La polémique autour de la fraude aux eaux minérales prend un nouveau tournant avec les récentes déclarations d’Aurélien Rousseau sur France Inter. L’ancien ministre de la santé, mis en cause dans la gestion d’un dossier sensible lié à la qualité de certaines eaux embouteillées, reconnaît aujourd’hui une « erreur d’appréciation », sans pour autant valider l’existence d’un scandale sanitaire.
Interrogé ce lundi 20 mai sur son rôle dans la gestion de cette affaire, Aurélien Rousseau a admis avoir sous-estimé la gravité de certains éléments lorsqu’il était en poste au ministère de la Santé. « Quand on fait le retour en arrière et quand on voit la situation aujourd’hui, il vaut mieux être clair et admettre, oui, une erreur d’appréciation », a-t-il déclaré sur les ondes de France Inter. Cette réaction intervient dans un contexte où la confiance du public envers la transparence sanitaire est de nouveau mise à l’épreuve, alors que plusieurs marques d’eaux minérales sont soupçonnées d’avoir dissimulé l’usage de traitements non conformes.
Une affaire sensible depuis des mois
L’affaire remonte à plusieurs mois, lorsque des révélations de presse ont mis au jour des pratiques douteuses d’industriels du secteur de l’eau minérale en France. Certaines marques auraient continué à commercialiser des eaux prétendument « pures » tout en ayant recours à des méthodes de traitement interdites dans le cadre de la législation sur les eaux dites « d’origine naturelle ». Cette dissimulation aurait bénéficié d’une forme de passivité de la part des autorités. C’est dans ce contexte qu’Aurélien Rousseau, ministre de la Santé jusqu’à fin 2023, s’était retrouvé interpellé sur la gestion du dossier par son ministère.
Selon plusieurs sources proches du dossier, certaines alertes internes avaient pourtant été transmises aux autorités sanitaires. Mais les réponses seraient restées limitées ou tardives, notamment concernant la coordination entre l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses), la Direction générale de la santé et les préfectures concernées. Interrogé sur ces lenteurs, Rousseau défend une forme de prudence, mais reconnaît aujourd’hui ne pas avoir « mesuré assez tôt la portée de certains faits ».
Pas de « scandale sanitaire » selon Rousseau
Si l’ancien ministre concède une lecture incomplète de la situation, il rejette toutefois fermement l’idée selon laquelle des consommateurs auraient été mis en danger. « Il n’y a pas eu de pollution de l’eau mise en bouteille », insiste-t-il, en rappelant que la qualité microbiologique des produits n’était pas altérée au point de constituer un risque avéré pour la santé. Sa position, bien que nuancée, vise à détourner le qualificatif de « scandale sanitaire » que plusieurs observateurs ont pu employer ces dernières semaines.
Toujours est-il que a question de la loyauté de l’information fournie au public reste centrale. Car au cœur de la fraude, c’est bien l’image d’authenticité des eaux minérales, censées être sans traitement, qui a été écornée. Rousseau admet un défaut de « communication » et regrette que « les obligations de transparence n’aient pas été toujours respectées », un constat qu’il partage désormais avec d’autres membres de l’exécutif.
Une gestion politique sous pression
Alors que le gouvernement tente d’apaiser les tensions, ce retour d’Aurélien Rousseau sur la scène médiatique intervient à un moment où les responsabilités politiques et réglementaires sont de plus en plus scrutées. Son successeur au ministère de la Santé, Catherine Vautrin, a promis des « vérifications complémentaires » et une meilleure traçabilité de l’origine et des traitements appliqués aux différentes eaux en bouteille, dans un marché où la confiance des consommateurs est une valeur capitale.
Les investigations menées par la DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes) devraient également livrer dans les prochains mois des conclusions plus précises sur l’ampleur des pratiques mises en cause. En attendant, la réaction de l’ancien ministre illustre une volonté de désamorcer les critiques sans pour autant endosser une pleine responsabilité politique, dans une séquence particulièrement sensible.
En reconnaissant une erreur sans céder à l’idée d’un scandale, Aurélien Rousseau cherche un équilibre délicat entre lucidité et défense de son action passée. Une position qui traduit aussi les zones grises d’une gestion politique mêlant souvent intérêts publics et privés.