Après avoir multiplié les blocages de sites et serveurs liés au streaming illégal, l’Arcom s’attaque désormais aux VPN. Sollicités par Canal+ et beIN Sports, certains fournisseurs comme NordVPN et Surfshark se voient demander de bloquer l’accès à près de 300 sites diffusant des compétitions sportives. Une mesure inédite, mais qui suscite déjà de vives critiques.
La lutte contre le piratage franchit un nouveau cap en France. L’Arcom, l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique, vient de demander à plusieurs fournisseurs de VPN, parmi lesquels NordVPN et Surfshark, de bloquer 295 sites de streaming non autorisés diffusant des compétitions comme la Formule 1, le MotoGP ou les tournois de tennis. Une offensive qui intervient alors que le piratage sportif reste l’une des principales batailles des diffuseurs.
Une offensive coordonnée contre le piratage sportif
Cette démarche s’inscrit dans le prolongement d’actions déjà renforcées depuis le début de l’année. Selon l’Arcom, plus de 5 000 serveurs illégaux auraient été neutralisés depuis janvier, notamment en mai, grâce à des procédures accélérées. L’initiative bénéficie du soutien de l’Association pour la protection des programmes sportifs (APPS), qui regroupe ligues et diffuseurs comme Canal+ et beIN Sports.
Pour Xavier Spender, délégué général de l’APPS, « l’objectif est de stopper le piratage directement à la source, sur les serveurs principaux où passent les flux illégaux. Chaque serveur alimente un réseau de revendeurs et de petites plateformes locales. En bloquant le sommet, on neutralise l’ensemble ».
Les VPN, entre confidentialité et pression réglementaire
L’implication des VPN marque cependant un tournant délicat. Ces services sont conçus pour garantir confidentialité, sécurité et neutralité du trafic internet. Leur demander de bloquer certains sites revient à les transformer en censeurs, ce qu’ils contestent fermement.
Les avocats de plusieurs fournisseurs rappellent qu’en raison des adresses IP partagées et des serveurs répartis dans le monde entier, un blocage ciblé reste techniquement complexe et peut entraîner des erreurs. Des exemples en Italie et en Espagne montrent que des sites légitimes ont déjà été bloqués par inadvertance.
De plus, des acteurs regroupés au sein de l’i2Coalition mettent en garde contre un « effet domino ». Si la pression réglementaire s’intensifie, certains VPN pourraient quitter le marché français, comme cela s’est déjà produit en Inde ou au Pakistan. Une éventualité qui poserait un dilemme : protéger les diffuseurs de contenus sportifs tout en préservant les droits à la vie privée et à l’accès à des services sécurisés pour les internautes.
Une bataille aux enjeux multiples
Si l’usage des VPN est souvent associé au contournement des restrictions géographiques ou à l’accès à des catalogues étrangers de streaming, leur fonction première reste la protection de la vie privée. En France, leur éventuelle mise au pas par l’Arcom soulève donc une question plus large : jusqu’où peut-on aller dans la lutte contre le piratage sans porter atteinte aux libertés numériques ?
Alors que les diffuseurs intensifient leur pression pour protéger leurs droits, l’équilibre entre efficacité répressive et protection des usages légitimes demeure fragile. Pour l’Arcom, la bataille est loin d’être gagnée.
Sources :
Franceinfo – Piratage : l’Arcom demande aux VPN de bloquer des sites illégaux – lien – 2025
Numerama – L’Arcom s’attaque aux VPN pour lutter contre le streaming sportif – lien – 2025
L’Équipe – Piraterie et streaming : l’Arcom muscle sa riposte – lien – 2025