Dix jours après l’instauration d’un cessez-le-feu négocié sous l’égide de Washington, la situation à Gaza replonge dans la tension. Après plusieurs attaques contre ses soldats, Israël a suspendu l’entrée de l’aide humanitaire, accusant le Hamas d’avoir violé les termes de la trêve. Une décision qui accentue la crise humanitaire et révèle la fragilité du plan de paix promu par Donald Trump.
La paix espérée n’aura duré que quelques jours. Ce dimanche 19 octobre, Israël a suspendu l’accès de l’aide humanitaire à la bande de Gaza, invoquant une « violation flagrante du cessez-le-feu » par le Hamas, selon une source sécuritaire israélienne citée par l’AFP. Selon Times of Israël, des soldats israéliens auraient été visés par des attaques palestiniennes, provoquant des frappes de représailles.
Cette annonce survient alors que la trêve, arrachée le 10 octobre grâce à la médiation de l’Égypte, du Qatar et des États-Unis, devait marquer une accalmie après des mois d’affrontements meurtriers. Mais sur le terrain, la situation reste explosive : tirs sporadiques, affrontements entre factions et multiplication des checkpoints témoignent d’une paix plus fragile que jamais.
Une trêve au bord de la rupture
Dans les rues de Gaza, les patrouilles armées du Hamas ont refait surface, et des postes de police improvisés ont été installés. Officiellement, ces structures visent à maintenir l’ordre. En réalité, elles traduisent le retour du contrôle sécuritaire du mouvement islamiste, que la trêve semblait affaiblir.
Les tensions à Gaza s’étaient déjà ravivées ces derniers jours. Le département d’État américain avait alerté samedi 18 octobre sur des « menaces crédibles » visant des civils palestiniens accusés de collaboration avec Israël. « Cette attaque planifiée contre des civils palestiniens constituerait une violation directe et grave de l’accord de cessez-le-feu et compromettrait les progrès significatifs réalisés grâce aux efforts de médiation »
, déclarait le département d’État dans un communiqué. « Si le Hamas réalise cette attaque, des mesures seront prises pour protéger la population de Gaza et préserver l’intégrité du cessez-le-feu »
, ajoutait-il.
Le Hamas a accusé ce dimanche les autorités israéliennes d’avoir mis en place, financé et armé des « groupes criminels » impliqués, selon lui, dans des meurtres, des enlèvements et des actes de pillage, rapporte Reuters. Le mouvement palestinien affirme que les forces de police de Gaza « accomplissent leur devoir » en poursuivant ces groupes afin de les traduire en justice. Il a également appelé l’administration américaine à « cesser de reprendre le discours trompeur de l’occupant ».
Washington entre prudence et inquiétude
Pour Donald Trump, artisan de la trêve, cette reprise des violences sonne comme un échec politique prématuré. Le président américain avait présenté son accord comme une « victoire diplomatique », vantant une « paix pragmatique fondée sur le résultat ». Mais l’absence d’un mécanisme de contrôle ou de désarmement rendait cette paix inapplicable dans la durée.
Selon plusieurs analystes, la rupture de la trêve pourrait servir de prétexte à une reprise des opérations militaires israéliennes à grande échelle, tout en affaiblissant la crédibilité du plan américain. Donald Trump a toutefois affirmé dimanche que le cessez-le-feu entre Israël et le Hamas est toujours en vigueur, malgré les dizaines frappes de l’armée israélienne sur la bande de Gaza.
Donald Trump a menacé le Hamas de représailles après l’exécution de civils cette semaine. Sur son réseau Truth Social, il a écrit jeudi que « si le Hamas continue à tuer des gens à Gaza, ce qui n’était pas prévu dans l’accord, nous n’aurons pas d’autre choix que d’aller les tuer ». Il n’a pas précisé qui serait chargé d’une telle opération. Deux jours auparavant, il avait affirmé que les États-Unis étaient prêts à « désarmer » le mouvement islamiste palestinien par la force, puis a indiqué qu’il ne serait « pas nécessaire (d’engager des) soldats américains » pour ce faire.
« S’ils ne se désarment pas, nous les désarmerons. Et cela se fera rapidement, et peut-être violemment », avait averti Trump depuis la Maison-Blanche le 14 octobre. Cette mise en garde, interprétée comme un ultimatum, a désormais un écho inquiétant.
Une paix introuvable
Pour les chancelleries arabes, l’épisode confirme les limites de la diplomatie de transaction. Les Émirats arabes unis, l’Arabie saoudite et l’Égypte conditionnent désormais toute participation à la reconstruction de Gaza à un désarmement clair du Hamas – une exigence que le mouvement islamiste rejette catégoriquement.
Sur le terrain, l’aide humanitaire est devenue une arme politique : sa suspension pèse sur une population déjà épuisée par la guerre et l’embargo. La suspension de l’aide humanitaire risque d’avoir des conséquences dramatiques pour la population civile. Des milliers de familles déplacées dépendent actuellement des convois humanitaires pour survivre. Sans carburant, ni vivres, ni médicaments, les hôpitaux et les camps de réfugiés de Gaza se retrouvent dans une situation d’urgence absolue.
Entre trêve violée et discours belliqueux, Gaza redevient ce qu’elle n’a jamais cessé d’être : un territoire suspendu entre guerre et survie, où la paix reste un horizon lointain.
Trente ans après les accords d’Oslo, la boucle semble bouclée. La diplomatie américaine a, une fois encore, obtenu le silence des armes — sans en désarmer l’une de ses principales causes.
Sources :
TF1, Times of Israel, Marianne, Boursorama.