Dans une étude révélatrice, Sauro Mocetti et Guglielmo Barone, respectivement économiste senior à la Banque d’Italie et professeur associé d’économie à l’Université de Bologne, se penchent sur la mobilité intergénérationnelle à Florence, en Italie, de 1427 à 2011. Leur recherche, publiée le 17 mai 2016, défie l’idée selon laquelle les avantages et désavantages économiques se dissipent au fil des générations. En analysant les archives fiscales florentines, les auteurs découvrent une constance surprenante dans la hiérarchie socioéconomique des familles, identifiables par leur nom de famille, sur une période de six siècles.
Cette étude met en lumière que les familles qui étaient au sommet de l’échelle socioéconomique en 1427 se trouvent toujours parmi les plus aisées aujourd’hui. Ce constat persiste malgré les bouleversements politiques, démographiques et économiques majeurs survenus depuis le 15e siècle. Les résultats montrent une élasticité des revenus sur le long terme positive et statistiquement significative, suggérant que l’appartenance à une famille précise peut influencer les revenus actuels de manière notable.
Ce phénomène de persistance socioéconomique suggère une faible mobilité intergénérationnelle, même en tenant compte des transformations profondes que la société florentine a connues. Plus frappant encore, l’étude révèle que la mobilité intergénérationnelle était beaucoup plus faible au 15e siècle qu’elle ne l’est actuellement, avec une société presque immobile en 1427. Cette immobilité historique pourrait expliquer la persistance de statuts socioéconomiques à travers les siècles.
En outre, l’analyse identifie une prévalence de dynasties dans certaines professions élites, suggérant que l’accès à ces métiers peut jouer un rôle clé dans la transmission intergénérationnelle du statut socioéconomique. Ces professions, incluant avocats, banquiers, médecins ou pharmaciens, et orfèvres, semblent héritées, indiquant des mécanismes de marché et non-marché qui régulent l’accès à ces emplois prestigieux.
Les implications de cette recherche sont profondes, remettant en question notre compréhension de l’équité et de l’efficacité au sein des sociétés. Elle soulève également des questions pertinentes sur la généralisabilité de ces résultats à d’autres sociétés européennes avancées. Cette étude illustre de manière frappante comment, malgré les siècles et les changements sociaux majeurs, certaines structures de pouvoir et de privilège demeurent remarquablement stables, mettant en lumière l’importance critique de politiques visant à promouvoir une réelle mobilité sociale.