncé dès le lendemain une hausse de 100 % des droits de douane sur les produits chinois, ainsi qu’une extension des restrictions américaines sur les exportations de logiciels avancés.
Ces nouvelles mesures, qui ne prendront effet qu’à partir du 1er novembre, laissent toutefois un court laps de temps à la diplomatie. Le président américain affirme vouloir “laisser la porte ouverte à la discussion”, tout en affichant une fermeté intransigeante. Pékin, de son côté, semble avoir anticipé cette confrontation : depuis plusieurs années, la Chine considère les terres rares comme une arme stratégique dans le bras de fer économique mondial. En contrôlant près de 70 % de leur production mondiale, elle détient un levier d’influence considérable sur les chaînes d’approvisionnement occidentales.
Cette décision s’inscrit dans un triple contexte. D’abord, une logique de préparation : en durcissant les règles d’exportation, Pékin se dote d’un outil de pression plus souple et plus complet. Désormais, tout produit contenant des traces de terres rares d’origine chinoise, même vendu par une entreprise étrangère à l’étranger, devra obtenir une licence spéciale. Ensuite, une stratégie diplomatique : à quelques semaines d’une rencontre possible entre Trump et Xi Jinping en marge du sommet de l’Apec, la Chine cherche peut-être à tester la détermination américaine. Enfin, un geste de représailles : les nouvelles régulations pourraient répondre à la “règle des 50 %” instaurée par Washington, qui impose des restrictions à toutes les filiales d’une société étrangère détenue à plus de moitié.
Mais l’impact dépasse le seul duel sino-américain. En Europe, la mesure suscite des inquiétudes, notamment dans le secteur de la défense. Comme le note The New York Times, ces minéraux sont indispensables à la fabrication de missiles, d’avions de chasse ou de chars. Restreindre leur exportation pourrait entraver les efforts de l’Union européenne pour soutenir l’Ukraine et renforcer sa propre capacité militaire face à la Russie.
Pour Washington, les menaces tarifaires de Trump risquent d’avoir un effet boomerang. Si la Chine peut supporter un ralentissement temporaire de ses exportations, les entreprises américaines, déjà confrontées à des coûts élevés, pourraient difficilement absorber des taxes de plus de 100 %. Le moment choisi — juste avant la période cruciale des achats de Noël — pourrait se retourner contre le président américain, rendant le consommateur américain le premier perdant de cette surenchère.
Malgré la rhétorique belliqueuse, ni la Chine ni les États-Unis ne souhaitent un effondrement complet de leurs échanges. Mais les événements récents rappellent que, derrière chaque geste de négociation, se cache une méfiance structurelle. Dans un monde où la dépendance mutuelle n’exclut plus la rivalité, les terres rares deviennent bien plus qu’une ressource minérale : un symbole des fragilités de la mondialisation et des tensions du XXIᵉ siècle.
Sources :
The Economist – “The rare-earths showdown between China and America” – lien
The New York Times – “China’s Rare Earth Rules Threaten Europe’s Defense Supply Chain” – lien