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Andry Rajoelina. Photo : @外務省 (MOFA)

Madagascar : Rajoelina renonce à un troisième mandat mais renforce le pouvoir militaire

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Sous pression depuis deux semaines de manifestations meurtrières, le président malgache Andry Rajoelina a annoncé qu’il ne briguerait pas un nouveau mandat. Mais derrière ce geste d’apaisement apparent, la nomination en série de hauts gradés aux postes clés du gouvernement traduit un virage sécuritaire inquiétant.

À Antananarivo, la crise politique s’enlise et les signaux envoyés par le pouvoir se contredisent. Le 8 octobre, le président Andry Rajoelina a solennellement annoncé qu’il renonçait à briguer un troisième mandat. “Cherchez quelqu’un pour me remplacer, car je ne serai pas candidat à la prochaine élection présidentielle”, a-t-il déclaré devant des représentants de la société civile, selon L’Express de Madagascar. Une déclaration censée mettre fin aux rumeurs persistantes d’un maintien au pouvoir au-delà de 2028, malgré l’interdiction constitutionnelle.

Mais cette promesse a été immédiatement éclipsée par une série de décisions politiques à contre-courant. Dès le 6 octobre, Andry Rajoelina a nommé le général Ruphin Fortunat Zafisambo Premier ministre, remplaçant un gouvernement démis au lendemain de manifestations massives. Ancien cadre de l’armée de terre, Zafisambo est considéré comme un fidèle du président et un acteur du système sécuritaire malgache. Le lendemain, trois autres figures issues des forces armées et de la police ont été promues à des postes stratégiques : l’ancien chef d’État-major des armées aux Forces armées, le contrôleur général de police Mandimbin’ny Aina Randriambelo à la Sécurité publique, et le général Andriantsarafara Rakotondrazaka reconduit à la Gendarmerie nationale.

Pour Madagascar-Tribune.com, cette vague de nominations constitue “une manœuvre de consolidation du pouvoir : Rajoelina cherche à “reprendre la main sur une situation critique” en s’appuyant sur des hommes réputés loyaux. “Ces décisions traduisent aussi un régime sur la défensive, conscient de sa fragilité”, analyse le média, qui y voit la volonté du président de “resserrer les rangs autour de l’appareil sécuritaire” afin d’anticiper toute contestation, qu’elle provienne de la rue, de l’opposition ou même de l’armée.

Cette stratégie intervient dans un contexte de forte agitation sociale. Depuis le 25 septembre, Madagascar est secouée par un vaste mouvement de colère populaire. Les coupures d’électricité et d’eau à répétition, dans un pays où plus de 70 % de la population vit sous le seuil de pauvreté, ont mis le feu aux poudres. Selon les estimations des médias locaux, au moins 22 personnes ont été tuées et une centaine blessées lors des affrontements avec les forces de l’ordre. Le président, alors en déplacement à New York pour l’Assemblée générale de l’ONU, avait accusé “des organisations, pays et agences” d’être derrière ces mobilisations.

Face à l’ampleur du mécontentement, Rajoelina a annoncé le lancement d’un cycle de consultations nationales destiné à “écouter les doléances de la société civile”. Pourtant, la démarche semble vouée à l’échec : selon Madagascar-Tribune.comla génération Z, moteur du mouvement, a boycotté la rencontre organisée au palais d’Iavoloha, dénonçant “une mascarade politique”. Plusieurs journalistes et militants ont également refusé d’y participer, estimant que le dialogue était biaisé dès le départ. Les images diffusées par la télévision nationale ont confirmé la prédominance de partisans du régime parmi les invités.

Ainsi, le double discours du président malgache — renoncement politique d’un côté, militarisation de l’exécutif de l’autre — témoigne d’une tentative de survie autoritaire. En s’appuyant sur l’armée pour maintenir l’ordre, Andry Rajoelina espère restaurer la stabilité, mais au risque de creuser davantage la défiance entre le pouvoir et une population jeune, frustrée et désormais déterminée à faire entendre sa voix.

Sources :
Courrier international – « Le président malgache renonce à se représenter mais militarise l’exécutif » – courrierinternational.com – 9 octobre 2025
L’Express de Madagascar – « Rajoelina renonce à un troisième mandat » – 8 octobre 2025
Madagascar-Tribune.com – « La militarisation du pouvoir inquiète » – 7-9 octobre 2025
2424.mg – « Les dessous de la contestation malgache » – 6 octobre 2025
Le Journal de l’île Rouge – « Manifestations : un jeudi noir à Madagascar » – 25 septembre 2025

 

 

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