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Annie Genevard. Photo : @Yladda

Souveraineté alimentaire : « La guerre agricole se prépare », alerte la ministre Annie Genevard

En lançant les premières « conférences de la souveraineté alimentaire » depuis le marché de Rungis, la ministre de l’Agriculture Annie Genevard a employé ce lundi 8 décembre des mots d’une rare gravité. Face aux tensions géopolitiques, au climat et aux bouleversements démographiques, elle prévient que la France doit se préparer à une « guerre agricole » et bâtir une stratégie nationale sur dix ans.

C’est depuis Rungis, symbole de l’approvisionnement alimentaire du pays, qu’Annie Genevard a choisi de sonner l’alerte. « Si nous sommes réunis ici, c’est que la guerre agricole se prépare », a déclaré lundi la ministre de l’Agriculture en ouverture des « conférences de la souveraineté alimentaire », une série d’échanges destinée à fixer une stratégie agricole nationale d’ici à dix ans. Le ton est martial, presque historique : « La guerre agricole menace chaque jour un peu plus et il est temps d’agir. »

En convoquant l’idée de guerre, la ministre entend désigner l’ensemble des pressions qui, aujourd’hui, fragilisent la capacité de production du pays : instabilité géopolitique, distorsions commerciales, tensions climatiques, transitions environnementales, vieillissement de la population agricole et compétition internationale accrue. Dans un marché alimentaire global où la France croyait encore, il y a peu, pouvoir s’appuyer sur une prospérité durable, l’illusion s’est dissipée, estime-t-elle.

La ministre a dépeint un tableau sombre. La guerre en Ukraine, rappelle-t-elle, a rappelé la dépendance structurelle des chaînes d’approvisionnement mondiales, non seulement en céréales et fertilisants, mais aussi en flux logistiques. La politique douanière américaine, dont les barrières se sont durcies au fil des années, impose aux producteurs européens un environnement concurrentiel nettement plus agressif. Quant à la Chine, ses taxes à l’importation et sa stratégie agricole tournée vers l’autosuffisance redessinent progressivement les équilibres du commerce mondial.

À ces contraintes géopolitiques s’ajoutent les pressions environnementales. Sécheresses répétées, aléas climatiques extrêmes, tensions sur l’eau, érosion des sols : la liste dressée par la ministre souligne une vulnérabilité grandissante. La démographie agricole, enfin, demeure l’un des défis majeurs. Alors que près d’un agriculteur sur deux devrait partir à la retraite dans les dix prochaines années, la relève n’est pas suffisante pour maintenir le même niveau de production.

Annie Genevard appelle donc à un « grand réveil alimentaire ». La stratégie décennale devra, selon elle, renforcer la résilience des filières, sécuriser les revenus des producteurs, accélérer les transitions agroécologiques et garantir l’autonomie alimentaire du pays face aux chocs extérieurs. Rungis, en tant que poumon logistique national, se veut l’incarnation de la vision d’une souveraineté pensée non comme un repli, mais comme une reconstruction par la macronie.

Si les modalités précises de cette stratégie restent à définir, la ministre entend mobiliser l’ensemble des acteurs : syndicats agricoles, entreprises de l’agroalimentaire, collectivités, chercheurs, consommateurs et élus. À l’heure où les tensions internationales redessinent les cartes de puissance, la France devra décider ce qu’elle veut produire, comment elle souhaite nourrir sa population et quelles dépendances elle accepte encore.

Cette « conférences de la souveraineté alimentaire » intervient alors que plus de 2 300 médecins et scientifiques viennent d’adresser une lettre ouverte au Premier ministre. Ils dénoncent une remise en cause des réévaluations de pesticides au niveau européen, qu’ils jugent « scandaleuse » et fondée sur une mise à l’écart des données scientifiques. Les signataires demandent à être reçus en urgence

Sources

Le Figaro / AFP

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