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Conscription en Israël : les ultraorthodoxes défient Nétanyahou dans la rue

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Alors que la guerre à Gaza intensifie les débats sur l’universalité du service militaire, les ultraorthodoxes haredim ont manifesté massivement contre l’enrôlement. Le gouvernement Nétanyahou, fragilisé, tente de ménager cette base politique essentielle tout en répondant aux exigences de la Cour suprême.

C’est un mot lourd de sens que le quotidien ultraorthodoxe Yated Ne’eman a choisi de placarder à sa une : « Guerre ». Pas celle qui fait rage à Gaza, mais une guerre interne, politique et religieuse, contre le gouvernement israélien. En cause, l’intensification des tentatives d’enrôlement des jeunes ultraorthodoxes dans l’armée, une ligne rouge que ces communautés refusent catégoriquement de franchir.

Jeudi 7 août, des milliers d’hommes ont répondu à l’appel de leurs rabbins pour manifester à Jérusalem et Tel-Aviv. Ils rejettent ce qu’ils perçoivent comme une attaque contre leur mode de vie, fondé sur l’étude religieuse à plein temps et exempté, depuis 1948, du service militaire obligatoire. Sur fond de prières chantées et de textes sacrés scandés dans la rue, la mobilisation a pris des airs de révolte spirituelle. « Ceux qui refusent d’aller dans l’armée ne doivent pas être punis, ce sont ceux qui désertent les yeshivas qu’il faut blâmer », a lancé le rabbin Moshe Tsadka devant une foule fervente.

Cette désobéissance religieuse revendiquée entre en collision frontale avec la décision de la Cour suprême israélienne, qui, en juin 2024, a exigé la fin des exemptions systématiques accordées aux haredim. En réponse, l’armée a accéléré l’envoi de convocations : 24 000 en un an, avec un résultat minimal. Seuls 428 ultraorthodoxes ont été incorporés, dont à peine 98 dans des unités combattantes. L’armée prévoit désormais 54 000 convocations supplémentaires pour 2025, une mesure vécue comme une provocation par les chefs religieux, qui multiplient les déclarations incendiaires.

Les pancartes des manifestants illustrent la rupture identitaire que creuse cette crise. « Nous sommes nés dans la terre d’Israël, pas dans l’État d’Israël », clame l’une. « Nous ne sacrifierons pas nos enfants sur l’autel du sionisme », proclame une autre. Pour beaucoup, la loyauté va à la Torah avant d’aller à l’État, au gouvernement ou à l’armée.

Cette fracture religieuse et politique pourrait bien précipiter la chute du gouvernement de Benyamin Nétanyahou. Sa coalition repose sur l’appui vital des partis ultraorthodoxes, dont le soutien est devenu conditionnel à une loi entérinant l’exemption. Or, cette loi, promise mais sans cesse repoussée, fait imploser les équilibres politiques. Mi-juillet, le parti Judaïsme unifié de la Torah a quitté la coalition. Le parti Shass, autre pilier ultraorthodoxe, a suspendu sa participation. Et fin juillet, Yuli Edelstein, président de la commission de la défense à la Knesset, a été écarté pour ne pas avoir soutenu les revendications haredim.

En toile de fond, la démographie rend la question explosive. Si les ultraorthodoxes représentent aujourd’hui 14 % de la population israélienne, ils devraient constituer 25 % des moins de 20 ans d’ici 2030. Un déséquilibre qui rend la question de leur intégration — ou non — à l’effort militaire de plus en plus centrale. Pour l’heure, la tension ne cesse de monter, et pourrait bien être le facteur déclencheur d’un bouleversement politique majeur à la rentrée.

Source : Le Monde

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