You are currently viewing L’héritage controversé de Bertrand Collomb, ancien président du groupe Lafarge et membre du groupe Bilderberg
Bertrand Collomb. Photo : @Universitätsarchiv St.Gallen

L’héritage controversé de Bertrand Collomb, ancien président du groupe Lafarge et membre du groupe Bilderberg

L’ancien président du groupe Lafarge, Bertrand Collomb, passé par plusieurs entreprises affiliées au Forum économique mondial était membre du comité de pilotage du groupe Bilderberg, du club Le Siècle fondé après guerre par des résistants franc-maçons, mais également de la Commission Trilatérale. S’il se présentait comme un grand chante de la responsabilité sociale des entreprises et du développement durable, sa carrière a été jalonnée par des collaborations avec des entreprises à fort impact environnemental.

Issu d’une famille de la grande bourgeoisie lyonnaise, Bertrand Collomb est passé par le Lycée du parc avant de rejoindre comme ses ainés, l’École polytechnique et l’École des mines de Paris. Il a ensuite mené des études aux Etats-unis où il a obtenu un PhD en Management à l’Université du Texas, qui est affiliée au Forum économique mondial. 

De 1966 à 1975, il a occupé le poste d’ingénieur au corps des mines à Metz et a été temporairement responsable d’un projet visant à réformer l’usage de l’informatique à l’École polytechnique. Toutefois, il n’a pas pu mener ce projet à terme en raison de ses nombreuses autres obligations. Il faut dire que Collomb était fort occupé. Il a initié le centre de recherche en gestion de l’École polytechnique, qu’il confiera plus tard à Michel Berry, mais aussi intégré les cabinets ministériels d’Alain Peyrefitte, Ministre des Réformes Administrative, puis des Affaires Culturelles et de l’Environnement, avant de rallier celui de René Haby, Ministre de l’Éducation Nationale entre entre 1973 et 1975.

L’ascension de Collomb au sein de Lafarge via sa gestion de la filiale biotechnologie du groupe

Bertrand Collomb intègre Lafarge en 75 et gravit rapidement les échelons au sein de l’entreprise. En 83, il prend la présidence d’ORSAN, la filiale biotechnologique du groupe, qui possédait une usine à Amiens spécialisée dans la production d’acides aminés utilisés dans l’agro-alimentaire. Elle fabriquait notamment du glutamate utilisé par les fabricants de produits alimentaires comme exhausteur de goût notamment et de la lysine, un acide aminé codé sur les ARN messagers par les codons AAA et AAG, utilisé comme complément alimentaire par l’Industrie agroalimentaire ou pour la nourriture destinée aux animaux.

Collomb devient ensuite directeur général de Lafarge Corporation, la branche nord-américaine du groupe entre 1985 et 1988. En août 1989, il devient président-directeur général de Lafarge. Quelques années plus tard, en 1994, il vend la filiale ORSAN en raison de pertes importantes. Cependant, en 1995, une décision judiciaire révèle que Lafarge avait transféré 67 % des actions d’ORSAN à une autre filiale avant de la vendre à Ajinomoto, une entreprise japonaise spécialisée dans les produits de consommation et pharmaceutiques. Ajinomoto par la suite contesté sans succès un brevet européen déposée par Lafarge, pour un procédé de production d’acides aminés. Cette production nécessite de grandes quantités d’ammoniac, selon un arrêté de la Préfecture de la Somme publiée en 2012.

Entre-temps, Collomb était devenu président du conseil d’administration de Lafarge en mai 2003, puis président d’honneur en mai 2007. Sous sa direction, le groupe a connu une expansion internationale impressionnante, marquée par de nombreuses acquisitions dont celles de ses concurrents britanniques Redland et Blue Circle, devenant leader mondial du secteur du ciment avec des implantations dans plus de 80 pays.

Le 10 juillet 2015, Lafarge, leader mondial du ciment, a fusionné avec Holcim, le numéro deux du secteur, originaire de Suisse et membre du Forum économique mondial. Cette union a donné naissance à un nouveau géant de l’industrie sous le nom de LafargeHolcim, inauguré officiellement le 15 juillet 2015, avant de devenir tout simplement « Holcim » le 8 juillet 2021. Lafarge est alors devenu une filiale du groupe suisse .

