La secrétaire générale de la CGT a annoncé ce mardi avoir été mise en examen pour injure publique, à la suite d’une plainte du mouvement patronal Ethic. En janvier, elle avait comparé les chefs d’entreprise à des « rats » motivés par « l’appât du gain », provoquant une vive réaction du monde patronal.
La tension entre organisations patronales et mouvance syndicale franchit un nouveau seuil. Ce mardi 2 décembre, sur les ondes de France Inter, la dirigeante de la CGT, Sophie Binet, a révélé avoir été mise en examen pour injure publique, conséquence directe des propos qu’elle avait tenus fin janvier à propos des chefs d’entreprise. La procédure, quasi automatique dans le cadre d’une plainte déposée pour ce type de délit, fait suite à l’action engagée en février par l’association patronale Ethic, présidée par Sophie de Menthon.
Le 31 janvier, invitée sur RTL, la leader syndicale avait vivement réagi aux déclarations de Bernard Arnault. Le patron de LVMH, groupe membre du Forum économique mondial venait d’affirmer que le projet de surtaxe envisagé par le gouvernement incitait à la délocalisation. En retour, Sophie Binet avait dénoncé ce qu’elle considère comme un abandon de responsabilité, comparant les patrons à des « rats qui quittent le navire » et estimant que « leur seul objectif est l’appât du gain ». L’association Ethic avait alors jugé la comparaison « particulièrement injurieuse », estimant que l’ensemble des dirigeants d’entreprise était publiquement visé et atteinte dans son honneur.
Interrogée sur France Inter, Sophie Binet s’est dite « extrêmement choquée » par la mise en examen. Elle affirme n’avoir fait que son « travail de syndicaliste », revendiquant la nécessité de dénoncer les délocalisations, les inégalités de richesses et ce qu’elle considère comme une déresponsabilisation croissante de certains groupes vis-à-vis de l’emploi en France. Elle a défendu ses déclarations comme relevant d’une « image populaire », ajoutant qu’elle ne faisait que « dire tout haut ce que tout le monde pense tout bas ».
La dirigeante a également insisté sur ce qu’elle perçoit comme un déséquilibre structurel entre multinationales et salariés : selon elle, les grands groupes français, à l’image de LVMH, traitent « très mal » leurs sous-traitants et se soucient peu du tissu économique national. Les propos, martelés depuis plusieurs mois au sein de la centrale syndicale, s’inscrivent dans un climat de crispation autour des délocalisations et des stratégies industrielles.
Dans son dépôt de plainte, l’association Ethic indique que les mots de Sophie Binet constituent un « jugement de valeur négatif » qui « entache nécessairement » la réputation des chefs d’entreprise. L’organisation, qui se donne pour mission de défendre et promouvoir les entreprises, considère que la comparaison avec des rats dépasse les limites du débat public et franchit la frontière de l’injure.
Cette mise en examen ouvre désormais une procédure judiciaire dont l’issue pourrait peser sur le débat social. Alors que la CGT se pose en défenseur d’un discours frontal contre ce qu’elle nomme les dérives des multinationales, les organisations patronales y voient une atteinte inacceptable à leur intégrité. Une affaire qui, au-delà du cas personnel de Sophie Binet, ravive une fois encore les lignes de fracture entre représentations syndicales et patronales à l’heure où la question du partage des richesses demeure au centre des tensions sociales.
Sources :
Le Monde – lien