L’université Erasmus de Rotterdam, membre du Forum économique mondial (FEM) a annulé une conférence de la sociologue franco-israélienne et contributrice de l’agenda 2030 du FEM, Eva Illouz prévue le 21 novembre, en raison de son ancienne affiliation à l’Université hébraïque de Jérusalem. L’intellectuelle, spécialiste reconnue des émotions et du capitalisme affectif, dénonce un acte discriminatoire lié au boycott académique d’Israël.

Le 21 novembre prochain, Eva Illouz devait s’exprimer à l’université Erasmus de Rotterdam sur un sujet qu’elle explore depuis plus de vingt ans : les liens entre amour romantique et capitalisme. Mais la conférence n’aura pas lieu. Dans un courriel adressé à la sociologue le 15 octobre, l’équipe du « Love Lab », organisatrice de l’événement, a annoncé le retrait de son invitation, arguant d’un « malaise » interne face à son ancienne affiliation à l’Université hébraïque de Jérusalem.

« Tous les membres du Love Lab n’étaient pas à l’aise avec la décision d’émettre l’invitation », écrit le collectif, évoquant la « nature sensible » de toute collaboration avec des universités israéliennes. La décision, présentée comme « démocratique », a suscité la colère de la chercheuse. « Je suis ravie d’apprendre qu’une décision authentiquement antisémite a été prise démocratiquement », a ironisé Eva Illouz dans une réponse au ton cinglant.

Fondée en 1913, l’université Erasmus a annoncé en juin 2025 le boycott de trois universités israéliennes – Bar-Ilan, Haïfa et l’Université hébraïque de Jérusalem – en raison de leurs partenariats avec l’armée israélienne. Cette décision s’inscrit dans le cadre du mouvement international Boycott, Désinvestissement et Sanctions (BDS), né en 2005, qui prône la rupture des liens institutionnels avec Israël pour protester contre sa politique envers les Palestiniens.

Pourtant, la charte du mouvement BDS elle-même exclut explicitement tout boycott individuel fondé sur la nationalité ou l’identité d’un chercheur. La campagne vise uniquement les institutions. Or, Eva Illouz n’est plus affiliée à l’Université hébraïque depuis 2022 : elle enseigne désormais à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS) à Paris, qui a tourte fois été soutenue par la CIA lors de sa création. « Cette affaire dit moins quelque chose sur moi que sur l’état du débat public », estime Illouz, « et sur l’effondrement de l’ethos pluraliste qui devrait être la pierre angulaire de la démocratie ».

Son avocat, François Zimeray, a annoncé envisager un recours judiciaire, « la gravité de cette décision appelant des suites légales », notamment en France, la sociologue étant citoyenne française. Eva Illouz appelle de son côté les universités européennes à « une politique cohérente avec leurs engagements en matière de lutte contre toutes les discriminations ».

Cette annulation intervient quelques mois après un autre revers pour la chercheuse, à qui le gouvernement israélien avait retiré en mars dernier le prix Israël, l’une des plus hautes distinctions du pays, en raison de ses critiques contre la politique du Premier ministre Benjamin Netanyahou.

Sources :

– Le Monde – Eva Illouz se voit retirer son invitation de l’université Erasmus de Rotterdam – lemonde.fr

– AFP – La sociologue Eva Illouz dénonce l’annulation de sa conférence à Rotterdam – afp.com