À Strasbourg, ce 10 septembre, Ursula von der Leyen a choisi de placer la question de l’information au cœur de son discours sur l’état de l’Union. La présidente de la Commission européenne a annoncé la création d’un Centre européen pour la résilience démocratique, destiné à lutter « contre le complotisme, l’anti-élitisme, les discours anti-institutionnels viralisés »
Dans l’hémicycle du Parlement européen, Ursula von der Leyen a dressé un constat sévère : la désinformation divise, affaiblit la confiance dans les faits et menace la démocratie elle-même. C’est pour répondre à ce qu’elle qualifie d’« urgence démocratique » que la présidente de la Commission a dévoilé son projet de Centre européen pour la résilience démocratique. Cette nouvelle structure, a-t-elle affirmé, doit rassembler les expertises des États membres et de leurs partenaires afin de détecter, surveiller et contrer les manipulations de l’information.
Le discours a insisté sur un double enjeu : protéger les citoyens contre l’influence des fausses nouvelles, tout en préservant un espace médiatique pluraliste. Pour von der Leyen, la liberté de la presse demeure l’un des fondements de l’État de droit, mais elle est aujourd’hui fragilisée par les attaques répétées contre les médias indépendants et par la montée de discours complotistes ou anti-institutionnels. « Le premier geste des autocrates est toujours de capturer les médias indépendants », a-t-elle déclaré, soulignant que la presse reste le meilleur contre-pouvoir face à la corruption et aux dérives autoritaires.
Afin de consolider ce rempart démocratique, la Commission prévoit un programme de résilience des médias, assorti d’un renforcement budgétaire. Les fonds européens dédiés au soutien du journalisme indépendant et à l’éducation aux médias devraient être significativement augmentés dans le prochain cadre financier. En parallèle, Bruxelles entend mobiliser ses instruments réglementaires pour soutenir la viabilité économique des médias, y compris au niveau local, et renforcer la coopération européenne en matière de régulation des contenus numériques.
Cette annonce s’inscrit dans une vision plus large que certains au Parlement désignent déjà sous le terme de « bouclier démocratique européen ». Elle entend répondre à une inquiétude croissante : celle de voir la désinformation, qu’elle soit d’origine interne ou orchestrée par des puissances étrangères, miner la confiance des citoyens dans leurs institutions. Le groupe centriste Renew Europe a salué l’initiative tout en la jugeant encore insuffisante.
Selon ses représentants, le défi n’est plus tant de déclarer l’urgence que de passer à l’action, avec des instruments concrets et une gouvernance claire.
Reste que la proposition soulève de nombreuses interrogations. Comment définir avec précision ce qui relève de la désinformation sans menacer la liberté d’expression ? Jusqu’où un centre européen pourra-t-il intervenir dans le paysage médiatique, sans risquer d’être accusé de dérive vers la censure alors que le DSA qui régule les plateformes sur le territoire européen s’excite déjà de nombreuses inquiétudes ? D’autant plus que plusieurs organismes travaillent déjà à lutter contre la désinformation et de potentiels ingérences étrangères. C’est le cas de la Commission spéciale sur l’ingérence étrangère dans l’ensemble des processus démocratiques de l’Union européenne, y compris la désinformation (INGE) dirigée par Raphaël Glucksman.
Ursula von der Leyen a affirmé que « des citoyens informés, qui peuvent croire ce qu’ils lisent et entendent, sont essentiels pour tenir ceux qui gouvernent responsables ». Encore faut-il qu’ils aient accès à des médias pluriels, une information libre et non labellisée.
Lorsque la présidente de la Commission européenne a tenu ce discours elle a suscité des huées. L’eurodéputée Schneider à même été menacée par la présidente du parlement, Roberta Metsola d’être évacuée des lieux. Preuve que les problèmes démocratique ne sont pas toujours là où on le pense.
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