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Le fondateur du Forum économique mondial, Klaus Schwab et le contributeur du FEM, Emmanuel Macron à Davos en 2018. Photo : @WEF

Des contributeurs du Forum économique mondial rendent un rapport commandé par Macron sur l’Intelligence artificielle

Le président français et contributeur de l’agenda 2030 du Forum économique mondial, Emmanuel Macron, a mandaté une commission qui a rendu un rapport ce mercredi 13 mars sur l’intelligence artificielle. Coprésidé par les contributeurs de l’agenda 2030 du Forum économique mondial, Philippe Aghion et Anne Bouverot, respectivement professeur au Collège de France et présidente du Conseil d’administration de l’ENS, cette commission de l’IA, qui regroupe une quinzaine d’experts, a émis quelques recommandations qui pourraient susciter la polémique. Explications.

Ce rapport n’est pas le premier réalisé en la matière. L’ancien président de la République et contributeur de l’agenda 2030 du Forum économique mondial, François Hollande, avait déjà commandé un rapport qui avait été publié en 2017, dans le cadre duquel il s’était engagé à débloquer une enveloppe de 1,5 milliards d’euros sur dix ans afin de développer cette technologie.

Le rapport du Young Leader de la Fondation France-Amérique, Cédric Villani sur l’IA

La même année, Édouard Philippe, Premier ministre et Young leader de la Fondation France-Amérique, un groupe d’influence par lequel sont passés des contributeurs du FEM, comme Emmanuel Macron, François Hollande, et Bill Clinton, avait chargé le député Cédric Villani, lui aussi passé par cette fondation, de rendre un rapport sur l’IA. Publié en 2018, il avait influencé la stratégie énoncée par le chef de l’État en la matière. Ce rapport conseillait de favoriser un meilleur accès aux données et préconisait même que la puissance publique impose « l’ouverture s’agissant de certaines données d’intérêt général ». Le mathématicien évoquait notamment le secteur de la Santé, pour lequel il souhaitait la création « d’une plate-forme d’accès et de mutualisation des données pertinentes pour la recherche et l’innovation ». Selon le rapport de Villani, l’effort économique et industriel devait d’ailleurs se concentrer sur les secteurs de la Santé, du transport et des mobilités, de l’écologie, de la Défense et de la Sécurité. Le député conseillait à l’État de jouer « un rôle fondamental » pour « amorcer le mouvement et la structuration de l’écosystème » en devenant son « premier client », grâce à des dispositifs de soutien à l’innovation, des subventions, des commandes publiques, mais aussi l’organisation de « grands défis », qui se sont depuis concrétisés dans le cadre de France 2030. Villani recommandait également « l’allégement, temporaire, de certaines contraintes réglementaires » et « des moyens d’expérimentation en situation réelle », comme ce fut le cas à Nice avec l’expérimentation de la reconnaissance faciale lors d’une expérimentation durant le Carnaval de 2019.

Le rapport de Villani recommandait également de développer la recherche, en formant de jeunes experts via « un réseau de recherche d’excellence » en IA, constitué d’instituts interdisciplinaires répartis sur tout le territoire, rassemblant chercheurs français et étrangers. Par la suite, Xavier Niel, le patron de Free et gendre du milliardaire Bernard Arnault, qui est un habitué des réunions du groupe Bilderberg, a développé sept campus dédiés à l’Intelligence artificielle à Paris, Nice, Mulhouse, Angoulême, Perpignan, Le Havre et Lyon dans le campus numérique voulu par le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes et Young leader de la Fondation France-Amérique, Laurent Wauquiez.

Cédric Villani prônait également une intelligence artificielle « éthique » et inclusive, insistant sur la nécessité de féminiser les métiers liés à cette technologie et de lutter contre les discriminations. Pour ce faire, il recommandait la mise en place d’un comité d’éthique de l’IA, chargé d’organiser le débat public et de fournir des avis et recommandations « en toute indépendance ». Il conseillait également que les pouvoirs publics se dotent « d’une fonction d’audit de ses algorithmes » et puissent, « dans le cadre d’une procédure judiciaire ou sur saisine du Défenseur des droits », examiner leurs « boîtes noires ».

Les propositions de la Commission IA

Le rapport qui vient d’être rendu par la Commission de l’IA, coprésidée par les contributeurs de l’agenda 2030 du Forum économique mondial, Philippe Aghion et Anne Bouverot, semble valider les préconisations du Young Global Leader de la Fondation France-Amérique, Cédric Villani. Il salue l’IA comme une opportunité majeure de renouveau économique, mettant en garde contre le risque de déclassement économique si la France ne saisit pas cette chance. Les auteurs comparent l’importance de l’IA à celle de révolutions technologiques passées telles que l’électricité et l’automobile, soulignant le potentiel de croissance et de création d’emplois.

