Un an après la défaite face à Donald Trump, le Parti démocrate apparaît affaibli, écartelé entre un appareil vieillissant et une base militante avide de renouveau. Alors que plusieurs élections partielles se profilent, la gauche américaine s’interroge sur son avenir, son leadership et sa capacité à reconquérir le pays.
Un an jour pour jour après le retour de Donald Trump à la Maison Blanche, les démocrates américains se cherchent un souffle. Le parti, encore sonné par sa défaite historique de 2024, s’apprête à affronter une série d’élections partielles décisives, ce mardi 4 novembre. Ces scrutins locaux serviront de test : mesurer le rejet du président républicain, mais aussi jauger la capacité du camp démocrate à se réinventer après des mois de crise interne.
Car, derrière le tumulte électoral, une double rébellion secoue la gauche américaine. D’un côté, la contestation de rue, incarnée par le mouvement « No Kings », né pour dénoncer les dérives autoritaires du nouveau pouvoir. De l’autre, une révolte interne, celle de la base progressiste contre les figures jugées figées d’un appareil vieillissant. À l’image du Tea Party républicain qui avait, au début des années 2010, redéfini la droite américaine, la jeunesse démocrate appelle à un bouleversement générationnel.
Cette impatience s’exprime de plus en plus ouvertement contre des figures historiques du parti, comme Nancy Pelosi (85 ans), Steny Hoyer (86 ans) ou Chuck Schumer (74 ans), accusés de ne plus comprendre la base démocrate.
La défaite de Joe Biden, sur fond de mensonges autour de son état de santé, a accentué cette crise de confiance. Même Kamala Harris, ancienne vice-présidente, peine à susciter l’adhésion. Dans son livre 107 Jours, elle admet que la candidature de Biden fut « imprudente », sans parvenir à se dégager de cette image du passé. À seulement 61 ans, elle incarne paradoxalement une génération politique déjà dépassée.
Dans les rangs militants, la frustration est palpable. Un sondage Data for Progress indique que 83 % des démocrates souhaitent des candidats plus jeunes, et 69 % veulent voir les anciens leaders se retirer. Le Pew Research Center révèle par ailleurs que deux tiers des électeurs démocrates se disent déçus par la mollesse du parti face à l’administration Trump. Pour tenter de redorer son image, la direction démocrate a choisi de durcir le ton, en assumant le shutdown — la fermeture partielle des services fédéraux — comme un acte de résistance sociale.
Mais la relève pointe déjà. À New York, la campagne du jeune Zohran Mamdani, soutenu par Bernie Sanders et Alexandria Ocasio-Cortez, symbolise cette reconquête progressiste. Donné favori pour la mairie, il incarne un retour aux thématiques concrètes : logement, santé, coût de la vie. Face à lui, les caciques du parti, Hakeem Jeffries et Chuck Schumer, ont longtemps refusé de le soutenir, craignant un virage idéologique trop marqué. En vain : la base semble désormais dicter sa loi.
Au Texas, un autre visage du renouveau s’impose : James Talarico, 36 ans, ancien enseignant et candidat au Sénat. Loué par Barack Obama, il dénonce « un système politique truqué par les milliardaires » et revendique un patriotisme social : défendre les travailleurs sans abandonner les symboles nationaux aux conservateurs. Une posture qui rappelle, selon certains analystes, celle de Robert F. Kennedy, figure d’un progressisme populaire et rassembleur dans les années 1960.
Reste une question essentielle : les démocrates peuvent-ils encore unir une coalition fracturée entre progressistes et modérés ? Face à un Trump solidement installé, la gauche américaine n’a plus le luxe de l’hésitation. Pour espérer revenir au pouvoir, elle doit transformer sa colère en projet, et son désarroi en vision.
Sources :
Le Monde – « Les démocrates américains, défaits par Donald Trump il y a un an, confrontés à la rébellion de la base du parti » (3 novembre 2025) – https://www.lemonde.fr/international/article/2025/11/03/les-democrates-americains-defaits-par-donald-trump-il-y-a-un-an-confrontes-a-la-rebellion-de-la-base-du-parti_6651271_3210.html
AFP – Dépêches et analyses politiques sur les élections partielles américaines, novembre 2025.