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Annie Steiner. Photo : DR

Vénissieux : la préfecture du Rhône boycotte l’inauguration d’un bâtiment nommé en hommage à une militante du FLN

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L’inauguration d’un nouvel équipement polyvalent à Vénissieux, le mardi 26 août, a été marquée par une vive polémique. La préfecture du Rhône a décidé de boycotter l’événement en raison du nom attribué au bâtiment : Annie Steiner, militante du Front de Libération Nationale (FLN) algérien. Aucune autorité préfectorale n’a assisté à la cérémonie, un choix lourd de sens dans un contexte où les mémoires de la guerre d’Algérie restent sensibles en France.

Dans un communiqué officiel, la préfecture a exprimé sa désapprobation totale, qualifiant Annie Steiner de « complice de la lutte armée ». Son implication, plus ou moins directe, dans les actions violentes menées par le FLN dans les années 1950, justifie selon l’État cette décision symbolique. La préfète du Rhône, Fabienne Buccio, déplore le choix de ce nom pour un lieu dédié à la jeunesse, la culture et l’innovation.

Qui était Annie Steiner ?

Annie Steiner, née Annie Fiorio en 1928 à Hadjout (ex-Marengo), fut une militante franco-algérienne emblématique du Front de libération nationale (FLN). Issue d’une famille de pieds-noirs, elle travaille dès 1949 dans les Centres sociaux algériens fondés par Germaine Tillion, où elle découvre la misère des populations autochtones. En décembre 1951, elle épouse le Suisse Rudolf Steiner et aura avec lui deux filles : Édith et Ida. En 1954, bouleversée par les attentats de la Toussaint rouge, elle décide de s’engager sans réserve aux côtés du FLN, devenant agente de liaison et relais entre le FLN et le Parti communiste algérien.

Arrêtée en 1956, elle est condamnée à cinq ans de prison et incarcérée à Barberousse, Maison-Carrée, puis dans plusieurs prisons françaises. Libérée en 1961, elle retrouve sa famille en Suisse, avant de revenir définitivement en Algérie après l’indépendance, dont elle adopte la nationalité. Elle travaille pendant plus de 30 ans au sein du secrétariat général du Gouvernement algérien. Jusqu’à sa mort en 2021, Annie Steiner est resté fidèle aux idéaux du 1er novembre 1954.

L’inauguration de la médiathèque

Le bâtiment inauguré comprend une médiathèque, un espace collaboratif de fabrication numérique et un centre pour les jeunes de 11 à 17 ans. Il a été financé à hauteur de 1,7 million d’euros par l’État, ce qui rend la réaction préfectorale d’autant plus significative. La préfecture estime qu’un nom plus consensuel, symbolisant la paix et la culture, aurait été plus adapté à ce type d’équipement.

La municipalité de Vénissieux, dirigée par la Communiste, Michèle Picard défend son choix. Elle considère Annie Steiner comme un symbole de dialogue entre la France et l’Algérie, et insiste sur son engagement pour la décolonisation. Décédée en 2021, Annie Steiner reste une figure controversée : héroïne pour certains, provocatrice pour d’autres.

Cette affaire relance le débat sur la mémoire de la guerre d’Algérie et la manière dont les collectivités locales choisissent d’honorer certaines figures historiques. Entre hommage militant et devoir de mémoire, les tensions autour de cette inauguration soulignent une fracture toujours vive dans la société française.

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