Le Sénat a adopté à l’unanimité, jeudi 6 novembre 2025, une proposition de loi élevant Alfred Dreyfus au grade de général de brigade à titre posthume. Ce texte avait déjà été voté à l’unanimité par l’Assemblée nationale en juin dernier.
« La Nation française élève, à titre posthume, Alfred Dreyfus au grade de général de brigade », énonce sobrement la loi portée par l’ancien Premier ministre Gabriel Attal et défendue au Sénat par le président du groupe socialiste, Patrick Kanner.
Présente au Palais du Luxembourg lors du vote, la ministre déléguée auprès de la ministre des Armées et des Anciens combattants, Alice Rufo, a salué « un geste symbolique, mais plus qu’un symbole ». Selon elle, il s’agit de « rendre à Dreyfus ce qui lui fut inaccessible de son vivant » et de « réparer une injustice vieille de plus d’un siècle ». La ministre a également évoqué « l’honneur bafoué » de l’officier, qualifié de « Français admirable ». Aucune voix ne s’est élevée contre le texte : « Il n’y a pas de vote contre et il n’y a pas d’abstention », a annoncé la présidente de séance, sous les applaudissements des sénateurs et en présence des descendants de Dreyfus.
Patrick Kanner a rappelé que cette loi constituait « un acte de réparation et de reconnaissance » envers un homme injustement condamné sur fond d’antisémitisme. Pour lui, ce vote permet à la République « de reconnaître son erreur, de reconnaître qu’un homme a été humilié ». Gabriel Attal, à l’origine de la proposition de loi, a salué sur le réseau X « un geste de réparation et de reconnaissance » affirmant que « la République n’oublie pas ».
Alfred Dreyfus, né à Mulhouse en 1859, avait été accusé d’avoir transmis des renseignements militaires à l’Allemagne, alors ennemie de la France. Le 22 décembre 1894, il fut condamné à la déportation à perpétuité et envoyé au bagne sur l’île du Diable, en Guyane. Après douze années d’un combat judiciaire et politique d’une ampleur inédite, il fut réhabilité par la Cour de cassation le 12 juillet 1906. Il fut ensuite réintégré dans l’armée avec le grade de chef d’escadron, mais n’obtient jamais de promotion au rang de général de brigade.
L’officier reprit même du service pendant la Première Guerre mondiale. Pour ses descendants, cette élévation posthume représente « la reconnaissance de la valeur du soldat qu’il était », mais aussi « un hommage nécessaire, bien que sans doute pas suffisant ». Anne-Cécile Lévy et Michel Dreyfus, arrière-petits-enfants du capitaine, ont renouvelé leur souhait de voir un jour leur ancêtre entrer au Panthéon.
Si le président Emmanuel Macron avait exprimé des réserves en juillet 2025 sur le principe d’une promotion militaire posthume décidée par le Parlement, il avait également rappelé que celui-ci demeurait « souverain ». Dans la foulée du vote, Patrick Kanner et Boris Vallaud ont écrit au chef de l’État pour lui demander d’engager une procédure de panthéonisation, au nom d’un « hommage complet à un homme de justice et de courage ».
Sources principales
- Le Figaro avec AFP, 6 novembre 2025
- Valeurs Actuelles, 7 novembre 2025
- Le Monde, 2 juin 2025
- Sénat.fr, dossier législatif n° 559
- France Info, 6 novembre 2025