La commission propose notamment d’investir 5 milliards d’euros par an sur cinq ans, pour financer le secteur et la diffusion de la technologie dans les entreprises, mais aussi pour former les salariés, auquel s’ajouterait un « fonds IA » doté de 10 milliards d’euros, dont 7 milliards seraient issus du privé et 3 milliards du public, pour investir dans des jeunes pousses et des projets consacrés à l’IA.

Le rapport propose également une réforme fiscale ambitionnant de « réorienter une partie de l’épargne privée vers l’innovation », ou la diffusion de l’IA dans les services publics, comme l’éducation et la Santé.

Pour attirer les entreprises spécialisées dans l’IA sur le territoire français, un crédit d’impôt leur serait accordé. Le texte souhaite également « faciliter l’implantation » des data centers en « simplifiant les procédures d’installation ».

Le rapport préconise également d’investir 7 milliards pour créer des filières européennes de semi-conducteurs. Autant d’investissement qui pourrait susciter des débats alors que le ministre de l’Économie et contributeur du Forum économique mondial, Bruno Le Maire, opère un tour de vis budgétaire. À Davos, Macron avait d’ailleurs appelé à un plan européen de la même envergure que celui qui avait été mis en place durant la crise sanitaire pour développer les nouvelles technologies.

Des propositions controversées

Le rapport contient de nombreuses propositions controversées comme l’assouplissement de certaines procédures d’autorisation de la CNIL visant à utiliser des données personnelles, notamment par la police et l’Armée ou dans le domaine de la Santé. Comme le rapport publié au mois de janvier par l’OMS du contributeur de l’agenda 2030 du Forum économique mondial, le Dr Tedros, le rapport de la Commission IA, considère que cette technologie va permettre « d’améliorer les soins et le quotidien des soignants ». Il propose d’établir un « cadre réglementaire harmonisé » d’ici 2025, afin de « bâtir une doctrine d’évaluation de la performance de l’IA » et « d’inscrire le principe de l’usage de l’IA dans [les] parcours de soins et dans l’évaluation continue de l’efficience de ces parcours et des produits ». L’OMS préconisait pour sa part une régulation « By Design », c’est-à-dire dès la conception des applications, comme l’a également recommandé le contributeur de l’agenda 2030 du Forum économique mondial, Emmanuel Macron, à Davos. Les experts de la commission conseillent aussi de « faciliter la circulation des données » de santé, avec la mise en place dès le mois de juin, d’une « copie pseudonymisée » du système national des données de Santé qui devrait être hébergée « sur un cloud commercial sécurisé ». Cela risque de susciter la polémique alors que le stockage de la plateforme publique de données de santé Health Data Hub chez Microsoft, le géant américain membre du Forum économique mondial, avait déjà défrayé la chronique.

Dans l’Éducation nationale, le rapport propose d’encourager « l’utilisation individuelle dans la préparation des cours, l’appui administratif et la formation ponctuelle aux enseignants ».

Les experts recommandent en fait, une large diffusion dans les services publics. Durant l’été 2024, un projet pilote est d’ailleurs d’ores et déjà prévu pour offrir aux fonctionnaires un accès protégé à un modèle de traitement du langage naturel similaire à ChatGPT afin d’en évaluer les performances. La Direction interministérielle du numérique, qui aura subi des réformes, aura pour mission de développer une infrastructure partagée et centralisée dédiée à l’intelligence artificielle au sein du service public.

Le rapport invite aussi sur la nécessité de négocier « un accord national interprofessionnel sur le numérique et l’IA » et suggère la création d’une initiative internationale pour la transparence des conditions de travail des travailleurs de la sous-traitance impliqués dans l’entraînement des IA, pour évaluer les logiciels ou modérer les contenus problématiques.

Par ailleurs, l’idée d’une gouvernance mondiale de l’IA, avec la proposition d’une « World AI Organization » basée à Paris, reflète l’ambition française de jouer un rôle de premier plan sur la scène internationale en matière d’IA. Elle s’inscrit aussi dans la volonté globale des dirigeants mondiaux proches du Forum économique mondial de réguler l’IA à un niveau international, comme en témoignent les débats qui ont eu lieu à Davos 2024, le grand rassemblement du FEM, ou le sommet qui a eu lieu au mois de novembre au Royaume-Uni du contributeur du FEM, Rishi Sunak. Lors de cette réunion, des critiques avaient souligné l’absence de la société civile. À Davos, Macron avait annoncé vouloir faire de la France le leader européen de l’IA. Le pays s’apprête d’ailleurs à accueillir, lui aussi, un sommet international de l’Intelligence artificielle à la fin de l’année. Dans la station située dans les Alpes helvétiques, la CEO d’Accenture, Julie Sweet, qui est par ailleurs contributrice de l’agenda 2030 du FEM, avait annoncé lors du discours d’Emmanuel Macron que son entreprise allait ouvrir un Hub dédié à l’IA dans l’Hexagone. Le CEO de Google et contributeur du FEM, Sundar Pichai, était en déplacement à Paris au mois de février afin d’inaugurer le nouveau Hub d’Intelligence Artificielle du GAFAM, membre du FEM situé dans le IXe arrondissement de Paris.

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