Le ministre de la Justice, Gérald Darmanin, s’est rendu en Italie pour étudier le régime pénitentiaire « carcere duro », appliqué aux mafieux, afin de l’adapter aux narcotrafiquants français.
En visite à la prison de Rebbibia, à Rome, ce lundi 3 février, Gérald Darmanin a observé de près le fonctionnement du régime 41 bis, un dispositif carcéral extrêmement strict réservé aux criminels liés à la mafia italienne. Ce régime vise à isoler les détenus les plus dangereux pour empêcher toute communication avec l’extérieur et éviter qu’ils continuent à diriger leurs réseaux criminels depuis leur cellule.
Le ministre souhaite s’inspirer de ce modèle pour regrouper les 100 plus gros narcotrafiquants français dans un établissement de haute sécurité d’ici juillet 2025. Il s’agit, selon lui, d’une mesure essentielle pour briser l’emprise des trafiquants sur les réseaux de drogue depuis les prisons.
Un régime d’isolement particulièrement strict
Le carcere duro repose sur des restrictions sévères :
- Isolement total en cellule individuelle, avec seulement deux heures de sortie par jour, en présence de trois autres détenus soigneusement sélectionnés.
- Visites limitées : un seul entretien mensuel avec la famille, à travers une paroi vitrée, et une conversation téléphonique de 10 minutes pour ceux ne recevant pas de visite.
- Surveillance extrême : chaque échange est enregistré, et les objets personnels sont soumis à une réglementation stricte, y compris la taille des photos autorisées.
- Personnel pénitentiaire tournant : les gardiens affectés à ces détenus sont régulièrement mutés pour éviter tout risque de connivence.
Ce dispositif vise à empêcher toute communication avec l’extérieur et toute possibilité d’organisation criminelle depuis la prison, un problème souvent pointé du doigt en France, notamment avec les téléphones portables clandestins et la circulation d’ordres entre détenus et complices extérieurs.
Une mesure controversée
Si l’objectif de neutraliser l’influence des criminels incarcérés semble faire consensus, le régime carcéral 41 bis est sujet à débat en Italie. Des associations de défense des droits de l’homme dénoncent des conditions de détention inhumaines, notamment l’ONG italienne Antigone, qui critique des restrictions « visant davantage à harceler qu’à garantir la sécurité ».
Certains prisonniers soumis à ce régime, comme l’anarchiste Alfredo Cospito, ont dénoncé des traitements qu’ils qualifient de « médiévaux », allant jusqu’à entamer des grèves de la faim pour protester contre ces conditions extrêmes. Néanmoins, le gouvernement de Giorgia Meloni n’a pas cédé aux pressions et a maintenu ce système en place.
Vers une adaptation du modèle en France ?
L’application de ce modèle en France nécessiterait des changements législatifs et des aménagements spécifiques dans les établissements pénitentiaires. La mise en place d’un quartier de haute sécurité dédié aux narcotrafiquants est présenter comme un tournant dans la lutte contre le trafic de drogue, en empêchant les criminels d’orchestrer leurs opérations depuis leur cellule.
Le ministre de la Justice espère ainsi dissuader les criminels de poursuivre leurs activités et, à terme, favoriser la collaboration avec la justice en échange d’un allègement des conditions de détention.
Les conclusions de Darmanin
«Comme en Italie, on le fait pour les personnes les plus dangereuses pour l’extérieur», a déclaré Darmanin sur Cnews après sa visite.
« Il faudrait au moins cinq prisons de haute sécurité pour mettre à l’isolement total les plus gros narcotraficants de France», estime le ministre de la Justice.
L’initiative suscite toutefois des réactions contrastées : faut-il privilégier la sécurité au détriment des droits des détenus ? Le débat est ouvert.
Sources : Huff Post et Cnews