Lafarge accusé d’avoir financé le terrorisme

Lafarge a ensuite été accusé par le journal syrien d’opposition Zaman Al-Wasl, d’avoir financer des groupes jihadistes, y compris l’État Islamique, entre 2013 et 2014 pour maintenir les opérations d’une cimenterie à Jalabiya, en Syrie, malgré le conflit qui était en cours. Une information confirmée par Le Monde en 2016. L’usine de Jalabiya avait été rachetée quelques mois seulement avant l’éclatement de la révolution syrienne, en mars 2011, pour un montant de 700 millions d’euros au groupe égyptien Orascom, qui a compté dans son board le contributeur du FEM, Franz Egle. Cette opération représentait le plus important investissement de Lafarge au Moyen-Orient. 

En 2017, la nouvelle direction de Lafarge a réalisé un audit, confié au cabinet Baker McKenzie, affilié au Forum économique mondial, concluant que près de 15 millions d’euros ont pu être versés à des groupes jihadistes, dont 5 millions d’euros à l’État Islamique. Ces fonds auraient été destinés à financer des actes de terrorisme, un autre volet de l’enquête, concernant une possible complicité de crimes contre l’humanité.

Dans un article intitulé « Quand l’usine Lafarge en Syrie servait de base d’espionnage pour la coalition anti-Etat islamique », Le Monde révélait le 23 mars 2023 des détails supplémentaires sur la manière dont l’usine Lafarge en Syrie a servi de base d’espionnage pour les services de renseignement occidentaux durant la guerre civile syrienne. Ahmad Jaloudi, ancien responsable de la sécurité de l’usine et colonel à la retraite de l’armée jordanienne, formé aux Etats-unis et à Toulouse, qui était mis en examen pour « financement de terrorisme » insistait sur le fait que non seulement l’usine de Lafarge a maintenu ses opérations pour des raisons économiques, mais qu’elle a également été utilisée par les renseignements internationaux , notamment français, pour collecter des informations sur les groupes armés, y compris l’EI. Dans sa carrière, Jaloudi avait notamment participé à des missions de maintien de la paix de l’ONU au Soudan et en Somalie. Il a également travaillé pour l’ONG, Norwegian Refugee Council, qui a été dirigée par le contributeur du FEM, Jan Egeland. Il a d’ailleurs été recruté par Lafarge alors qu’il travaillait pour cette organisation. Jaloudi, ayant servi pour l’entreprise française de 2013 à 2019, aurait joué un rôle crucial en établissant des cartes détaillées des points de contrôle tenus par divers groupes militants et en facilitant les contacts entre l’entreprise et l’EI pour assurer le fonctionnement de l’usine.

Le 9 février 2024, la Parquet national financier a requis un procès, concernant le groupe et plusieurs de ses anciens dirigeants, dont l’ex-PDG Bruno Lafont, l’ex-directeur général adjoint opérationnel Christian Herrault ou encore l’ex-directeur de la sûreté du groupe, Jean-Claude Veillard, pour lesquelles le Pnat a demandé un procès devant le tribunal correctionnel.

Dans un article publié le 22 février 2024, intitulé « Lafarge et le financement de Daech : pourquoi le parquet antiterroriste exonère l’État français », Fabrice Arfi, de Médiarpart, raconte toutefois comment le Parquet national antiterroriste a mis « en pièces la thèse, défendue par plusieurs mis en cause, d’une complicité de la diplomatie et des services de renseignement ». Arfi précise que le Pnat a réfuté les allégations de plusieurs accusés qui « tentaient d’impliquer la diplomatie et les services de renseignement français pour atténuer leur propre responsabilité ».

Sa contribution dans des entreprises énergétiques et/ou liées au Forum économique mondial

Bertrand Collomb qui participait régulièrement aux réunions du groupe Bilderberg et du Forum économique mondial de Davos a également été administrateur de Total, qui est membre du FEM, quand le groupe s’appelait Total Fina Elf et d’ATCO, une société holding canadienne cotée en bourse d’ingénierie, de logistique et d’énergie basée à Calgary, en Alberta. Les filiales d’ATCO comprennent des services publics d’électricité, des sociétés de production et de distribution de gaz naturel et des entreprises de construction.

Collomb a également été membre du Conseil de surveillance d’Allianz, le groupe d’assurance allemand affilié au Forum économique mondial et du Conseil consultatif d’Unilever, multinationale anglo-néerlandaise, membre du Forum, dont le fondateur Paul Rijkens, faisant partie des membres à l’origine du groupe Bilderberg.

