La récente victoire de Donald Trump à l’élection présidentielle américaine pourrait représenter un véritable électrochoc pour l’Europe, selon Sébastien Maillard, conseiller spécial de l’institut Jacques-Delors à l’élargissement. Dans les colonnes des Echos, il souligne que les Vingt-Sept doivent, plus que jamais, faire preuve d’unité et renforcer leur autonomie, notamment en matière industrielle et technologique. Face à un partenaire qui « déteste l’Union européenne », l’UE doit se préparer à des relations transatlantiques plus transactionnelles et méfiantes, selon lui.
L’annonce de la victoire de Trump a provoqué une réaction rapide et conjointe du président français Emmanuel Macron et du chancelier allemand Olaf Scholz, tous deux contributeurs de l’agenda 2030 du Forum économique mondial. Selon Sébastien Maillard, qui est lui aussi un contributeur du FEM, cette unité est cruciale pour éviter les divisions internes au sein de l’UE. Selon lui, hormis des exceptions comme Viktor Orban en Hongrie, pourtant proche du lobby de Schwab également, la majorité des dirigeants européens craignent les défis d’une présidence Trump, connue pour son caractère imprévisible et son hostilité envers l’Union européenne.
Maillard rappelle que Trump a déjà exprimé son intention d’augmenter les tarifs douaniers sur les importations européennes et d’imposer des politiques tarifaires strictes envers la Chine, qui pourraient impacter les économies européennes. Face à cette situation, l’Europe doit renforcer son unité et assumer une relation transatlantique « plus dure », d’après le conseiller spécial de l’Institut Jacques Delors.
Réarmement industriel et technologique : les clés de l’indépendance européenne
Pour Sébastien Maillard, la réponse européenne doit passer par un réarmement industriel et technologique. En se basant sur les recommandations des rapports de Mario Draghi et d’Enrico Letta, anciens premiers ministres Italiens et contributeurs de l’agenda 2030, il souligne l’importance de l’union des marchés de capitaux pour financer cette indépendance. Selon Maillard, l’Europe a démontré sa capacité à surmonter ses vulnérabilités en se détachant du gaz russe après l’invasion de l’Ukraine et il est désormais temps de consolider cette résilience dans d’autres secteurs.
Le renforcement de la défense européenne est également une priorité selon lui. Alors que les États-Unis pourraient limiter leur engagement militaire face à la Russie, il rappelle que plusieurs États membres, dont la France, soutiennent l’idée d’un financement commun pour une stratégie de défense européenne coordonnée. D’après Maillard, cette approche nécessite une interopérabilité accrue entre les forces militaires des pays membres, garantissant une capacité d’action collective.
Un monde multipolaire : rééquilibrage des alliances
Pour Maillard, l’élection de Trump reflète l’érosion progressive de la notion d’Occident uni face aux autres puissances. Dans un monde multipolaire, l’Europe doit pouvoir agir de manière indépendante, même si cela implique de revoir sa coopération avec les États-Unis. Cette réalité supposée imposerait à l’UE d’adapter ses alliances pour défendre ses propres intérêts, distincts de ceux des Américains.
Le rôle clé de la Pologne et de nouveaux alliés européens
Pour mener ce projet de souveraineté, Macron et Scholz devront compter sur de nouveaux alliés européens selon Maillard et Donald Tusk, Premier ministre polonais et contributeur du FEM, semble un partenaire idéal. La Pologne, qui prendra la présidence de l’UE en janvier, est profondément euroatlantiste, mais a renforcé sa défense nationale depuis le début de la guerre en Ukraine, note le Français.
Giorgia Meloni, Première ministre italienne, compte tenue de sa proximité avec Trump pourrait également jouer un rôle intéressant en tant qu’intermédiaire avec Washington selon lui, même si la presse italienne annonçait récemment qu’elle souhaitait secrètement l’élection de Harris.
Par ailleurs, Maillard estime que la réélection de Trump pourrait aussi influencer les relations avec le Royaume-Uni, offrant une opportunité pour renforcer les liens de défense entre l’UE et Londres.
L’Institut Jacques Delors
En 2006, Jacques Delors, a fondé l’institut de recherche « Notre Europe », qui sera par la suite renommé l’Institut Jacques Delors. Il est actuellement présidé par Enrico Letta et a également été dirigé par Pascal Lamy et Antonio Vitorino, tous contributeurs de l’agenda 2030 du Forum économique mondial.
Letta a créée 2017, « l’académie Notre Europe » ayant pour objectif de former des « futurs leaders européens ». Elle a par exemple participé à des projets dans le cadre du Forum de Paris sur la paix, de la COP 24 sur le climat, et du European Youth Forum ou « l’Agora européen », organisé en 2019 à Budapest qui a réunit des jeunes citoyens européens et des contributeurs du FEM, comme Pascal Lamy, Pierre Moscovici ou Carlos Moedas.