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Japon : le procès hors-norme du meurtrier présumé de Shinzo Abe s’ouvre à Nara

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Le procès de Tetsuya Yamagami, l’homme accusé d’avoir tué l’ancien Premier ministre japonais en 2022, s’est ouvert à Nara le 28 octobre. L’accusé a reconnu les faits, mais la question de sa peine – potentiellement la peine de mort – divise la société japonaise et relance le débat sur la responsabilité morale et politique de son geste.

Un procès historique s’est ouvert mardi 28 octobre à Nara, au centre du Japon. Celui de Tetsuya Yamagami, 45 ans, accusé d’avoir assassiné l’ancien Premier ministre Shinzo Abe le 8 juillet 2022 lors d’un discours de campagne. Un crime qui avait sidéré le Japon et bouleversé l’échiquier politique d’un pays peu habitué à ce genre de violences.

Sous une forte présence policière, l’accusé a plaidé coupable, selon l’agence japonaise Jiji Tsushin. “Tout est vrai. C’est bien moi qui ai commis ce meurtre”, a-t-il déclaré, calme, depuis le banc des accusés. Dès lors, expliquent les médias nippons, l’enjeu du procès ne porte plus sur la culpabilité, mais sur la sévérité de la peine.

Tetsuya Yamagami a reconnu avoir fabriqué lui-même le fusil artisanal utilisé pour abattre Abe. Selon l’acte d’accusation, il aurait agi par vengeance contre l’Église de l’unification, dite “secte Moon”, à laquelle appartenait sa mère. Ruinée par les dons imposés par cette organisation d’origine sud-coréenne, la famille Yamagami avait sombré dans la misère. Son frère s’était suicidé, et lui-même avait tenté de mettre fin à ses jours en 2005.

Il voulait punir ceux qu’il jugeait responsables de la ruine de sa famille, a plaidé la défense, citée par le quotidien Yomiuri Shimbun. Yamagami aurait appris sur les réseaux sociaux que Shinzo Abe avait envoyé un message vidéo de soutien à la secte. Dans son esprit, le lien était fait : s’en prendre à l’ancien chef du gouvernement, c’était s’attaquer au système politique qui, selon lui, protégeait la secte.

Le parquet, de son côté, insiste sur la gravité exceptionnelle de l’acte : “Il a abattu un ancien Premier ministre en plein jour. C’est un acte sans précédent dans l’histoire de l’après-guerre, aux conséquences sociales immenses”, ont rappelé les procureurs, selon le quotidien Asahi Shimbun. Pour eux, les souffrances personnelles de l’accusé ne sauraient justifier un tel geste, ni atténuer sensiblement la peine.

L’affaire a provoqué une onde de choc durable au Japon. La mort de Shinzo Abe, chef de file du Parti libéral-démocrate (PLD), a laissé son camp profondément affaibli et rouvert un débat explosif sur les liens entre les milieux politiques et l’Église de l’unification, désormais menacée de perdre son statut d’organisation religieuse.

La question qui hante désormais les observateurs est celle de la peine capitale. Le Japon applique encore la peine de mort, souvent par pendaison, mais celle-ci est rarement prononcée pour un seul homicide. Toutefois, la portée symbolique du crime pourrait peser lourd. Comme le rappelle le Mainichi Shimbun, un homme ayant abattu le maire de Nagasaki pour des raisons politiques en 2007 avait d’abord été condamné à mort avant que sa peine ne soit commuée en prison à vie.

Pour Yasuyuki Takai, ancien procureur devenu avocat, la justice japonaise pourrait être tentée de demander la peine capitale au nom de “l’ampleur des conséquences sociales de l’assassinat”. “Dans l’histoire de la justice japonaise, il n’existe pas de crime comparable”, a-t-il déclaré.

Le verdict est attendu pour le 21 janvier 2026. D’ici là, le procès de Nara reste un miroir des fractures d’un Japon en quête de repères entre douleur, vengeance et devoir de justice.

Sources :

  • Courrier international – « Justice. Assassinat de Shinzo Abe : début d’un procès hors-normes dans l’histoire de la justice japonaise » – courrierinternational.comAttachment.tiff – 30 octobre 2025
  • Asahi Shimbun – « Yamagami admits to killing Abe, says he acted alone » – 28 octobre 2025
  • Mainichi Shimbun – « Death penalty debated in trial of Shinzo Abe’s killer » – 29 octobre 2025
  • Yomiuri Shimbun – « Defense highlights family tragedy in Yamagami case » – 30 octobre 2025

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