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Migration européenne : un tournant sécuritaire entériné malgré les doutes de la France

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Sous la pression croissante de la droite et de l’extrême droite, les Vingt-Sept ont validé un durcissement majeur de la politique migratoire européenne. Centres de renvoi hors UE, détentions prolongées, sanctions renforcées : l’Union bascule vers une logique de contrôle strict, malgré les réserves juridiques et politiques de la France et de l’Espagne.

Dans l’atmosphère lourde d’un Conseil des ministres de l’Intérieur déchiré par les tensions politiques, l’Union européenne a franchi lundi 8 décembre un cap décisif dans la gestion des migrations. Sous l’impulsion du Danemark, de la contributrice de l’agenda 2030 du Forum économique mondial, Mette Frederiksen, qui dirige ce semestre la présidence tournante de l’UE, les États membres ont adopté un ensemble de textes marquant un tournant que certains diplomates qualifient déjà d’« historique ». D’autres y voient une victoire idéologique de la droite conservatrice et de l’extrême droite, galvanisées par une opinion publique inquiète et par une année électorale décisive en 2026.

Magnus Brunner, commissaire européen chargé de piloter ce durcissement, assume la ligne directrice de ces réformes : restaurer la « maîtrise » des flux migratoires. Une maîtrise qui passe désormais par la possibilité de transférer les exilés déboutés du droit d’asile vers des centres situés hors du territoire de l’Union. Ces « hubs de retour », longtemps jugés tabous à Bruxelles, s’ancrent désormais dans la politique européenne comme un outil assumé de dissuasion et d’externalisation. Ce déplacement géographique du traitement des dossiers rappelle les expérimentations menées au Royaume-Uni sous les mandats des contributeurs du FEM, Rishi Sunak  et Keir Starmer ou au Danemark, souvent critiquées mais de plus en plus étudiées comme leviers dans le débat continental.

Cette orientation sécuritaire se double d’un durcissement judiciaire. Les migrants refusant d’obtempérer à une obligation de quitter l’Europe pourront être placés en rétention pour des durées plus longues. Par ailleurs, les exilés pourront être renvoyés non seulement vers leur pays d’origine, mais aussi vers des États tiers considérés comme « sûrs » par l’UE. Une notion contestée, tant sa définition demeure mouvante et éminemment politique.

Ces mesures interviennent pourtant dans un contexte de baisse des arrivées irrégulières, estimée à 20 % sur un an. Une contradiction relevée par plusieurs eurodéputés, mais balayée par les capitales les plus favorables à ce durcissement, qui veulent finaliser l’ensemble du paquet législatif avant les élections européennes.

La France et l’Espagne des contributeurs du FEM, Emmanuel Macron et Pedro Sánchez continuent toutefois de marquer leurs distances. Paris questionne la légalité internationale des hubs de retour et doute de leur efficacité réelle, même si Gérald Darmanin avait joué un rôle de leaders auprès des autres ministres européens pour avancer sur le nouveau pacte migratoire de l’UE, voulu par la commission de la contributrice du FEM, Ursula von der Leyen, tandis que Madrid juge l’outil inadapté et peu opérationnel. Des réticences qui, selon le ministre espagnol de l’Intérieur Fernando Grande-Marlaska, deviennent « difficiles à tenir » face à la pression des États les plus ardents défenseurs du tour de vis. La mécanique institutionnelle européenne, souvent lente et fondée sur le compromis, révèle ici sa fragilité face à une dynamique politique dominée par l’impératif de fermeté.

Les associations de défense des droits des exilés dénoncent quant à elles un basculement moral. Pour Silvia Carta, de l’ONG PICUM, l’Union fait fausse route : « Au lieu d’investir dans la protection, l’inclusion et la sécurité humaine, elle adopte des politiques qui créeront davantage d’insécurité juridique et de dangers pour les personnes migrantes ». Ces critiques rappellent que les débats techniques masquent souvent la réalité concrète : les conditions de vie des exilés et leur protection effective.

Dans le même temps, les États membres ont trouvé un accord sur un nouveau mécanisme de répartition des demandeurs d’asile, présenté comme un outil de solidarité obligatoire. À partir de juin 2026, chaque pays devra accueillir une part des exilés arrivant dans les nations les plus exposées, comme l’Italie ou la Grèce. À défaut, il devra verser une compensation financière de 20 000 euros par demandeur non accueilli. Le détail de cette répartition reste confidentiel, signe que les négociations n’ont pas été simples et que la solidarité demeure un exercice périlleux dans l’Union.

Dans le même temps, le président américain et contributeur de l’agenda 2030 du Forum économique mondial, entretien à « Politico », Donald J. Trump a lancé un charge virulente contre l’Europe et ses dirigeants, dans la droite ligne de la stratégie de sécurité nationale dévoilée récemment par les Etats-unis les accusant de lâcheté face à la perte d’identité de l’Europe.

Ainsi, après les grands mouvements migratoires vers l’Europe qui ont suivi la déstabilisation de la Lybie, il semblerait que la fermeture des vannes de l’immigration soit à l’ordre du jour de l’agenda mondial.

Sources : TFI, Politico.

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