La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a condamné la France ce jeudi 26 juin pour un contrôle d’identité discriminatoire, mais a rejeté les requêtes de cinq autres Français qui dénonçaient des contrôles d’identité « au faciès ».
Karim Touil, un Français contrôlé trois fois en dix jours en 2011, a obtenu gain de cause. La CEDH a estimé que l’État n’a pas apporté de justification « objective et raisonnable » à ces contrôles répétés. Elle a reconnu l’existence d’une « présomption de traitement discriminatoire » que le gouvernement n’a pas pu réfuter.
La France est ainsi condamnée pour violation de l’article 14 (interdiction de la discrimination) combiné avec l’article 8 (droit au respect de la vie privée et familiale) de la Convention européenne des droits de l’homme. L’État devra verser 3.000 euros à Karim Touil pour dommage moral.
Cinq autres requêtes rejetées
En revanche, la CEDH a rejeté les requêtes de cinq autres plaignants, estimant que leurs contrôles n’avaient pas été motivés par des raisons discriminatoires. La Cour n’a pas relevé de défaillance structurelle générale dans le système français.
Une victoire partielle pour les victimes
Pour Me Slim Ben Achour, avocat des requérants, cette décision est « une grande victoire, d’abord pour ceux qui en sont victimes, et ensuite pour le droit », rappelant que la Cour de cassation avait déjà condamné l’État en 2016 pour des contrôles discriminatoires, et que le Conseil d’État avait reconnu en 2023 que ces pratiques ne se limitaient pas à des cas isolés.
Il estime que cette décision place la France et les autres pays européens « dans l’obligation de prendre des mesures pour éliminer cette pratique particulièrement odieuse ».
Une pratique toujours dénoncée
Les six requérants, d’origine africaine ou nord-africaine, dénonçaient des contrôles subis en 2011 et 2012 à Roubaix, Marseille, Vaulx-en-Velin, Saint-Ouen et Besançon. Ils demandaient la mise en place de mesures comme la remise d’un récépissé à chaque contrôle d’identité pour garantir la traçabilité et lutter contre la discrimination.
Les contrôles en forte hausse
Selon le Défenseur des droits, la proportion de personnes contrôlées a fortement augmenté depuis 2016. En 2024, 26 % des personnes interrogées ont déclaré avoir été contrôlées au moins une fois en cinq ans, contre 16 % en 2016.
Les hommes jeunes perçus comme arabes, noirs ou maghrébins ont quatre fois plus de risques d’être contrôlés que le reste de la population, et douze fois plus de risques de subir un contrôle approfondi (fouille, palpation, ordre de partir). Plus d’une personne sur deux n’a reçu aucune justification de la part des forces de l’ordre, et 19 % évoquent des comportements inappropriés lors des contrôles (tutoiements, insultes, provocations, brutalité).
Des recommandations pour l’avenir
Face à ces constats, la Défenseure des droits, Claire Hédon, recommande notamment la traçabilité des contrôles d’identité pour garantir aux personnes contrôlées la possibilité de recours en cas d’allégation de discrimination.
Source : BFMTV.