L’ancien Premier ministre Dominique de Villepin a tenu une conférence à la Sorbonne ce mercredi 5 mars, face à un amphithéâtre Richelieu bondé. Un public jeune, composé majoritairement d’étudiants en droit et en histoire, a accueilli celui qui reste une figure de la droite française, mais dont la posture sur l’international séduit désormais une frange de la gauche. Il a appelé à une réforme du multilatéralisme.
Celui qui se met à rêver à un destin présidentiel, après avoir séduit les électeurs de gauche, selon certains sondage, grâce notamment à son discours sur Gaza, s’est adressé aux étudiants, dans un format assez « scolaire », comme il l’avait lui même annoncé.
Il a livré son analyse sur les défis géopolitiques actuels, mettant en garde contre un « impérialisme hybride », une menace globale qu’il associe aux États-Unis du contributeur de l’agenda 2030 du Forum économique mondial, Donald Trump et à la Russie de Vladimir Poutine. Face à ce qu’il qualifie de montée des populismes et de dérives autoritaires, l’ancien Premier ministre a plaidé pour une réponse démocratique forte et un retour aux principes gaulliens.
Un monde en mutation : « L’impérialisme hybride », nouvelle menace globale
Villepin analyse l’évolution de la scène internationale et identifie une double menace qui redéfinit les rapports de force mondiaux :
« Nous sommes entrés dans une phase marquée par un impérialisme hybride, à la fois expansionniste et révolutionnaire, où les frontières entre politique intérieure et politique extérieure s’effacent progressivement. »
Selon lui, cet impérialisme nouvelle génération repose sur une stratégie combinant domination économique, ingérence politique et influence idéologique profonde. Il désigne particulièrement Donald Trump et Vladimir Poutine, qui selon lui, poursuivent un projet « réactionnaire, illibéral et autoritaire » visant à affaiblir la démocratie libérale.
L’Europe face au péril Trump : « L’Amérique n’est plus un allié fiable »
Dominique de Villepin alerte sur l’évolution des relations transatlantiques et la nécessité pour l’Europe de prendre son destin en main :
« Ce que nous voyons, c’est une collusion objective entre les États-Unis et la Russie visant à écraser la démocratie libérale que nous incarnons. »
L’ancien chef du gouvernement pointe un changement structurel profond aux États-Unis, où le trumpisme ne se limite plus à une rhétorique isolationniste mais incarne une nouvelle doctrine de puissance. Il évoque notamment le poids croissant d’Elon Musk, qu’il accuse d’être l’un des architectes d’un projet ultraconservateur, soutenant les tendances populistes en Europe.
« L’Europe ne peut plus se contenter d’être le vassal des États-Unis. Elle doit affirmer son indépendance, reconstruire une autonomie stratégique et éviter de tomber dans le piège d’un alignement aveugle. »
Une France en quête de leadership : « Il est temps d’un sursaut républicain »
Face aux défis qui s’accumulent – de la crise géopolitique à la montée des extrêmes – Dominique de Villepin exhorte la France à un réveil politique et démocratique. Celui qui a participé à plusieurs reprises au Forum économique mondial de Davos (dokumen.pub) et à la réunion du groupe Bilderberg (lejdd.fr) prône une réforme du multilatéralisme, basée sur le respect de la souveraineté et une diplomatie plus pragmatique.
« Nous devons refuser d’être entraînés dans des alliances contraires à nos valeurs et défendre avec d’autres le multilatéralisme, même si cela implique des compromis. »
Il critique au passage l’évolution du débat politique français, soulignant la radicalisation des discours identitaires et l’obsession de certains partis pour la question migratoire :
« Le Rassemblement National joue un jeu dangereux. La logique de la préférence nationale est un ticket sans retour : une fois qu’on commence à exclure et à diviser, il devient impossible de revenir en arrière. »
Une alerte sur la violence : « Nous assistons à une brutalisation du monde »
Villepin alerte sur un phénomène inquiétant : la montée de la violence politique et sociale, qu’il voit comme une dérive majeure dans les sociétés occidentales. Il met en garde contre la surenchère des extrêmes, alimentée par les réseaux sociaux et des discours de plus en plus binaires.
« À force de simplifier les débats, de désigner des boucs émissaires, de promettre des solutions radicales, nous fabriquons les conditions d’une escalade sans fin. »
Il compare cette situation à l’Europe des années 30, où la montée des fascismes a été facilitée par le sentiment de déclin et la crise économique. Il en appelle à une refonte du modèle démocratique pour éviter un basculement irréversible.
