France 2 diffuse ce mardi 8 octobre les deux premiers épisodes de sa nouvelle série documentaire Notre histoire de France, un programme ambitieux qui vise à déconstruire certains mythes associés au « roman national ». Ce projet s’inscrit dans une volonté de France Télévisions de réexaminer l’histoire de France sous un angle plus critique et moderne, en éclairant le présent à travers les leçons du passé.
La série, inspirée du format danois Historien om Danmark, se concentre sur six figures emblématiques de l’histoire de France : Vercingétorix, Clovis, Charlemagne, Saint Louis, Jeanne d’Arc, et Henri IV. À travers des épisodes de 52 minutes, la série explore non seulement les grandes actions de ces personnages historiques, mais aussi la vie quotidienne de leurs contemporains. Tomer Sisley, acteur et présentateur de la série, intervient régulièrement dans les scènes reconstituées pour apporter un regard contemporain sur ces périodes historiques.
Selon Nicolas Daniel, directeur des magazines de France Télévisions, l’un des enjeux majeurs de cette série est de déconstruire les réécritures historiques qui ont façonné certains mythes au service d’idéologies nationalistes. L’objectif est de proposer un regard nuancé sur des événements historiques souvent simplifiés dans les manuels scolaires ou dans l’imaginaire collectif.
Déconstruire les mythes du roman national
Le premier épisode, consacré à Vercingétorix, s’attache à briser l’image traditionnelle du chef gaulois, souvent représenté avec des cheveux longs et une grande moustache. La série met en lumière des aspects méconnus de la société gauloise, comme la place des femmes, qui jouissaient d’une autonomie financière et avaient le droit de divorcer. Le programme s’intéresse aussi à la sexualité des guerriers gaulois, des sujets rarement abordés dans les récits traditionnels.
Ces choix audacieux de réinterpréter l’Histoire ont pour but de montrer que l’histoire est une discipline en constante évolution, comme le souligne Cécile Lévy, productrice de la série, affirmant que cette science « n’est pas figée, elle évolue à mesure que les historiens découvrent de nouvelles choses. »
Une approche rassembleuse et non polémique
France Télévisions insiste sur l’approche rassembleuse de Notre histoire de France. Contrairement à certaines visions de l’histoire utilisées pour diviser, l’objectif de cette série est de susciter un débat sain autour de notre identité nationale. Nicolas Daniel reconnaît que la série pourrait susciter des critiques de la part de ceux qui préfèrent une histoire figée, chrétienne et blanche, mais il se réjouit à l’avance des échanges constructifs que cette série pourrait provoquer.
L’importance de débats contradictoires
Méfiance toutefois, car l’historien, tout comme le journaliste, est à la fois sujet et objet. De ce fait, il ne peut aborder toute la complexité d’une époque. L’exemple de l’ouvrage La Méditerranée et le Monde méditerranéen à l’époque de Philippe II, de l’historien français Fernand Braudel, publié en 1949, est sans doute le plus pertinent pour illustrer ce phénomène. Cet ouvrage, qui avait l’ambition de faire d’un espace maritime l’acteur principal d’une œuvre et de retracer l’histoire de la Méditerranée depuis le temps géologique jusqu’à l’histoire des batailles, est considéré comme un ouvrage majeur de l’historiographie du XXe siècle. Si Fernand Braudel ambitionnait de dépeindre une histoire totale, en tant que marxiste, matérialiste et athée, il est passé à côté de la conquête de Mahomet, qui avait transfiguré tout le bassin sud de la Méditerranée. Preuve que l’Histoire, comme toutes les autres sciences, et peut-être plus encore, progresse par la confrontation des idées et des récits, et non par la constitution d’une Histoire officielle, qu’elle soit fasciste ou wokiste.