Plus d’un mois après la déclaration de l’épidémie de la maladie à virus Marburg (MVD) au Rwanda, l’OMS a fait un point hier, une dizaine de jours après le voyage de son Directeur Général à Kigali. Lors de ce déplacement, celui-ci s’était montré dithyrambique à l’égard de Paul Kagamé et de son administration, qui a déployé, en collaboration avec l’OMS, des mesures fortes incluant des essais cliniques de vaccins. Bien que l’épidémie semblait sous contrôle, la situation pourrait être plus complexe sur le terrain, comme l’a admis Rob Holden, responsable principal des urgences à l’OMS, en conférence de presse.
L’agence onusienne a indiqué dans un communiqué publié hier que le Rwanda, avec le soutien de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), intensifie les mesures de surveillance et de prévention. Depuis l’annonce initiale de l’épidémie le 27 septembre 2024, le Rwanda a enregistré 66 cas confirmés de MVD, dont 80 % parmi les professionnels de santé dans deux établissements de Kigali, selon l’agence onusienne. La majorité des cas sont rapportés dans trois districts de la capitale. La dynamique de l’épidémie montre une augmentation initiale avec 26 cas confirmés lors de la semaine épidémiologique 39 (23 au 29 septembre) et 23 cas la semaine suivante. Après une période de baisse, quelques cas isolés continuent d’être rapportés, soulignant l’importance d’un contrôle rigoureux, d’après l’agence onusienne, qui loue également les efforts du Rwanda.
Les efforts du Rwanda en collaboration avec l’OMS
Les autorités du pays ont déployé, en collaboration avec l’OMS, une série de mesures pour contenir l’épidémie, notamment la surveillance active et le suivi des contacts, avec plus de 559 contacts sous surveillance. Elles ont également mis en place des mesures de prévention et de contrôle des infections (PCI) en collaborant avec l’agence onusienne pour former le personnel de santé aux pratiques de prévention, garantir un environnement sanitaire sûr, et renforcer les infrastructures d’eau, d’assainissement et d’hygiène (WASH). Des essais cliniques de traitements et de vaccins ont également été lancés.
En collaboration avec l’OMS, le Rwanda a introduit une campagne de vaccination en anneaux, destinée principalement aux soignants et aux contacts proches des patients. Ces efforts ont été rendus possibles par la préqualification de vaccins par l’OMS et la donation de 1 700 doses par le Sabin Vaccine Institute.
Parallèlement à la campagne de vaccination, le Rwanda a entamé des essais contrôlés randomisés pour tester des traitements potentiels contre le virus de Marburg. Ces essais incluent l’utilisation du remdesivir, un antiviral repositionné après avoir été utilisé contre le Covid-19, et le MBP091, un anticorps monoclonal ciblant spécifiquement le virus de Marburg.
Maladie à virus Marburg : caractéristiques et modes de transmission
La MVD est une maladie hémorragique virulente, semblable à la maladie à virus Ebola. Elle se transmet à l’homme par contact direct avec les fluides corporels d’une personne infectée ou par des surfaces contaminées. Les symptômes, qui apparaissent entre 2 et 21 jours après l’exposition, incluent une forte fièvre, des maux de tête intenses et des hémorragies dans les cas graves. Actuellement, aucun traitement approuvé ou vaccin n’est disponible, bien que des essais soient en cours.
Une journaliste évoque une information contredisant le narratif officiel
Lors de la conférence de presse de l’OMS hier, Hélène Branswell, journaliste canadienne spécialisée dans le domaine de la santé pour le magazine Stat News, a évoqué des cas récents n’ayant pas de lien avec l’hôpital où beaucoup de cas s’étaient déclarés selon l’OMS. Selon Branswell, « Ce sont des cas qui semblent avoir eu un contact avec le cas index ou avec la chaîne de transmission ». La journaliste a souligné qu’elle avait tenté « d’obtenir davantage de précisions hier auprès de l’Afrqiue Développement Consulting et au Rwanda ». « Le ministre d’État a mentionné qu’il pense que certains de ces cas ont eu des périodes d’incubation plus longues que ce qui est généralement admis, soit plus de 21 jours », a-t-elle mentionné, se questionnant sur la possibilité que certains cas aient été manqués, et si l’OMS avait des préoccupations à ce sujet.
Rob Holden, le responsable principal des urgences à l’OMS, a concédé que « les derniers cas ont été assez complexes, et leur suivi s’est avéré délicat ». « Si nous relâchons notre vigilance, nous risquons de faire face à des surprises désagréables et à une épidémie prolongée. »
Le Dr Tedros réitère ses félicitations à Paul Kagamé
Le Directeur général de l’OMS, le Dr Tedros, qui s’était montré dithyrambique envers les autorités rwandaises lors de son voyage, a tenu à revenir sur les propos de Holden. « Le leadership du président est vraiment très encourageant. Il est directement impliqué dans ce qui se passe, et ce type de leadership fort est extrêmement utile », a souligné Tedros, évoquant « l’accélération de certaines activités, qui ont commencé il y a seulement quelques jours ». Le DG de l’OMS a insisté sur le fait que les autorités rwandaises ont effectué « des analyses de séquençage et ont tenté de retracer l’origine de l’épidémie, en remontant jusqu’au cas index identifié en septembre, même si des recherches avaient déjà commencé dès la fin août ». « Cela démontre une transparence admirable. »
Il a également souligné que « c’est la première fois dans le contexte de Marburg que deux patients ont été intubés puis extubés avec succès – des patients qui auraient pu perdre la vie ». « Ce succès montre pourquoi il est essentiel d’être vigilant et de disposer d’un leadership fort et d’une surveillance rigoureuse. »
Estimant que la situation était bien gérée, l’OMS n’a pas recommandé de restrictions de voyage ou de commerce avec le Rwanda. L’agence onusienne recommande toutefois que les pays voisins et les points d’entrée renforcent leur capacité de réponse pour détecter et isoler rapidement les cas suspects, tout en encourageant la coopération internationale pour contenir l’épidémie.