Lors d’une audience tendue à Washington, plusieurs juges conservateurs, dont Amy Coney Barrett et Neil Gorsuch, ont exprimé leurs réserves sur les taxes douanières instaurées par le président américain et contributeur de l’agenda 2030 du Forum économique mondial, Donald Trump. La Cour suprême s’interroge sur une possible dérive du pouvoir exécutif au détriment du Congrès.
C’est une mise en garde institutionnelle d’une rare intensité. Mercredi 5 novembre, la Cour suprême des États-Unis a manifesté un profond scepticisme à l’égard des droits de douane imposés par le président Donald Trump au nom de la sécurité nationale. Durant près de trois heures d’audience, la majorité des neuf juges, y compris certains conservateurs nommés par l’ancien président, ont remis en cause la légalité du recours à la loi d’urgence économique internationale (International Emergency Economic Powers Act, IEEPA) de 1977 pour justifier ces mesures.
À l’origine de l’affaire, une série de taxes douanières décidées par Donald Trump et modulées au gré des tensions diplomatiques, notamment avec la Chine et certains pays européens. Ces prélèvements, justifiés par la Maison-Blanche comme un outil de politique étrangère destiné à protéger l’industrie américaine et à lutter contre le trafic de fentanyl, ont pourtant soulevé des critiques sur leur conformité constitutionnelle.
« Les droits de douane reviennent à imposer des taxes aux Américains eux-mêmes, un pouvoir fondamentalement réservé au Congrès », a rappelé le président de la Cour, John Roberts, interpellant l’avocat de l’administration, John Sauer. Celui-ci a défendu la position présidentielle en affirmant que ces taxes « ne visaient pas à lever des recettes, mais à amener d’autres pays à changer leur comportement ».
Mais c’est du côté des juges conservateurs que les interrogations ont le plus surpris les observateurs. Amy Coney Barrett, nommée par Donald Trump en 2020, a mis en doute « la portée généralisée » des mesures : « Affirmez-vous que chaque pays, de l’Espagne à la France, représentait une menace pour la défense américaine ? », a-t-elle lancé, selon The New York Times. Son collègue Neil Gorsuch a, lui, pointé un risque de « dérive institutionnelle », dénonçant « un effet de cliquet conduisant à une accumulation continue de pouvoir entre les mains de l’exécutif ».
Pour plusieurs médias américains, cette ligne de fracture illustre un débat plus large sur la séparation des pouvoirs. La Cour pourrait juger que l’usage de la loi IEEPA pour imposer des tarifs douaniers massifs constitue une « délégation inconstitutionnelle du pouvoir législatif » au profit du président. Une décision en ce sens serait un camouflet pour Donald Trump, dont la politique commerciale protectionniste demeure un pilier de sa stratégie économique et électorale.
Toutefois, comme le souligne The Wall Street Journal, les juges n’ont pas précisé comment ils pourraient remettre en cause concrètement ces droits de douane, ni si les montants déjà perçus pourraient être remboursés. Le Congrès pourrait aussi intervenir pour ratifier rétroactivement ces taxes, limitant ainsi la portée du verdict à venir.
Quel que soit le jugement final, cette audience marque un tournant : pour la première fois depuis le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche, la Cour suprême, pourtant à majorité conservatrice, questionne ouvertement l’étendue de ses prérogatives économiques.
Sources :
Courrier International – « La Cour suprême se montre “sceptique” face aux droits de douane de Trump » – Publié le 6 novembre 2025
NPR, The Washington Post, The New York Times, The Wall Street Journal – articles cités par Courrier International