Selon une vaste enquête du ministère de l’intérieur, les violences sexuelles, physiques et les discriminations ont fortement augmenté en 2023. Malgré cette explosion des faits, une infime minorité de victimes choisit de porter plainte, révélant un profond déficit de confiance envers les institutions.
Les chiffres dévoilés par le Service statistique ministériel de la sécurité intérieure (SSMSI) dressent un constat glaçant. En 2023, 325 000 personnes ont déclaré avoir été victimes de violences sexuelles physiques en France, soit une hausse de 20 % par rapport à 2022. Une progression vertigineuse, qui s’inscrit dans un contexte général de montée des violences et des discriminations, selon l’enquête « Vécu et ressenti en matière de sécurité » menée avec l’Insee.
Les violences sexuelles dites « non physiques » — harcèlement, exhibition, propos déplacés — toucheraient désormais 1,62 million de personnes, en hausse de 14 % sur un an. Les femmes, sans surprise, demeurent les principales victimes : elles ont cinq fois plus de probabilité que les hommes de déclarer avoir subi de tels actes. Pourtant, la majorité d’entre elles se taisent. Seules 6 % des victimes de violences sexuelles physiques et 2 % des victimes d’atteintes non physiques ont déposé plainte.
Les raisons de ce silence sont multiples : sentiment d’inutilité, crainte de ne pas être crue, ou encore perception d’une gravité insuffisante de l’agression. « Cela n’aurait servi à rien », déclarent nombre de personnes interrogées, illustrant la distance persistante entre les victimes et les forces de l’ordre.
L’étude pointe également une recrudescence des discriminations : +17 % en 2023, avec près de 2 millions de personnes concernées. Les plus touchés sont les immigrés, leurs descendants, et les personnes en situation de handicap. À cela s’ajoute une hausse généralisée des violences physiques (+7 %), des menaces (+12 %), des injures (+6 %) et du harcèlement moral (+6 %).
Le contraste est saisissant : les dépôts de plaintes restent bien plus fréquents pour les atteintes aux biens que pour les atteintes aux personnes. Les vols de voitures ont bondi de 31 %, et les cambriolages ou tentatives de cambriolage de 14 %.
Réalisée entre février et mai 2024 sur un panel de 200 000 personnes majeures, l’enquête couvre la France métropolitaine ainsi que la Guadeloupe, la Martinique et La Réunion. La Guyane et Mayotte, elles, n’ont pas été incluses, en raison de contraintes méthodologiques liées au recensement et à la couverture Internet.
Cette photographie de la violence en France met en lumière un paradoxe : jamais les faits n’ont été aussi nombreux, mais jamais les voix des victimes n’ont été aussi étouffées. Entre défiance institutionnelle et banalisation des agressions, l’urgence d’une réponse politique et sociale se fait désormais pressante.
Sources :
Le Monde – « En France, des violences et discriminations en hausse, mais peu de plaintes déposées » – 31 octobre 2025 – lemonde.fr
AFP – Données issues du rapport du SSMSI et de l’Insee – octobre 2025