L’ancien président du groupe Lafarge a aussi présidé l’Institut français des relations internationales (IFRI), par lequel sont passés de nombreux contributeurs de l’agenda 2030 du FEM, comme Kevin Tu, Dominique Moisi, ou Bobo Lo.

Collomb qui avait refusé à plusieurs reprises la présidence du Medef, qui a été présidé par d’autres habitués des réunions du groupe Bilderberg, Ernest-Antoine Seillière et Laurence Parisot, en l’occurence, avait accepté celle de l’Association française des entreprises privées en 2001, s’opposant aux 35 heures, notamment en publiant son ouvrage, Les 35 heures, une approche critique.

Il était aussi membre depuis 1989 de la Table ronde des Industriels européens, lobby des grandes entreprises européennes proche du FEM, et a coprésidé en 2000 le Dialogue d’Affaires Transatlantique, une organisation qui rassemble des entreprises européennes et américaines pour faciliter les échanges commerciaux.

Un membre éminent de la Trilatérale

Bertrand Collomb était également membre de la « trilatérale », club informel créée en 1973 en plein choc pétrolier, à l’initiative des principaux dirigeants du groupe Bilderberg et de l’un des plus puissants think tank américain, le Council on Foreign Relations, parmi lesquels le milliardaire David Rockeffeller, le diplomate américain d’origine polonaise, Zbigniew Brzezinski et l’ancien chef de la diplomatie américaine, mais aussi contributeur de l’agenda 2030 du Forum économique mondial, Henry Kissinger. Ce groupe constitué de hauts dirigeants politiques et économiques d’Amérique du Nord, d’Europe et d’Asie visant à  promouvoir et à construire une coopération politique et économique entre les trois marchés majeurs mondiaux sous l’égide du néolibéralisme, a servit de tremplin à de nombreuses personnalités politiques, à commencer par Raymond Barre, l’un de ses cofondateurs et membre du groupe Bilderberg qui a été propulsé vice-président chargé de l’Economie et des Finances, à l’issue de son mandat à la Trilatérale, soutenant alors Klaus Schwab, lui aussi membre de ce groupe et grand chantre du capitalisme des « parties prenantes », lorsqu’il a lancé ses réunions à Davos.

Ses engagements pour le développement durable et la responsabilité sociale des entreprises. 

Bertrand Collomb a rédigé de nombreux ouvrages sur la responsabilité sociale des entreprises comme « Entreprise, humanisme et mondialisation publié » en 2001 ; « Plaidoyer pour l’Entreprise », en collaboration avec Michel Drancourt, en 2010, poursuivant sur cette thématique, il a coécrit avec le frère Samuel Rouvillois « L’entreprise humainement responsable » en 2011.

Collomb a également fait partie de la commission qui a élaboré la charte de l’environnement intégrée en 2005 au préambule de la Constitution française de 1958, alors que comme nous l’avons vu, il travaillait pour des groupes énergétiques et que l’impact environnemental du béton est énorme. De plus, Europe 1, a révélé en 2000, que Lafarge a rejetté « volontairement dans la Seine des eaux usées d’une de ses usines ».

Quelques semaines avant sa mort, Collomb a accepté de débattre de la responsabilité de l’entreprise dans un monde complexe et dérégulé avec le philosophe Gaspard Koenig, qui a participé aux programmes Young Leader des Fondations France-Amérique et France-Chine, par lesquels sont passés de nombreux contributeurs de l’agenda 2030 du Forum économique mondial et/ou membres du groupe Bilderbeg, comme Emmanuel Macron. Koenig a également fondé en 2013, « GénérationLibre », think tank ayant pour mission de « défendre les libertés, toutes les libertés » et « réinventer le libéralisme au XXIe siècle ». Par ailleurs, il a travaillé au cabinet de la contributrice de l’agenda 2030 du Forum économique et membre du groupe Bilderberg, Christine Lagarde.

Décédé le 23 mai 2019 au Plessis-Robinson, Collomb a reçu un hommage appuyé de la part d’ Emmanuel Macron, qui a salué « un grand capitaine de l’industrie française » et « un citoyen engagé dans les défis de son temps ».

Laisser un commentaire