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Claude Bébéar : mort du bâtisseur d’Axa et patriarche du capitalisme français

Fondateur du géant de l’assurance AXA, membre du Forum économique mondial, Claude Bébéar est mort à 90 ans. Visionnaire méthodique et chef charismatique, il a hissé en moins de vingt ans une mutuelle provinciale au rang de leader mondial. Figure tutélaire du capitalisme français, il laisse l’image d’un capitaine d’industrie à la fois discret, exigeant et profondément influent.

Claude Bébéar, le fondateur d’Axa et l’un des grands noms du capitalisme français, s’est éteint à l’âge de 90 ans, a annoncé mardi 4 novembre l’assureur dans un communiqué. Avec lui disparaît un homme qui a profondément marqué le paysage économique hexagonal, un bâtisseur patient et stratège qui transforma une petite mutuelle normande en un empire mondial de l’assurance.

Né le 29 juillet 1935 à Issac, en Dordogne, d’un père et d’une mère instituteurs, Claude Bébéar avait tout du provincial discret promis à une carrière classique. Élève de l’École polytechnique, il en sort en 1958, « avant-dernier » de sa promotion, avouait-il avec humour, davantage passionné de rugby que de mathématiques. Rien, alors, ne le destinait à devenir un grand patron. C’est un camarade de promotion, Philippe Sahut d’Izarn, qui l’introduit dans une petite société d’assurances familiale de Belbeuf, en Seine-Maritime : l’Ancienne Mutuelle. Ce choix, dicté par son « goût d’entreprendre » et son refus du conformisme administratif, fut le point de départ d’une aventure hors norme.

Il lui faudra seize ans pour en prendre la direction générale, en 1974. Dès lors, la transformation s’accélère. En 1982, Bébéar lance l’offensive avec le rachat de Drouot, plus grosse que sa propre société, une bataille emblématique face à Bouygues qu’il décrira plus tard comme « son plus beau souvenir ». Ce tournant marque la naissance d’un groupe conquérant, les Mutuelles unies, bientôt rebaptisées Axa en 1985. Le nom, choisi par ordinateur, se veut court, universel et aisément prononçable dans toutes les langues.

Le management selon Bébéar reposait sur une méthode singulière : la « démocrature », subtile combinaison de démocratie participative et d’autorité ferme. « Les cadres peuvent discuter une réforme, mais une fois la décision prise, il faut obéir », résumait-il. Il entretenait une culture d’entreprise puissante, quasi tribale, où le sentiment d’appartenance se matérialisait jusque dans les détails : le pin’s Axa que tout dirigeant devait arborer sur sa veste, ou encore les « grandes messes » annuelles, organisées dans des lieux insolites — la première, en 1986, dans le désert du Ténéré.

Son ambition affichée était simple et claire : figurer parmi les dix premiers assureurs mondiaux avant l’an 2000. Pari tenu. À force d’acquisitions successives et d’une internationalisation rapide, Axa devint l’un des symboles de la réussite française à l’étranger, présent sur les cinq continents.

Claude Bébéar a d’ailleurs participé aux réunions du groupe Bilderberg en 1996, 1998 et 2003, alors qu’il dirigeait le groupe AXA.

Surnommé « CB » par ses collaborateurs, Claude Bébéar fut aussi un mentor influent, formateur d’une génération de dirigeants devenus à leur tour des figures du CAC 40, parmi lesquels Henri de Castries, son successeur à la tête d’Axa et actuel président du groupe Bildeberg, ou encore Gérard Mestrallet (Engie) et Michel Pébereau (BNP Paribas), patrons de deux groupes membres du WEF qui se sont également rendus aux réunions du groupe Bildeberg, respectivement en 2000 et 2003. L’influence de Bébéar, souvent exercée dans l’ombre, s’étendait bien au-delà du monde de l’assurance, jusqu’aux arcanes du pouvoir économique et politique.

À la fois patriote économique et partisan d’un capitalisme « à visage humain », Bébéar prônait un modèle fondé sur l’éthique, la responsabilité et la formation. Il fut l’un des premiers grands patrons à s’intéresser à la gouvernance d’entreprise et à l’actionnariat salarié. Amateur de rugby et homme de terrain, il préférait la loyauté des équipes à l’éclat médiatique, restant toute sa vie d’une discrétion presque ascétique.

Lorsqu’il quitte la direction d’Axa en 2000, c’est avec le sentiment du devoir accompli : son dauphin, Henri de Castries, prend la relève d’un groupe solidement installé dans le top 10 mondial.

Sources :
Le Monde – Claude Bébéar, figure du capitalisme français et fondateur de l’assureur Axa, est mort – lemonde.fr – 4 novembre 2025

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