Faut-il réécrire l’inscription historique du Panthéon pour y inclure explicitement les femmes ? La ministre de l’Éducation nationale, Élisabeth Borne, ouvre la discussion à quelques jours de la rentrée. Un débat à la croisée de la mémoire, du féminisme et de l’identité républicaine.
C’est une phrase gravée dans la pierre depuis 1885 : « Aux grands hommes, la patrie reconnaissante ». Un hommage solennel aux figures illustres de l’histoire de France, sanctifiées au Panthéon. Mais ce mercredi 27 aout, Élisabeth Borne a proposé de revisiter cette formule, la jugeant inadaptée à l’époque contemporaine. Devant la presse, la ministre de l’Éducation nationale a déclaré qu’« il faut ouvrir le débat » pour que l’inscription du Panthéon reflète mieux la place des femmes dans l’histoire nationale.
Ce symbole, a‑t‑elle expliqué, pèse sur la représentation des jeunes filles. « Elles ne voient pas la société reconnaître pleinement la place des femmes », a‑t‑elle insisté, appelant à « rendre justice à Marie Curie, Geneviève de Gaulle-Anthonioz, Germaine Tillion, Simone Veil, Joséphine Baker, et toutes celles qui les suivront ».
Depuis la Révolution française, le Panthéon a vu sa vocation et sa symbolique évoluer. D’abord église dédiée à sainte Geneviève, destinée à abriter les reliques de la sainte transformé en temple républicain en 1791, il a connu plusieurs réappropriations, entre influences monarchistes, laïques ou révolutionnaires. La devise actuelle ne s’est véritablement imposée qu’à partir de 1885, à l’occasion des funérailles nationales de Victor Hugo.
Ce n’est qu’un siècle plus tard, en 1995, que la physicienne Marie Curie devient la première femme inhumée au Panthéon pour ses propres mérites. Suivront Geneviève de Gaulle-Anthonioz, Germaine Tillion, Simone Veil, et plus récemment Joséphine Baker, entrée en 2021. Des trajectoires féminines majeures, encore trop peu visibles selon Élisabeth Borne, qui inscrit cette proposition dans une ambition éducative plus large : promotion des filières scientifiques auprès des filles, lutte contre les stéréotypes professionnels, et ouverture de nouvelles classes à dominante maths et sciences dès la rentrée 2025.
Mais cette initiative ne fait pas l’unanimité. À droite, les réactions ont été immédiates. Le député RN Laurent Jacobelli a qualifié la proposition d’« ânerie » sur RMC. Fustigeant un supposé « wokisme », il a dénoncé une déconnexion des priorités : « Elle n’a que ça à faire ? Au moment où le niveau des élèves décroît… Elle n’a que ça à faire, que du wokisme ? »
Le débat autour du Panthéon n’est pas nouveau. Déjà en 2015, une pétition portée par plusieurs historiennes demandait une féminisation plus large du sanctuaire national. En 2023, un débat similaire avait émergé autour de la possibilité d’y inscrire Gisèle Halimi.
Sources :
Le Parisien – « Élisabeth Borne veut ouvrir le débat pour changer la devise du Panthéon » – 28 août 2025