Semaine noire à Wall Street : les valeurs technologiques liées à l’intelligence artificielle s’effondrent, entraînant une perte de près de 1 000 milliards de dollars de capitalisation. Le Nasdaq enregistre sa plus forte chute depuis le mois d’avril, sur fond d’inquiétudes économiques et de surchauffe spéculative dans la course mondiale à l’IA.
C’est un coup de froid brutal sur les marchés financiers. En l’espace de cinq jours, les entreprises technologiques les plus exposées à l’intelligence artificielle ont perdu près de 1 000 milliards de dollars de capitalisation boursière. Une dégringolade qui rappelle les heures sombres de la bulle internet, marquant la pire semaine pour le Nasdaq depuis avril dernier.
Selon le Financial Times, les titres de huit mastodontes de l’IA – dont Nvidia, Meta, Palantir et Oracle – ont vu leur valeur cumulée chuter d’environ 800 milliards de dollars entre le 31 octobre et le 7 novembre 2025. En conséquence, le Nasdaq Composite, à forte composante technologique, a reculé de 3 % sur la semaine. « Les dépenses d’investissement liées à l’IA sont substantielles, souvent financées par la dette, et rappellent la frénésie d’investissements douteux de la bulle technologique des années 2000 », analyse Florian Ielpo, responsable macroéconomie chez Lombard Odier Investment Managers.
Les grands noms de la Silicon Valley ont, au troisième trimestre, annoncé 112 milliards de dollars d’investissements cumulés dans l’intelligence artificielle. Un montant vertigineux, alors même que le secteur s’endette massivement pour soutenir sa croissance. Cette fuite en avant interroge : l’IA, moteur d’innovation, serait-elle aussi en train de devenir un gouffre financier ?
Un climat économique fragilisé
Ce décrochage boursier s’inscrit dans un contexte de ralentissement économique américain. Le Financial Timesrelève que la confiance des ménages et la vigueur du marché du travail s’essoufflent : l’indice de l’université du Michigan est tombé à son plus bas niveau depuis trois ans. Par ailleurs, la paralysie du gouvernement fédéral américain, en shutdown depuis 38 jours, entretient l’incertitude des investisseurs.
La Réserve fédérale de Chicago rapporte une baisse continue des embauches depuis six mois, tandis que des géants comme Amazon, Paramount ou Target multiplient les plans de licenciement. Pour Stephen Yiu, directeur des investissements du fonds Blue Whale Growth, la Fed devrait « abaisser ses taux plus rapidement » afin d’éviter une récession désormais jugée probable.
Nvidia en première ligne, la Chine à l’offensive
C’est Nvidia qui a le plus souffert : sa capitalisation a fondu de 350 milliards de dollars en une semaine. L’entreprise, première valorisation mondiale il y a encore quinze jours, voit son titre s’effriter après des déclarations de son PDG, Jensen Huang, au Financial Times. Ce dernier a estimé que la Chine finirait par “remporter la course à l’IA”, accusant les restrictions américaines sur les exportations de puces d’handicaper son entreprise.
Derrière cette chute, c’est tout un équilibre géopolitique qui se redessine. Pékin rattrape son retard technologique à marche forcée : le modèle Kimi K2 de Moonshot AI, développé pour moins de cinq millions de dollars, illustre cette montée en puissance. En janvier déjà, la sortie du modèle R1 de DeepSeek avait déclenché un mini-krach, effaçant 589 milliards de dollars de capitalisation pour Nvidia en une journée.
Les doutes autour d’OpenAI
En parallèle, OpenAI cristallise les interrogations. Sa directrice financière, Sarah Friar, a évoqué la possibilité d’un soutien gouvernemental américain pour sécuriser ses finances, malgré une valorisation estimée à 500 milliards de dollars et 1 400 milliards d’investissements cumulés avec ses partenaires – Microsoft, AMD, Broadcom, Amazonet Google. Le PDG Sam Altman assure pourtant que l’entreprise n’a pas besoin de renfort public et prévoit des revenus atteignant « des centaines de milliards d’ici 2030 ».
Mais sur un marché désormais fébrile, chaque déclaration, chaque rumeur devient un catalyseur de panique. Après une année d’euphorie autour de l’intelligence artificielle, Wall Street semble redécouvrir les lois de la gravité.
Sources :
Le Point – « Panique sur les marchés : l’IA fait s’évaporer 1 000 milliards chez les géants de la tech » – 8 novembre 2025 – lien
Financial Times – « Tech stocks suffer biggest weekly loss since April amid AI-driven sell-off » – 7 novembre 2025 – lien
