La FNSEA et les Jeunes Agriculteurs (JA) essayent de reprendre la main sur un mouvement qu’ils n’ont pas initiés. Les deux syndicats ont formulé mercredi 24 janvier, une liste de 24 demandes à l’adresse du gouvernement, réclamant notamment des aides «immédiates» et un allègement des contraintes environnementales, alors que les agriculteurs se mobilisent dans toute la France. Toutefois des voix commencent à s’éléver chez les agriculteurs contre les représentants de ces syndicats.
Dans sa liste de demande faite au gouvernement le principal syndicat agricole insiste sur le respect total des lois Egalim de 2018 et 2021 concernant le partage de la valeur au sein de la chaîne alimentaire française. Ils souhaitent des contrôles renforcés dans tout le pays pour garantir ce respect. De plus, ils demandent une compensation intégrale pour tous, notamment par le biais d’un crédit d’impôt immédiat intégré dans les prix payés.
Les syndicats réclament également le paiement immédiat de toutes les aides de la Politique Agricole Commune (PAC), quelles que soient les raisons du non-paiement. De même, ils exigent le règlement rapide de toutes les indemnisations sanitaires et climatiques dues par l’État, avec défiscalisation. La liste comprend également la nécessité d’une aide immédiate aux secteurs les plus en difficulté, tels que la viticulture et l’agriculture biologique, qui subissent des pressions inflationnistes.
Cependant, au-delà des demandes déjà connues, la FNSEA et les JA ont durci leur position en matière d’environnement. Ils demandent désormais non seulement l’arrêt des surtranspositions des règlements européens, mais aussi la suppression de certaines mesures existantes. Cela inclut notamment les zones de non-traitement par des produits phytosanitaires (ZNT) et l’arrêté « plan eau » de 2021 qui régit les prélèvements d’eau pour l’agriculture face aux sécheresses. Les syndicats réclament également un moratoire sur les interdictions de pesticides et le rejet du plan gouvernemental « Ecophyto » visant à réduire l’utilisation des pesticides.
À plus long terme, ils demandent l’ouverture de chantiers législatifs, notamment pour afficher une pause dans la création de nouvelles normes. Parmi leurs revendications figure également la volonté de désarmer les agents de l’Office français de la biodiversité, afin de recentrer cette « police de l’environnement » vers la pédagogie plutôt que la répression.
Depuis Mardi, la FNSEA a orienté la colère des agriculteurs contre Michel-Edourad Leclerc et son groupe, qu’ils accusent de privilégier des produits fabriqués ailleurs en Europe. Le Président de la FDSEA, Jean-Pierre Allaux, affirmait au micro de BFMTV que « ce monsieur est le plus gros influenceur en ce qui concerne la grande distribution ». Au mois de décembre 2022, la présidente de la FNSEA, Christiane Lambert enjoignait les consommateurs à ne pas se « laisser berner par Michel-Edouard Leclerc » qui évoquait début novembre « un tsunami » d’inflation à venir en 2023 et tentait de garder des prix faibles dans ses supermarchés.
Des agriculteurs ont protesté mercredi 24 janvier en déversant une grande quantité de fumier devant la permanence de la députée Catherine Couturier de La France Insoumise à Guéret, en Nouvelle-Aquitaine. La députée a déploré cet acte, notant que cela avait empêché son équipe de sortir librement de la permanence. Elle a également signalé de nombreuses dégradations dans la ville, tout en exprimant son soutien à certaines revendications des agriculteurs et en regrettant que les agriculteurs s’en prennent « aux représentants de l’État sans aucun discernement ».
Mardi, le responsable régional de la FNSEA à Toulouse avait toutefois « été copieusement hué par sa base après avoir appelé les manifestants à rentrer chez eux Clement », comme le relève sur X, Brèves de News.
Sur les réseaux sociaux, Philippe Murer, économiste français proche des milieux souverainistes et écologistes, affirme que « La FNSEA et les Jeunes Agriculteurs qui négocient avec le gouvernement Macron sont des businessman en Marche déguisés en paysans ».
Il rappelle qu’Arnaud Rousseau, passé par l’European Business School, est le propriétaire d’une exploitation de 700 hectares , mais aussi le président de la multinationale Avril et qu’Arnaud Decercle ex président des Jeunes Agriculteurs est eurodéputé Renaissance.
Le président de la FNSEA, Arnaud Rousseau, soutien les agriculteurs qui se plaignent de l’augmentation des taxes sur le gazole non routier (GNR), alors qu’il a entériné cette hausse cet été, lors des négociations avec le gouvernement sur le projet de loi de finances.
Après ses études à l’Européen Business School, Rousseau a travaillé dans le courage de matières premières agricoles. Président de la multinationale Avril, spécialisée dans les huiles (Lessieur, Puget, Isio 4), il est aussi administrateur de Saipol, leader français de la transformation de graines en l’huile, directeur général de Biogaz du Multien, une entreprise spécialisée dans la méthanisation et président du conseil d’administration de Sofiprotéol, qui finance des crédits aux agriculteurs. Cette ancien militaire qui a été capitaine dans la réserve durant une quinzaine d’année est aussi le maire de Torcy-en-en Multien dans la Seine et Marne et vice-président de la Communauté de communes du pays de l’Ourcq.
Lors de son intronisation à la tête de la FNSEA, au congrès d’Angers, le ministre de l’agriculture Marc Fesneau était venu le félicité.
« Rousseau, on aurait du le nommer ministre, ça aurait été plus clair », dénonçait José Bové dans les colonnes du Canard enchainé.
L’europédputé écologiste, Benoit Bibeau, regrettait quant à lui que Rousseau « incarne la ligne la plus dure de la FNSEA, la plus agrobusiness, la plus productibviste ». Selon lui, les dirigeants de la FNSEA n’hésiteraient pas à trahir leurs propres membres, en particulier les éleveurs. Il ajoutait que ces leaders investissent massivement dans des secteurs qui sont en concurrence directe avec les agriculteurs français, créant ainsi un constant « conflit d’intérêts ».
Arnaud Rousseau, tout comme ses pairs dans le secteur des grandes cultures céréalières, figure parmi les principaux bénéficiaires de la Politique Agricole Commune (PAC), tandis que les petits éleveurs, particulièrement ceux exprimant leur frustration dans le Sud-Ouest, sont les plus désavantagés. Ces deux catégories d’agriculteurs ont des intérêts diamétralement opposés.
Le Canard Enchaîné soulignait que le 4 avril 2014, lors de l’émission « Capital », un journaliste avait exposé aux agriculteurs de la FNSEA, protestant contre un import massif de poulets, un document révélant que le PDG de la firme importatrice n’était autre que Xavier Beulin, alors président de la FNSEA. « Le défunt Beulin, également président d’Avril jusqu’en 2017, était le mentor de Rousseau », ajoutait le Canard Enchaîné, en rappelant que Rousseau était le seul candidat lors de son élection, tout comme son mentor.
Le Canard Enchaîné mentionnait aussi que Rousseau incitait les agriculteurs à ne pas céder aux appels de la décroissance. « Nous ne sommes pas des productivistes, mais nous souhaitons poursuivre la production », déclarait-il, exprimant son mécontentement face à l’interdiction de l’herbicide S-métolachlore ainsi que des néonicotinoïdes, sous prétexte de « souveraineté alimentaire ».