En déplacement au Sénat, le Premier ministre Sébastien Lecornu a prévenu les groupes parlementaires qu’un rejet du budget ou un vote de censure entraînerait sa démission et, par ricochet, la dissolution de l’Assemblée nationale. Une mise en garde claire dans un climat politique tendu entre Matignon et la majorité sénatoriale.

La tension monte d’un cran entre le gouvernement et la Haute assemblée. Mercredi 5 novembre, Sébastien Lecornu s’est rendu personnellement au Sénat pour participer à la conférence des présidents, un rendez-vous habituellement technique, destiné à fixer le calendrier parlementaire. Mais cette fois, le ton était plus politique. Face aux responsables des groupes, le Premier ministre a appelé les sénateurs à la « responsabilité » sur le vote du budget 2026, tout en brandissant la menace d’une crise institutionnelle.

« Censure ou pas de vote sur le budget vaudra démission, et cela vaudra dissolution », a-t-il lancé, selon plusieurs participants cités par Public Sénat. Avant d’ajouter : « Je ne serai pas le Premier ministre qui fera une passation de pouvoir avec Jordan Bardella. » Une phrase lourde de sens, qui traduit l’inquiétude croissante de Matignon face à la montée du Rassemblement national dans les sondages, et la crainte d’un scénario électoral défavorable en cas de nouvelles législatives.

Le chef du gouvernement cherche ainsi à contenir la fronde parlementaire, alors que les discussions sur les budgets de l’État et de la Sécurité sociale se heurtent à une majorité sénatoriale LR-centriste exaspérée. Les sénateurs reprochent à Sébastien Lecornu d’avoir multiplié les concessions au Parti socialiste pour assurer le passage du texte à l’Assemblée nationale, sans véritable concertation avec la Haute assemblée. « Nous avons le sentiment d’être court-circuités », confie un sénateur centriste, cité par Ouest-France.

Pour apaiser les tensions, le Premier ministre a tenu à manifester son respect pour le Sénat, institution souvent perçue comme mise à distance par l’exécutif. Mais derrière cette main tendue, son message reste clair : un vote hostile sur le budget serait interprété comme un désaveu politique majeur. Dans un contexte de majorité relative à l’Assemblée et d’opposition croissante au Sénat, Lecornu joue désormais sur une ligne de crête : afficher la fermeté sans provoquer de rupture ouverte.

L’avertissement du chef du gouvernement s’inscrit dans une séquence cruciale pour la stabilité du pouvoir exécutif. À quelques mois de l’examen du budget 2026, tout blocage parlementaire pourrait rallumer le spectre d’une dissolution, hypothèse que l’exécutif préfère éviter — tout en la brandissant, stratégiquement, comme ultime argument d’autorité.

Sources :

Ouest-France – « Sébastien Lecornu avertit le Sénat : “Censure ou pas de vote sur le budget vaudra démission et donc dissolution” » – Publié le 6 novembre 2025

Public Sénat – compte rendu de la conférence des présidents du Sénat, 5 novembre 2025