Le pétrolier russe « Pushpa », soupçonné d’appartenir à la flotte fantôme de Moscou, a été repéré lundi près des côtes françaises. Lié à des survols suspects de drones au Danemark, le navire fait désormais l’objet d’une enquête ouverte par le parquet de Brest.
Il est apparu comme un spectre sur les écrans radar français. Le « Pushpa », pétrolier de 244 mètres de long battant pavillon béninois, a jeté l’ancre au large de Saint-Nazaire depuis le début de la semaine. Sa trajectoire intrigue : parti de Primorsk, en Russie, le 20 septembre, il devait rejoindre l’Inde un mois plus tard. Mais sa route a croisé les côtes européennes et surtout les radars des services de sécurité danois, après une série de survols de drones non identifiés au-dessus de bases militaires et d’aéroports sensibles.
Ce navire, dont les multiples identités alimentent la confusion, est désormais au centre d’une enquête préliminaire ouverte par le parquet de Brest. Celle-ci porte sur un « défaut de documentation de la nationalité et du pavillon » ainsi que sur un « refus d’obtempérer », a précisé Stéphane Kellenberger, procureur de la République de Brest, confirmant les informations d’Ouest-France. La gendarmerie maritime, épaulée par la section de recherches de Brest, a été saisie du dossier.
Depuis Copenhague, où il était en déplacement, Emmanuel Macron a confirmé la gravité de la situation : « Il y a eu des fautes très importantes commises par cet équipage qui justifient que la procédure soit judiciarisée aujourd’hui. » Le chef de l’État a assuré que « les équipes d’intervention ont agi en temps et en heures », tandis que la Marine nationale a envoyé un patrouilleur pour surveiller le bâtiment, mouillant non loin du parc éolien offshore de Loire-Atlantique.
Le « Pushpa » appartiendrait à la fameuse flotte fantôme russe, estimée à environ 900 navires par un amiral français. Ces tankers, souvent vétustes et mal identifiés, navigueraient sous pavillon de complaisance et changeraient régulièrement de mandataires afin de brouiller leur traçabilité. Acquis au début de la guerre en Ukraine par Igor Setchine, ancien officier du renseignement militaire soviétique et PDG de Rosneft, ces navires permettraient à Moscou de continuer à exporter du pétrole malgré les sanctions internationales.
Mais leur mission dépasserait la simple logistique énergétique. Les Européens soupçonnent ces bateaux d’être des instruments de guerre hybride, capables de financer près de « 40 % de l’effort de guerre russe », selon Emmanuel Macron, mais aussi de servir de plateformes clandestines pour des opérations de sabotage, comme l’endommagement de câbles sous-marins, ou pour orchestrer des activités de renseignement. Les survols de drones au Danemark seraient une nouvelle illustration de cette stratégie opaque.
Au large des côtes françaises, le « Pushpa » n’est donc pas seulement un pétrolier anonyme. Il cristallise les inquiétudes sur une guerre invisible, où la mer devient le théâtre d’affrontements discrets mais stratégiques entre la Russie et l’Europe.
Sources :
Le Parisien – 1 octobre 2025 – lien
Ouest-France – 30 septembre 2025 – lien
Ici Loire Océan – 30 septembre 2025 – lien
KSE (Kyiv School of Economics) – rapport sur la flotte fantôme – lien