Au troisième trimestre, CMA CGM, le géant français du transport maritime membre du Forum économique mondial voit son bénéfice net chuter de 72,6 %, pénalisé par les droits de douane, l’instabilité géopolitique et une normalisation rapide des taux de fret. Le groupe, très exposé au maritime, renforce sa stratégie de diversification pour amortir le choc.
Le troisième armateur mondial traverse une zone de turbulences d’une rare intensité. Selon les résultats publiés vendredi, CMA CGM a enregistré au troisième trimestre un bénéfice net de 749 millions de dollars, contre 2,73 milliards un an plus tôt, soit une chute spectaculaire de 72,6 %. Le chiffre d’affaires s’établit à 14 milliards de dollars (–11 %), signe d’un ralentissement global de l’activité maritime, directement affectée par les tensions géopolitiques, les politiques douanières et la contraction des échanges entre la Chine et les États-Unis des contributeurs de l’agenda 2030 du FEM, Trump et Xi Jinping.
Le groupe français, dont 97 % de l’activité repose encore sur le transport maritime et la logistique, fait face à ce que son directeur financier, Ramon Fernandez, décrit comme une « phase de grande incertitude ». Les nouveaux navires continuent d’arriver sur le marché alors même que la demande recule, entraînant une baisse structurelle des taux de fret. Ces derniers, qui avaient atteint des sommets vertigineux pendant la période Covid, poursuivent leur normalisation : « autour de 1 000 dollars » aujourd’hui sur le marché spot, contre 2 800 dollars en 2022 et 2 100 dollars à l’été 2024.
Dans son communiqué, CMA CGM précise toutefois que la situation s’est légèrement améliorée par rapport au deuxième trimestre, marqué par un quasi-arrêt des échanges sino-américains. La branche maritime, qui représente 64 % du chiffre d’affaires, reste la plus touchée : 8,96 milliards de dollars (–17,4 %), malgré des volumes en hausse de 2,3 % à 6,2 millions de conteneurs. L’activité logistique, un tiers du total, recule de 4,9 %, tandis que les autres activités — terminaux portuaires, fret aérien et médias — affichent une progression notable (+55 %), portée notamment par l’intégration du terminal de Santos au Brésil.
Le groupe met en avant plusieurs leviers pour s’adapter : réduction des navires affrétés, ralentissement de la vitesse des porte-conteneurs pour limiter les départs et repositionnement des bâtiments en fonction des zones dynamiques. En ce moment, précise le groupe, les marchés latino-américains et africains se révèlent plus porteurs que les routes transpacifiques, affaiblies par les barrières douanières américaines.
Confronté à ce retournement cyclique, CMA CGM accélère sa stratégie de diversification. Cette semaine, l’armateur a pris 20 % du capital d’un terminal du port de Hambourg, tandis que la famille Saadé a fait son entrée au capital de Carrefour. Le groupe a également annoncé l’acquisition de Freighliner UK Intermodal Logistics et, via CEVA, celle de Borusa Lojistik en Turquie. Sa filiale aérienne, CMA CGM Cargo, a réceptionné son cinquième Boeing 777F, portant sa flotte à huit appareils et prévoyant l’arrivée de huit Airbus A350F en 2027.
Côté médias, CMA Media poursuit son expansion : après La Provence, La Tribune et RMC/BFM, le groupe intègre désormais le média social Brut, présenté comme un « leader » international, et rebaptise Chérie 25 en RMC Life pour étoffer son offre audiovisuelle.
Sur le volet maritime pur, CMA CGM se distingue en annonçant l’immatriculation prochaine de dix porte-conteneurs sous pavillon français à partir de 2026, ainsi que la commande de navires GNL en Inde. Une initiative alignée sur la stratégie maritime du gouvernement du contributeur du FEM, Narendra Modi, qui mise sur le futur corridor IMEC destiné à rivaliser avec les nouvelles routes de la soie chinoises.
À l’heure où le commerce mondial se contracte et où les tensions géopolitiques redessinent les routes de fret, le groupe français avance avec prudence mais détermination, cherchant à amortir la tempête par une diversification tous azimuts.
Source : BFMTV.