Un déjeuner ordinaire dans un bistrot du centre de Lyon s’est transformé en scène d’observation politique. Dans un post très détaillé, le journaliste Philippe Brunet-Lecomte relate une conversation captée au Café Bellecour entre plusieurs soutiens de Jean-Michel Aulas, aujourd’hui engagés à ses côtés dans la bataille pour la mairie de Lyon. Derrière les airs de fidélité affichée, le récit met au jour des tensions internes, des frustrations et des critiques acerbes sur la constitution de l’équipe du candidat.
« Méfiez-vous de ce que vous racontez dans un bistrot… il y a toujours une oreille qui traîne », commence d’emblée le journaliste lyonnais alors que la publication par l’Incorrect des images de Thomas Legrand et Patrick Cohen discutant avec des cadres du Parti socialiste et critiquant Rachida Dati a entrainé une guerre médiatique entre France Télévision et CNews.
L’ancien rédacteur de Lyon Mag ne fait toutefois pas référence à cet épisode parisien mais à de la « tambouille » Lyonnaise comme l’aurait regretté des soutiens de Jean-Michel Aulas.
La scène se déroule au Café Bellecour, établissement emblématique du centre de Lyon, rendez-vous des notables locaux. Assis à une table voisine, Philippe Brunet-Lecomte écoute, sans intervenir, une discussion animée entre cinq personnes se présentant comme des soutiens du candidat à la mairie de Lyon. Trois jeunes inconnus et deux figures plus âgées, dotées d’une certaine notoriété locale, selon le journaliste déjeunent ensemble et commentent, à voix suffisamment haute pour être entendue, les coulisses de la campagne municipale de l’ancien président de l’Olympique lyonnais.
Le ton est d’emblée critique. Ceux qui se revendiquent du parti de Jean-Michel Aulas « cœur lyonnais », expriment leur agacement face à ce qu’ils perçoivent comme une méthode de gouvernance déjà à l’œuvre. Autour d’un tartare de saumon, la discussion s’envenime sur la constitution du futur « gouvernement » municipal et métropolitain que le candidat serait en train de préparer. Une routine politicienne, selon eux, mais qui susciterait déjà incompréhensions et rancœurs.
Au centre des critiques figure la désignation de Véronique Sarselli comme tête de liste à la métropole. Officielle, cette nomination serait, d’après les propos rapportés, appelée à être remise en cause au dernier moment. Les convives évoquent une mise à l’écart programmée, attribuée à son franc-parler, au profit d’un certain Vincendet. La méthode choque et alimente le sentiment d’une stratégie opaque, faite d’ajustements tardifs et de calculs internes.
Autre sujet de crispation, le sort d’Oliver, maire du deuxième arrondissement de Lyon. Celui-ci aurait renoncé à se présenter pour soutenir Jean-Michel Aulas, en échange de la promesse de lui succéder. Une promesse qui, selon les discussions entendues, ne serait plus d’actualité. Le poste de premier adjoint devrait revenir Béatrice de Montille, peu connue du grand public, mais disposant d’un réseau intéressant. Là encore, la déception est palpable et la colère affleure, certains affirmant que l’intéressé serait « furieux ».
À mesure que les verres de côte du Rhône se vident, les langues se délient davantage. Une jeune femme résume l’état d’esprit général par une formule lapidaire : « Ça commence mal ». Elle pointe surtout l’arrivée de « vieux briscards » pressentis pour des postes clés, notamment à la culture ou à l’urbanisme. Deux noms reviennent avec insistance, Vernay-Carron et Le Faou, présentés comme les symboles d’un « ancien monde » politique que certains espéraient voir disparaître. Les mots deviennent plus durs, évoquant opportunisme et magouilles, avant qu’un des plus âgés ne rappelle à l’ordre : la conversation pourrait être entendue.
Le récit de Philippe Brunet-Lecomte souligne aussi une forme de résignation mêlée de défi. Si certains appellent à « résister », d’autres estiment que face à Jean-Michel Aulas, « tout le monde ferme sa gueule ». Le portrait dressé par l’un des barons est celui d’un homme à l’écoute en façade, mais tranchant seul, sans état d’âme, une fois les décisions prises.
La discussion s’étend à des figures périphériques de la campagne, dont un certain Edouard Hoffman, à l’origine du collectif « Saccage Lyon », qui avait été évacué par la police municipale après avoir agressivement interpellé Audrey Henocque, première adjointe au maire Grégory Doucet, lors de l’inauguration de l’œuvre Tissage urbain sur la célèbre place Bellecour au mois d’avril dernier. Il est décrit par les convives comme une personne jouant un rôle important dans la campagne, mais aussi comme un «dingue», « un réac » qui a agressé la première adjointe écologiste, « une handicapée ». Ils se disent « un peu écoeurés » par la « tambouille » politique en cours.
À l’approche du dessert, les inquiétudes se projettent déjà sur le calendrier. Tout devrait être verrouillé avant Noël pour une mobilisation en janvier, affirment-ils. Mais l’unanimité semble loin d’être acquise, notamment parmi ceux qui auraient été écartés après l’arrivée de nouveaux soutiens, attirés par de bons sondages. Les expressions utilisées sont sévères, évoquant de vieux réseaux, une franc-maçonnerie affairiste ou des notables désireux de retrouver les dorures de l’hôtel de ville.
La conversation s’achève sur une remarque ironique mais lourde de sens. L’un des convives rappelle que Jean-Michel Aulas aura 83 ans à la fin d’un éventuel mandat. « La mairie risque de devenir un véritable EHPAD », lance la jeune femme, provoquant les rires autour de la table. Avant de se séparer, chacun se promet pourtant de dire la vérité au candidat, non sans se lancer le défi de savoir qui osera réellement le faire.
Source :
Post Facebook de Philippe Brunet-Lecomte du Dimanche 14 décembre.