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John Christopher Rolland. Image : capture d'écran France Info.

Réarmement européen : l’analyse de John-Christopher Rolland sur le retour de la conscription et la culture militaire

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Invité sur France Info, le constitutionnaliste John-Christopher Rolland observe une inflexion majeure en Europe : plusieurs États réintroduisent ou renforcent la conscription. Une évolution portée par un climat géopolitique tendu et une prise de conscience collective de la fragilité de la sécurité du continent. Ses propos éclairent une mutation profonde des politiques de défense en Europe.

Sur le plateau de France Info, John-Christopher Rolland, maître de conférences en droit public à l’Université Paris-Nanterre, a dressé aujourd’hui un constat sans ambiguïté : l’Europe se réhabitue à l’idée militaire. Selon lui, la résurgence des dispositifs de service national, volontaires ou obligatoires, révèle une réorientation stratégique devenue difficile à ignorer. Les crispations internationales, la guerre en Ukraine et l’incertitude globale poussent les États européens à reconsidérer leurs modèles de défense, longtemps assoupis sous la promesse d’une paix durable.

L’universitaire rappelle que, dans les pays baltes, la conscription n’est plus un sujet debattu mais une réalité rétablie. La Lituanie, l’Estonie et la Lettonie ont choisi un service obligatoire, bien éloigné des formules volontaires privilégiées par la France, l’Allemagne ou la Belgique. Dans cette région géographiquement exposée, la menace perçue impose une réponse immédiate, structurée, presque automatique. Pour Rolland, il ne s’agit pas d’un simple ajustement, mais d’une réactivation assumée d’un outil militaire classique.

La Suède constitue un autre exemple frappant. Longtemps neutre et démilitarisée, elle a opéré un virage stratégique majeur. Son adhésion à l’Otan, couplée au rétablissement d’un service national, symbolise à elle seule la transformation du paysage sécuritaire européen. Un pays qui avait tourné la page de la conscription décide soudainement de la rouvrir, preuve que l’environnement extérieur ne laisse plus de place à l’improvisation.

Le constitutionnaliste rappelle aussi qu’une partie du continent n’a jamais abandonné cette pratique : la Finlande, la Grèce ou encore la Croatie ont maintenu une conscription continue, reflet d’une culture stratégique où l’armée reste une composante ordinaire de la vie citoyenne. Ces États apparaissent aujourd’hui moins vulnérables face à la nécessité d’une remobilisation rapide.

Pour John-Christopher Rolland, cette dynamique générale traduit un mouvement de fond : « une tendance actuelle européenne à se reformer à la chose militaire », selon ses mots. Une phrase qui résonne avec les déclarations récentes d’Emmanuel Macron, évoquant la fragilité structurelle de la sécurité collective. La société européenne, longtemps habituée à un confort pacifié, redécouvre que la stabilité n’est jamais acquise. La géopolitique s’impose désormais jusque dans les calendriers civiques, les réflexes nationaux et l’éducation des jeunes générations.

L’expert souligne que les pays d’Europe du Nord et de l’Est donnent aujourd’hui le tempo, poussant l’ensemble du continent à repenser ses outils. Cette réintégration du militaire dans l’horizon politique n’est pas seulement une réaction conjoncturelle mais une recomposition profonde. À mesure que s’installe un climat d’incertitude durable, la notion même de sécurité redevient centrale, presque viscérale. « La sécurité, c’est la sécurité », conclut Rolland avec une sobriété contrastant avec l’ampleur du changement.

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