Dans une tribune publiée le 20 février dans « Le Monde », Patrick Weil, directeur de recherche au CNRS, spécialiste du Droit des immigrés, critique vigoureusement la proposition du gouvernement de modifier la Constitution française pour éliminer le droit du sol à Mayotte. Ce projet, selon lui, ne dissuadera pas les migrations mais menacera l’unité et l’indivisibilité de la République française, fondée en partie sur le droit du sol.
Weil, qui a été membre du Parti socialiste et a exercé la fonction de chef de cabinet du secrétariat d’État aux immigrés entre 1981 et 1982 rappelle que « ce qui guide la migration dans l’archipel, c’est d’abord la survie, pas le droit du sol ».
Le droit du sol, selon Weil, est un pilier de la nationalité française depuis 1515 et a été renforcé en 1889 par l’introduction du « double droit du sol ». Il précise toutefois que contrairement aux Etats-unis, cette nuance fait qu’« on ne naît français sur le sol que si on a un parent déjà né sur le sol de France ».
Selon lui, cette tradition juridique assure toutefois que les enfants nés en France de parents étrangers peuvent devenir français, favorisant ainsi l’intégration et la cohésion nationale. Weil rappelle que même sous le régime de Vichy, le droit du sol n’a pas été aboli, les nazies ayant refuser « le projet du gouvernement de Pétain, car le droit du sol rendrait français les enfants de soldats allemands avec des Françaises et certains enfants juifs ».
Weil argumente que la proposition de réforme à Mayotte, motivée par des considérations de court terme et sans tenir compte des véritables dynamiques de migration guidées par la survie, pourrait non seulement créer un précédent dangereux mais aussi affaiblir la notion de citoyenneté française. Il souligne l’importance de la Constitution comme fondement de la République française, unie par des valeurs, principes et droits communs, et critique toute exception qui pourrait saper ces fondements.
Weil appelle le président Macron à abandonner ce projet qu’il juge inutile et dangereux, et à se concentrer sur les véritables enjeux diplomatiques, économiques et sécuritaires que représente la situation complexe de Mayotte. Il insiste sur la nécessité de dire la vérité sur la nationalité et de travailler à l’amélioration de la condition mahoraise dans le respect de l’indivisibilité de la République.