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La corvette Boikiy. Photo : @Radziun/wikipedia

Manche : une corvette russe armée a escorté deux pétroliers sanctionnés au large des côtes françaises

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Le navire de guerre russe Boikiy, armé de missiles guidés, a traversé la Manche le 21 juin sans se faire identifier, escortant deux pétroliers de la « flotte fantôme » sous sanctions européennes. Une manœuvre qui interroge sur les capacités de détection occidentales.

La corvette russe Boikiy, de classe Steregouchtchi, a traversé la Manche samedi 21 juin sans être repérée par les systèmes de surveillance traditionnels. Selon une enquête de la BBC, ce navire de guerre équipé de missiles guidés, de canons et de mitrailleuses aurait utilisé un faux numéro d’identification AIS (Automatic Identification System), affichant un identifiant générique « 400000000 » pour masquer son passage.

Parti de Conakry, en Guinée, plus tôt en juin, le Boikiy aurait contourné les radars en se faisant passer pour un autre navire, tout en escortant deux pétroliers soupçonnés d’appartenir à la « flotte fantôme » russe — ces navires opérant dans l’opacité pour contourner les sanctions internationales. Les deux tankers concernés, le Selva (également nommé Nostos ou Naxos), sous pavillon des Palaos, et la Sierra (Suvorovskiy Prospekt), sous pavillon du Malawi, sont tous deux visés par des sanctions européennes et britanniques.

Une opération pour dissuader toute tentative d’interception

Selon Dmitry Gorenburg, chercheur au Centre d’analyses navales, cette opération avait un objectif clair : dissuader le Royaume-Uni et les États de l’OTAN de saisir les pétroliers. « La présence d’une escorte militaire accroît le risque de confrontation et d’escalade supplémentaire », a-t-il indiqué à la BBC.

L’escorte militaire en zone stratégique marque un tournant : elle illustre la volonté de Moscou d’assurer la circulation de ses navires, même sous sanctions, au moyen d’une protection navale offensive, au mépris des règles de navigation internationales.

Détection tardive par les services britanniques

Malgré la discrétion de l’opération, la Royal Navy aurait pris le relais du suivi une fois le convoi détecté dans la Manche. Les autorités britanniques ont ensuite suivi la progression du Boikiy jusqu’en mer Baltique, des webcams publiques ayant même filmé la corvette russe passant sous le pont du Grand Belt, au Danemark.

Cette identification tardive, confirmée par des données satellites et des vidéos, soulève des questions sur la sécurité maritime en Europe occidentale, notamment dans des zones à haute densité comme le détroit du Pas-de-Calais.

Une méthode de camouflage jugée « inhabituelle »

Selon l’analyste naval belge Frederik Van Lokeren, l’usage d’un faux signal AIS est « très rare » pour la marine russe. « Normalement, s’ils veulent rester discrets, ils désactivent simplement leur AIS. Là, ils ont choisi de se faire passer pour un autre navire, ce qui est inhabituel », souligne-t-il.

Cette tactique pourrait indiquer une volonté de tester les limites des capacités de renseignement occidentales ou de normaliser des pratiques de contournement en contexte de guerre hybride.

Vers une militarisation accrue des routes maritimes russes ?

L’incident survient alors que Moscou développe de plus en plus une doctrine de sécurisation offensive de ses flux énergétiques. Le recours à des escorteurs armés pour accompagner des navires sous sanctions pourrait devenir un précédent.

Il marque aussi une nouvelle étape dans la guerre invisible que se livrent la Russie et l’OTAN en mer, bien au-delà du théâtre ukrainien.

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