Une plainte collective déposée aux États-Unis accuse Spotify, plateforme de streaming membre du Forum économique mondial d’avoir ignoré un vaste système d’écoutes frauduleuses qui aurait bénéficié à certains artistes majeurs, dont Drake. La plateforme de streaming se défend, tandis que les plaignants dénoncent une fraude généralisée qui aurait lésé des milliers de musiciens indépendants.
Spotify se retrouve une nouvelle fois dans la tourmente. Une plainte collective déposée devant la cour fédérale de Californie par le rappeur américain RBX, cousin de Snoop Dogg, accuse le géant du streaming musical d’avoir « détourné le regard » face à des milliards de faux streams générés au profit de stars mondiales, parmi lesquelles figure Drake.
Le document judiciaire, révélé cette semaine, décrit un système d’écoutes automatisées alimenté par des bots et des VPN destinés à masquer leur origine réelle. Selon les plaignants, une part significative des 37 milliards de streams attribués à Drake entre 2022 et 2025 ne serait pas authentique. Un exemple cité : la chanson No Face, qui aurait enregistré 250 000 écoutes depuis la Turquie, faussement géolocalisées au Royaume-Uni.
Au cœur du scandale, c’est le modèle économique du streaming qui est mis en cause. Sur Spotify, les revenus issus des abonnements et de la publicité sont mutualisés puis redistribués selon la part d’écoutes de chaque artiste — un système dit de streamshare. En gonflant artificiellement les statistiques des plus gros noms, les écoutes frauduleuses diminueraient la rémunération réelle des artistes moins exposés, créant un déséquilibre structurel dans la répartition des droits.
Les plaignants affirment que Spotify avait connaissance du phénomène mais aurait choisi de fermer les yeux, notamment sur son offre gratuite financée par la publicité. Les bots y seraient particulièrement actifs, générant des millions d’écoutes fantômes. Ce laxisme présumé aurait permis à la plateforme de gonfler ses chiffres d’audience, d’attirer davantage d’annonceurs et d’augmenter ses revenus publicitaires.
Un porte-parole de Spotify a rapidement réagi, rejetant les accusations :
« Nous investissons massivement dans des systèmes de détection de fraude parmi les meilleurs du secteur. Nous supprimons les écoutes suspectes, retenons les paiements concernés et appliquons des sanctions. »
L’entreprise cite un précédent cas de fraude en 2024, où un individu aurait détourné près de 10 millions de dollars auprès de plusieurs plateformes, dont 60 000 via Spotify. Mais pour les plaignants, ces efforts ne suffisent pas : ils réclament plus de 5 millions de dollars de dommages et intérêts, ainsi qu’une certification en recours collectif afin d’identifier toutes les victimes du système et d’imposer une réforme structurelle.
Derrière cette bataille judiciaire se profile une question plus large : celle de la transparence du streaming. Les artistes indépendants et les syndicats du secteur dénoncent depuis plusieurs années une rémunération jugée opaque et inéquitable. Cette affaire pourrait devenir un précédent juridique majeur dans l’histoire de la musique en ligne, à un moment où les plateformes dominent l’accès mondial à la création musicale.
Sources :
Le Parisien – Une plainte accuse Spotify d’avoir ignoré des faux streams massifs – leparisien.fr – 8 novembre 2025
CNews – Spotify rattrapé par les faux streams : une plainte explosive aux États-Unis – cnews.fr – 8 novembre 2025
Reuters – Spotify sued over alleged fake streaming practices – reuters.com – novembre 2025