Face aux tensions croissantes entre la Chine et les puissances occidentales, La Haye a repris le contrôle de Nexperia, fabricant de puces installé sur son sol mais détenu par le groupe chinois Wingtech. Les autorités néerlandaises invoquent des raisons de “sécurité économique” et la nécessité de préserver les chaînes d’approvisionnement technologiques européennes.
C’est une décision rare, qualifiée de “mesure exceptionnelle” par le gouvernement néerlandais. Dimanche 12 octobre, La Haye a annoncé la prise de contrôle du fabricant de semi-conducteurs Nexperia, installé aux Pays-Bas mais détenu majoritairement par le groupe chinois Wingtech depuis 2019. Une nationalisation justifiée par la volonté de “garantir la sécurité économique et technologique de l’Europe”, selon le ministère néerlandais de l’Économie.
Nexperia occupe une place stratégique dans la production de puces électroniques, utilisées aussi bien dans l’industrie automobile que dans les appareils grand public. En d’autres termes, il s’agit d’un maillon essentiel du tissu industriel européen, souligne CNBC. Cette dépendance technologique, accentuée par la domination asiatique sur le secteur, a poussé les Pays-Bas à reprendre la main sur cette entreprise jugée critique.
Le gouvernement néerlandais évoque des “graves lacunes en matière de gouvernance” et une “menace pour la continuité et la sauvegarde du savoir-faire technologique” sur le sol européen, selon le Financial Times. L’objectif est clair : éviter qu’en cas de crise géopolitique, les productions de Nexperia deviennent inaccessibles, mettant à mal des secteurs entiers de l’économie européenne.
Mais cette décision, à forte portée symbolique, risque de tendre un peu plus les relations entre l’Europe et Pékin. La Chine, déjà en conflit commercial ouvert avec les États-Unis, voit désormais un pays européen s’engager dans la même logique de protection de ses intérêts technologiques. Le groupe Wingtech, propriétaire de Nexperia, a dénoncé un “acte d’ingérence excessive motivé par des préjugés géopolitiques” et a sollicité le soutien du gouvernement chinois.
Dans la foulée de l’annonce, l’action Wingtech a chuté de 10 % à la Bourse de Shanghai ce lundi 13 octobre. Pékin pourrait réagir, d’autant que le pays vient de restreindre ses exportations de terres rares — des matériaux indispensables à la fabrication de composants électroniques —, relançant une guerre commerciale déjà explosive.
Nexperia, issue en 2017 de la scission du géant néerlandais NXP, avait été rachetée pour 2,75 milliards de dollars par un consortium chinois soutenu par l’État, avant de passer sous le contrôle de Wingtech. Cette nationalisation néerlandaise, inédite en Europe, marque un tournant dans la stratégie de défense industrielle du continent. Elle illustre la volonté des États européens de reprendre le contrôle de technologies jugées vitales, dans un monde où l’économie se confond de plus en plus avec la géopolitique.
Sources :
Courrier international – “Les Pays-Bas prennent le contrôle du fabricant de puces chinois Nexperia”, 13 octobre 2025 – courrierinternational.com
CNBC – Report on Dutch government takeover of Nexperia, octobre 2025 – cnbc.com
Financial Times – Dutch government nationalises Chinese-owned Nexperia over security concerns, 12 octobre 2025 – ft.com