Selon la cellule investigation de Radio France, treize établissements financiers seraient ciblés par des procédures fiscales dans l’affaire du « Cumcum », montage utilisé pour éviter l’impôt sur les dividendes. Après les premières perquisitions en 2023 et une première amende transactionnelle, le dossier prend une ampleur inédite.
Le spectre du scandale « Cumcum » continue de s’élargir. Selon une enquête de la cellule investigation de Radio France publiée ce vendredi, treize banques sont désormais dans le viseur du ministère de l’Économie dans le cadre de ce vaste dossier d’évasion fiscale. Si Bercy s’est refusé à tout commentaire, cette information confirme l’ampleur croissante d’une affaire révélée en 2018 par un consortium de médias internationaux.
En juillet dernier, le ministre de l’Économie Éric Lombard avait déjà évoqué des « procédures de redressement » visant cinq établissements pour un montant estimé à 4,5 milliards d’euros, sans dévoiler leur identité. Deux ans plus tôt, en mars 2023, une opération d’envergure avait conduit à la perquisition de plusieurs sièges bancaires à Paris, dans le cadre d’une enquête du Parquet national financier (PNF) pour fraude fiscale aggravée et blanchiment aggravé de fraude fiscale aggravée. Parmi les établissements concernés figuraient BNP Paribas, sa filiale Exane, Société Générale, Natixis (BPCE) et HSBC.
Une première transaction en France
En septembre, la filiale du Crédit Agricole, Cacib, a accepté de verser 88,24 millions d’euros dans le cadre d’une convention judiciaire d’intérêt public (CJIP), marquant la première transaction judiciaire en France sur ce dossier. Une décision qui pourrait ouvrir la voie à d’autres accords entre Bercy et les banques mises en cause.
Le mécanisme du « Cumcum » repose sur un montage financier permettant à des actionnaires étrangers de transférer temporairement leurs actions à un tiers français, généralement une banque, au moment du versement des dividendes. Ce transfert leur permet d’échapper au prélèvement à la source appliqué aux non-résidents, avec la complicité du gestionnaire français qui reçoit une rémunération en échange. Un dispositif légalement contesté, accusé d’avoir coûté des milliards d’euros au fisc français.
Une fraude systémique ?
Interrogée, la Fédération bancaire française (FBF) a une nouvelle fois rejeté l’idée d’une « fraude systémique liée à ces opérations », estimant que les pratiques incriminées ne concerneraient que des cas isolés. Une ligne de défense fragilisée par l’ampleur croissante des investigations.
Depuis sa révélation en 2018, l’affaire « Cumcum » a nourri le débat sur la responsabilité des grands établissements financiers dans les montages d’optimisation fiscale. Alors que plusieurs pays européens ont lancé des enquêtes similaires, la France se trouve aujourd’hui à un tournant judiciaire et politique. La confirmation de procédures contre treize banques pourrait donner au scandale une dimension phénoménale.
Sources :
Radio France – Treize banques dans le viseur de Bercy dans le scandale « Cumcum » – lien – 03/10/2025
Le Monde – Crédit Agricole Cacib accepte de payer 88 millions d’euros dans l’affaire « Cumcum » – lien – 06/09/2025
France Inter – Scandale « Cumcum » : enquête de la cellule investigation – lien – 03/10/2025