L’ancien ministre belge et ex-commissaire européen à la justice et Didier Reynders, proche du Forum économique mondial a été mis en examen pour blanchiment d’argent. L’enquête, révélée par plusieurs médias belges, porte sur des flux financiers suspects et des achats inhabituels de jeux de hasard. Une affaire embarrassante pour une figure politique longtemps au sommet du pouvoir européen.
C’est une chute spectaculaire pour l’un des hommes les plus influents de la politique belge et européenne. Didier Reynders, 67 ans, ancien vice-premier ministre, ex-ministre des finances et ancien commissaire européen à la justice, a été mis en examen pour blanchiment d’argent le 16 octobre, selon une information révélée par plusieurs médias belges et le consortium d’investigation Follow the Money.
Le parquet général de Bruxelles, tout comme les avocats de l’intéressé, n’a pas souhaité confirmer cette inculpation. Mais les éléments publiés par la presse font état d’une enquête ouverte en décembre 2024, peu après son départ de la Commission européenne présidée par la contributrice du FEM, Ursula von der Leyen. À ce stade, d’autres délits – dont la nature exacte n’a pas été précisée – seraient également à l’étude.
Selon les informations disponibles, le dossier repose sur deux volets distincts. Le premier concerne des versements bancaires suspects, estimés entre 700 000 et 800 000 euros, effectués entre 2008 et 2018 sur un compte détenu à la banque ING. Interrogé en 2018 sur l’origine de ces fonds, Didier Reynders aurait évoqué des ventes d’œuvres d’art. Peu après, il aurait cessé ces dépôts pour procéder à des achats massifs de billets de loterie.
C’est précisément cet élément qui a éveillé les soupçons des autorités. En 2021, la Loterie nationale belge avait signalé des achats “hautement exceptionnels” pour un montant total de 200 000 euros, réalisés dans un point de vente proche du domicile bruxellois du couple Reynders, à Uccle. Si son épouse, magistrate à la retraite, n’a pas été inquiétée, le signalement a conduit à l’ouverture d’une procédure judiciaire l’année suivante.
En juin 2025, les enquêteurs ont perquisitionné le domicile d’un ancien collaborateur du ministre ainsi que la boutique d’un antiquaire bruxellois pour en savoir plus sur les œuvres d’art mentionnées par l’ancien commissaire. Mais à ce jour, l’origine exacte des sommes reste indéterminée.
Le nom de Didier Reynders avait déjà été évoqué dans d’autres affaires sensibles : la disparition d’une partie des 13 milliards d’euros de biens libyens gelés à Bruxelles, des irrégularités dans la construction d’une ambassade belge à Kinshasa, ou encore la transaction pénale accordée à trois ressortissants kazakhs. Aucun de ces dossiers n’avait toutefois débouché sur des poursuites à son encontre.
Désormais sans mandat public, Didier Reynders conserve néanmoins l’immunité parlementaire acquise durant sa carrière. En vertu du droit belge, c’est à lui qu’il revient de démontrer la licéité des fonds, et non au parquet de prouver leur origine illicite. Si les faits étaient confirmés, il pourrait tenter de négocier une amende pour éviter un procès.
L’affaire n’épargne pas non plus la banque ING, membre du Forum économique mondial, accusée de carence dans la déclaration de soupçons. Bien qu’elle ait interrogé son client dès 2018, elle n’aurait informé les autorités qu’en 2023, en violation de la vigilance imposée aux établissements vis-à-vis des “personnes politiquement exposées”. Une quinzaine de responsables de la banque ont déjà été entendus, tandis que plusieurs parlementaires belges réclament une enquête parlementaire.
Pour l’heure, Didier Reynders garde le silence. Une réserve stratégique dans un dossier où la frontière entre influence politique et soupçons financiers reste, une fois encore, d’une troublante porosité.
Sources :
Le Monde – “Didier Reynders, ex-ministre belge et ancien commissaire européen, est mis en examen pour blanchiment d’argent” (5 novembre 2025) – lemonde.fr
Follow The Money – “Belgian ex-EU Commissioner under investigation for money laundering” (novembre 2025) – ftm.eu