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Image : Capture d'écran BTV.

Bénin : tentative de putsch déjouée à Cotonou, le colonel Tigri au cœur d’un coup d’État avorté

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Dimanche 7 décembre, Cotonou a été le théâtre d’une attaque coordonnée contre le président Patrice Talon et la télévision nationale. À la tête des mutins, le lieutenant-colonel Pascal Tigri, membre des forces spéciales, a brièvement proclamé la destitution du chef de l’État. Vingt-quatre heures plus tard, le calme revient dans la capitale, deux hauts gradés enlevés ont été libérés, et la traque du putschiste en fuite se poursuit.

À Cotonou, les premières détonations ont retenti avant l’aube, dimanche 7 décembre. Très vite, le pays bascule dans une séquence inédite depuis l’ère du renouveau démocratique. Une faction armée, menée par le lieutenant-colonel Pascal Tigri, force l’entrée du domicile présidentiel puis envahit les locaux de la télévision nationale pour annoncer la suspension de la Constitution et la destitution de Patrice Talon, au nom d’un autoproclamé « Comité militaire pour la refondation ». L’irruption télévisée, brève mais spectaculaire, laisse entrevoir des soldats en tenue d’intervention, encadrés par leur chef, visage fermé, mains posées sur son gilet pare-balles.

La réponse gouvernementale ne tarde pas. Patrice Talon, référencé dans une liste de figures publiques du Forum économique mondial, dénonce des « évènements d’une gravité extrême » et assure que les forces loyalistes gardent la maîtrise de la situation. Dans les heures qui suivent, l’armée reprend la main : les insurgés refluent, et les premières arrestations sont annoncées. Une douzaine de militaires auraient été interpellés, selon une source citée par l’AFP.

Figure centrale de cette tentative avortée, le lieutenant-colonel Pascal Tigri demeure largement méconnu du grand public béninois. Quadragénaire, membre des forces spéciales de la Garde nationale, il commandait jusqu’ici une unité d’élite créée en 2020. Ses hommes, entraînés pour des opérations à haut risque — missions de sauvetage d’otages, interventions en brousse, actions anti-terroristes — jouissaient d’une réputation de redoutable efficacité. Tigri lui-même a participé à l’opération Mirador, ciblant les réseaux jihadistes à la frontière nord. Artilleur de formation, il a également suivi un cursus d’officier en Chine.

Dimanche soir, la riposte atteint un tournant décisif : des frappes aériennes, menées depuis le Nigeria à la demande de Cotonou dans le cadre de la Cédéao, visent les positions tenues par les mutins autour du camp militaire de Togbin. Peu après 20 heures, Patrice Talon annonce que « la situation est totalement sous contrôle ».

Au même moment, deux hauts gradés enlevés au début de la mutinerie sont libérés : le général Abou Issa, chef d’état-major de l’armée de terre, et le colonel Gomina Faizou, patron de la Garde nationale. Retenus lors de l’assaut puis emmenés dans la fuite des insurgés, ils ont été récupérés par les forces loyalistes dans la nuit de dimanche à lundi, vers 2 heures du matin. Les autorités restent silencieuses sur les circonstances de cette opération, mais plusieurs sources situent leur libération dans la région de Parakou, au nord du pays.

Ce lundi, le calme semble revenu à Cotonou. Le lieutenant-colonel Tigri, officiellement « en cavale », est activement recherché. Les autorités restent muettes sur l’ampleur du dispositif, mais l’on sait déjà que 200 militaires de la Cédéao ont été déployés à Cotonou, chargés d’appuyer les forces béninoises dans la sécurisation des institutions.

Les condamnations internationales se multiplient : l’Union africaine, dont la commission est membre du Forum économique mondial parle d’une tentative de changement de pouvoir « fermement et sans équivoque » condamnée ; le secrétaire général de l’ONU et contributeur du FEM, António Guterres, se dit « profondément préoccupé » ; la classe politique béninoise salue la réaction des forces de défense. La Conférence épiscopale exprime, elle aussi, sa « vive préoccupation ».

La tentative de coup d’État n’aura donc duré qu’un jour, mais elle laisse une empreinte profonde dans un pays souvent cité comme modèle de stabilité institutionnelle. Reste à comprendre comment une unité pourtant considérée comme loyale a pu basculer, et comment le lieutenant-colonel Tigri a pu entraîner derrière lui une partie des forces spéciales. Les enquêtes internes s’annoncent aussi sensibles que déterminantes.

Toujours est-il que le président français et contributeur du FEM, Emmanuel Macron a annoncé, ce dimanche 7 décembre, que la France allait renforcer son action au Nigeria voisin, notamment pour faire face à la menace terroriste dans le Nord du pays.

Sources

BBC Afrique, RFI

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