Sous pression depuis une motion de défiance votée par la rédaction en juillet, le directeur général de 20 Minutes et président de 20 Minutes TV, Ronan Dubois, quittera ses fonctions d’ici à la fin de l’année. Ce départ met un terme à deux années de réformes controversées et de vives tensions sociales au sein du média gratuit.
C’est la fin d’une ère mouvementée pour 20 Minutes. Ronan Dubois, directeur général du média gratuit depuis février 2023, a annoncé son départ avant la fin de l’année, ont confirmé mardi 4 novembre les actionnaires, le groupe belge Rossel et le français SIPA Ouest-France. À 45 ans, celui qui devait mener la transformation numérique du journal laisse derrière lui une rédaction épuisée par deux ans de réorganisations, de suppressions de postes et de conflits sociaux.
En juillet, 82,5 % des journalistes avaient voté une motion de défiance contre lui, dénonçant « la brutalité systématique de la direction envers ses salariés » et « la destruction minutieuse de leurs acquis sociaux ». Parmi les griefs : le gel des embauches, le non-remplacement des arrêts maladie et une charge de travail jugée insoutenable. Les syndicats SNJ-CGT et SNME-CFDT parlaient alors d’une rédaction « à bout de souffle ».
Arrivé avec la mission de redresser un média déficitaire depuis la pandémie de Covid-19, Ronan Dubois avait entrepris une refonte radicale du modèle économique : suppression de la version papier en 2024, plan social de 56 postes supprimés et recentrage sur le numérique et la vidéo, avec l’intégration du studio 20 Minutes TV dans les locaux parisiens. Une stratégie saluée par les actionnaires, qui affirmaient en juillet maintenir leur « pleine confiance » dans son plan de redressement « vital pour l’équilibre économique en 2025 ».
Mais sur le terrain social, les tensions n’ont cessé de croître. La direction refusait d’appliquer l’accord national sur la répartition des droits voisins, proposant entre 250 et 660 euros par an aux journalistes, loin des 18 % des revenus prévus par la Commission des droits d’auteur en 2024. « Cela aurait représenté 2 000 à 3 000 euros par an, soit un mois de salaire », rappelle Hakima Bounemoura, déléguée CFDT, qui évoque un « dialogue social rompu ».
La situation s’est encore dégradée au printemps, après une altercation lors d’une réunion de négociation, au cours de laquelle M. Dubois aurait tenu des propos jugés « humiliants » envers une déléguée syndicale transgenre. Une enquête interne du cabinet Plein Sens a conclu à « l’absence de caractère transphobe avéré », mais l’inspection du travail a ouvert sa propre investigation, toujours en cours.
Le départ du dirigeant, qui n’a pas souhaité s’exprimer, intervient donc dans un climat délétère. L’intérim sera assuré par Sabina Gros, directrice des opérations de Rossel Advertising, ainsi que par le comité de direction. Les actionnaires assurent vouloir « restaurer un dialogue social apaisé » et poursuivre la mutation du média.
Pour la rédaction, cette transition représente un espoir de tourner la page. Après avoir été pionnier du gratuit à sa création en 2002, 20 Minutes cherche désormais un second souffle dans un paysage médiatique en recomposition, où la viabilité économique repose sur l’innovation éditoriale et la confiance du public.
Sources :
– Le Monde – « 20 Minutes » : le directeur général quitte le média gratuit après plusieurs mois de tensions – lemonde.fr
– AFP – Ronan Dubois quitte la direction de 20 Minutes après une motion de défiance – afp.com
