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Andrej Babis. Photo : @Vox Espana.

Tchéquie : le retour remarqué d’Andrej Babiš sur la scène politique

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Quatre ans après avoir quitté le pouvoir, le milliardaire populiste Andrej Babis s’apprête à redevenir Premier ministre de Tchéquie. Son mouvement ANO a remporté ce samedi 4 octobre, les législatives avec près de 35 % des voix, loin devant la coalition pro-européenne sortante. Une victoire qui consacre son retour politique, mais soulève de fortes inquiétudes en Europe.

Le retour d’Andrej Babis au sommet de la politique tchèque n’aura pas tardé. Trois ans après sa défaite à la présidentielle de 2023 et quatre ans après la fin de son premier mandat à la tête du gouvernement, le chef du mouvement ANO (“Action des citoyens mécontents”) signe un retour triomphal. Avec 34,5 % des voix et 80 siègesà la Chambre des députés (sur 200), il s’impose largement devant la coalition pro-européenne sortante (23 %), selon les résultats officiels publiés samedi 4 octobre.

Dans un scrutin marqué par une participation record de 68,9 %, la plus élevée depuis 1998, le milliardaire âgé de 71 ans a célébré sa victoire dans une ambiance euphorique. “Heureux comme un petit enfant”, selon la radio publique iRozhlas, il a salué une “ victoire historique du peuple tchèque contre les élites de Bruxelles ”, tout en assurant qu’il gouvernerait “ pour tous les Tchèques ”.

Un populisme pragmatique

Si son parti ANO s’affiche comme centriste, il reste perçu comme un mouvement populiste à dominante personnelle, façonné à l’image de son fondateur. Ancien magnat de l’agroalimentaire et des médias, Andrej Babis contrôle encore une partie de son empire économique, Agrofert, placé sous fiducie depuis son entrée en politique.

Souvent comparé à Viktor Orbán ou Donald Trump, le leader d’ANO a cependant tenu à rassurer Bruxelles : “ Je ne suis pas Orban ”, a-t-il déclaré pendant la campagne. “ La République tchèque doit rester dans l’Union européenne et dans l’Otan, car c’est dans notre intérêt national. ”

Le quotidien DNES – autrefois propriété du groupe Agrofert – décrit un homme “ plus pragmatique qu’idéologue ”, préférant “ négocier avec Bruxelles plutôt que d’entrer en confrontation directe ”. Même tonalité chez Lidovky.cz, qui voit dans cette victoire “ le grand retour d’Andrej ”, un politicien “ blessé par son échec à la présidentielle ” mais “ revanchard et stratège ”.

Une coalition encore incertaine

Reste à savoir avec qui Andrej Babis gouvernera. Le parti d’extrême droite SPD (Liberté et Démocratie directe), arrivé troisième avec 7,8 % des voix, a entamé des discussions de coalition dès samedi soir. Mais ses résultats inférieurs aux attentes limitent son poids politique.

Le milliardaire pourrait aussi s’appuyer sur le Parti des automobilistes (6,7 %), formation eurosceptique récemment créée, qui fait son entrée au Parlement avec 14 députés. Cette configuration laisse entrevoir la formation d’un gouvernement minoritaire, soutenu par des partenaires nationalistes sans alliance officielle.

À gauche, la coalition Stacilo ! (“Ça suffit !”), qui incluait les communistes, n’a pas franchi le seuil électoral de 5 %, confirmant leur marginalisation historique.

Entre inquiétudes et résignation à Bruxelles

Si le retour d’Andrej Babis est accueilli avec prudence dans les capitales européennes, plusieurs observateurs notent qu’il ne devrait pas bouleverser la ligne diplomatique pro-ukrainienne de la Tchéquie. “ Il n’a aucun intérêt à s’isoler ”, estime un diplomate européen cité par Politico Europe. “ Mais il va chercher à défendre une politique économique plus souverainiste, notamment sur l’énergie et l’agriculture. ”

Tous ne partagent pas cette lecture. Le site Forum 24 dénonce un “ recul démocratique majeur ”, rappelant que Babis est toujours visé par des accusations de fraude aux subventions européennes et de conflits d’intérêts. “ Les Tchèques se sont ridiculisés devant l’Europe en réélisant un homme d’affaires compromis avec l’ancien régime communiste ”, écrit le média d’opinion.

Pour l’hebdomadaire Respekt, le scrutin reflète avant tout l’usure de la coalition sortante, confrontée à la guerre en Ukraine, à la crise énergétique et à une inflation record : “ Les électeurs ont choisi la stabilité économique, quitte à fermer les yeux sur les scandales. ”

Une Europe qui observe

À Bruxelles, on s’interroge sur le “ visage ” qu’adoptera Andrej Babis dans les prochaines semaines : celui du gestionnaire pragmatique ou celui du populiste frondeur. Dans tous les cas, son retour marque un tournant dans la politique centre-européenne, où les forces souverainistes consolident à nouveau leur influence.

Sources :
Courrier International – Le grand retour d’Andrej Babis – lien – 05/10/2025
Lidovky.cz – Velký návrat Andreje Babise – lien – 05/10/2025
DNES – Babis n’est pas Orban – lien – 05/10/2025
Forum 24 – Les Tchèques se ridiculisent devant l’Europe – lien – 05/10/2025
Respekt – Résultats des élections : bienvenue dans le rêve de Babis – lien – 05/10/2025

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