Alors qu’Emmanuel Macron s’est dit « plutôt positif » à l’idée d’accepter l’accord de libre-échange entre l’Union européenne et le Mercosur, le principal syndicat agricole français, la FNSEA, fustige un « reniement total ». Le chef de l’État assure pourtant rester vigilant, affirmant défendre les intérêts de la France et du monde paysan.
Les propos d’Emmanuel Macron, prononcés jeudi 6 novembre à Belem, au Brésil, ont provoqué une onde de choc dans le monde agricole français. En marge du sommet des chefs d’État précédant la COP30, le président de la République s’est déclaré « plutôt positif » à l’idée d’accepter l’accord commercial entre l’Union européenne (UE) et le Mercosur, signé fin 2024 mais toujours en attente de ratification par les Vingt-Sept.
« Je reste vigilant, mais je défends aussi les intérêts de la France », a précisé le chef de l’État, soulignant que la Commission européenne avait « apporté des garanties » sur des clauses de sauvegarde permettant de protéger temporairement le marché européen en cas de préjudice pour les agriculteurs. Ces clauses viseraient notamment à renforcer les contrôles douaniers et à soutenir le secteur de l’élevage.
Mais ces assurances n’ont pas suffi à apaiser la colère du monde rural. Dès le lendemain, la FNSEA, par la voix de son président Arnaud Rousseau, a dénoncé sur X (ex-Twitter) « un reniement total » et « une rupture avec l’agriculture française ». « Cette déclaration, prononcée au cœur du territoire de nos concurrents agricoles, sonne comme un nouvel affront. Nous ne laisserons pas brader notre modèle, nos emplois ni notre souveraineté », a-t-il écrit, appelant les eurodéputés français à faire bloc pour s’opposer à la ratification du texte.
Les autres syndicats agricoles ont exprimé la même indignation. La Coordination rurale, présidée par Véronique Le Floc’h, a qualifié l’accord de « mort de l’agriculture », tandis que la Confédération paysanne a évoqué une « trahison ». Son porte-parole, Stéphane Galais, a rappelé que le président s’était engagé, « la main sur le cœur », à bloquer l’accord tant qu’il menacerait les producteurs français.
Même au sein du gouvernement, les réserves persistent. La ministre de l’agriculture Annie Genevard a admis que « le compte n’y est pas » malgré les avancées obtenues à Bruxelles. « Les lignes rouges de la France sont connues : respect des normes sanitaires et environnementales, équité commerciale et protection du revenu des agriculteurs », a-t-elle précisé.
L’accord de libre-échange entre l’UE et le Mercosur (Brésil, Argentine, Uruguay et Paraguay) prévoit de libéraliser les échanges entre les deux blocs : l’Europe exportera davantage de vins, machines et véhicules, tandis que l’Amérique du Sud bénéficiera d’un accès élargi au marché européen pour ses produits agricoles, notamment le bœuf, le sucre et la volaille.
Cette ouverture inquiète profondément les éleveurs français, qui dénoncent une concurrence déloyale avec des producteurs soumis à des normes sanitaires et environnementales beaucoup moins strictes. Pour eux, ce traité risque de fragiliser davantage un secteur déjà en crise, au moment même où l’Europe cherche à concilier transition écologique et souveraineté alimentaire.
Mercredi, la présidence brésilienne a annoncé que Luiz Inacio Lula da Silva et Ursula von der Leyen étaient prêts à signer l’accord le 20 décembre à Rio de Janeiro. Reste à savoir si la France acceptera de s’y associer, ou si elle choisira d’opposer son veto à un texte qui fracture jusque dans les rangs de la majorité présidentielle.
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