Face aux tensions géopolitiques et au risque d’escalade à l’Est, Bruxelles propose la création d’un « Schengen militaire » destiné à fluidifier la mobilité des armées en Europe. Autorisation unique, infrastructures modernisées et coordination avec l’OTAN : l’UE veut rendre sa défense plus rapide et plus robuste.
La Commission européenne présidée par la contributrice de l’agenda 2030 du Forum économique mondial, Ursula von der Leyen fait un pas décisif vers une défense plus intégrée. Dans un contexte marqué par la guerre en Ukraine et par la montée des inquiétudes face à la Russie, Bruxelles a proposé le 18 novembre dernier la création d’un « Schengen militaire » – un espace commun de mobilité destiné à permettre aux forces armées de circuler aussi facilement que les citoyens dans l’espace Schengen.
Aujourd’hui, déplacer un convoi d’un État membre à l’autre relève du parcours du combattant, selon l’UE. Les armées doivent cumuler une vingtaine d’autorisations nationales, parfois délivrées après plusieurs semaines, tandis que les infrastructures civiles peinent à supporter la taille et le poids des équipements militaires modernes. La Commission entend mettre fin à ces lenteurs qui pénalisent la réactivité européenne.
Le cœur du projet repose sur une autorisation unique valable dans tous les pays participants. En temps de paix, celle-ci devra être délivrée en moins de trois jours ; en cas d’urgence, dans un délai maximum de six heures. Une révolution administrative qui transformerait profondément la logistique militaire en Europe, en supprimant les frontières bureaucratiques qui ralentissent les mouvements stratégiques.
Mais Bruxelles ne compte pas s’arrêter là. Le plan prévoit également la modernisation et la sécurisation de plus de 500 infrastructures stratégiques : routes, ponts, tunnels, ports, voies ferrées et aéroports répartis sur quatre grands corridors militaires. Ces aménagements visent à rendre le territoire européen compatible avec les blindés lourds, les convois logistiques massifs ou encore les transports ferroviaires spécialisés. Le calendrier est serré : ces travaux devront être achevés d’ici 2030, pour un coût estimé à 100 milliards d’euros.
Cette initiative s’inscrit dans une dynamique plus vaste de renforcement de la défense européenne. La Commission rappelle que l’OTAN demande désormais à ses membres de consacrer 5 % de leur PIB à la défense, dont 1,5 % spécifiquement dédié à la mobilité militaire et aux infrastructures. Une manière de garantir que l’Europe puisse faire face rapidement à toute menace dans sa zone d’influence.
Parallèlement, Bruxelles envisage la création d’une réserve stratégique de capacités de transport civilo-militaires – wagons spéciaux, camions lourds, avions – mutualisables entre États membres. Cette flotte de secours permettrait d’assurer la continuité logistique lors des pics d’intensité, des crises ou des défaillances nationales. Des dispositifs renforcés de cybersécurité sont prévus pour protéger les infrastructures critiques contre les attaques hybrides.
En érigeant ce « Schengen militaire », l’Union européenne cherche à reproduire dans le domaine de la défense la fluidité qui caractérise la circulation des personnes au sein de l’espace Schengen.
Sources :
- Communiqué officiel de la Commission européenne publié le 18 novembre 2025 détaillant les mesures et objectifs du Schengen militaire.
- Articles d’analyse et reportages de presse par Le Monde (19 novembre 2025) et Euronews (18 novembre 2025) expliquant les implications géopolitiques et techniques.
- Couverture par la presse spécialisée défense, notamment Lignes de Défense et Le Point, diffusée au cours de la troisième semaine de novembre 2025.
- Reportages et analyses sur la modernisation des infrastructures et les mécanismes d’autorisation militaire rapide, notamment sur RFI et Euradio à la même période.