Jean-Luc Mélenchon appelle à une mobilisation nationale pour renverser le gouvernement Bayrou, en soutenant l’appel citoyen à « tout bloquer » le 10 septembre. Mais les autres partis de gauche restent prudents.
L’ambition est claire : renverser François Bayrou dès la rentrée. Dans une tribune parue le 17 août dans La Tribune Dimanche, Jean-Luc Mélenchon exhorte les Français à se mobiliser massivement le 10 septembre pour faire chuter le Premier ministre fraîchement nommé. Il propose une stratégie duale, mêlant mobilisation populaire et dépôt d’une motion de censure immédiate à l’Assemblée nationale. À ses yeux, il faut agir vite : « Il faut renvoyer François Bayrou et son gouvernement, tout de suite ».
L’élément déclencheur de cette offensive est une initiative née sur Internet et relayée tout au long de l’été : l’appel à « tout bloquer ». Issu d’un collectif citoyen auto-proclamé indépendant des partis et des syndicats, ce mot d’ordre s’est imposé sur les réseaux sociaux en réaction aux mesures drastiques annoncées par François Bayrou le 15 juillet : suppression de deux jours fériés, gel des retraites, baisse des aides sociales, et réduction massive du budget de la santé.
Ce mouvement, baptisé « Bloquons tout ! », a d’abord affiché une tonalité nationaliste et souverainiste, avec des slogans teintés de références chrétiennes et identitaires, avant de glisser vers des revendications plus classiques : pouvoir d’achat, justice sociale, défense des services publics. Une évolution qui a ouvert la voie à l’engagement d’une frange de la gauche, en particulier les Insoumis. Le 30 juillet, Jean-Luc Mélenchon devient le premier responsable politique à soutenir clairement la démarche, affirmant : « Je me reconnais dans les motifs de cette action », tout en saluant l’« autonomie » du mouvement.
À ce jour, la France insoumise est la seule formation politique d’envergure à avoir pleinement investi cette dynamique. Mathilde Panot, Manuel Bompard et les cadres du mouvement appellent leurs militants à s’engager dans les collectifs locaux pour amplifier l’impact du 10 septembre. Une date que Mélenchon espère fondatrice : celle qui pourrait, par une double pression populaire et parlementaire, provoquer la chute de l’exécutif.
D’autres formations de la gauche radicale se sont jointes au cortège. Le Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) a officialisé son soutien. Une tribune commune signée par Clémentine Autain, Alexis Corbière, Sandrine Rousseau ou encore Patrice Leclerc appelle à des rassemblements dans « chaque quartier, chaque village ». Mais le reste de la gauche institutionnelle se montre plus circonspect. Le Parti socialiste d’Olivier Faure, le Parti communiste de Fabien Roussel et les Écologistes de Marine Tondelier gardent le silence. Une réunion interne est prévue cette semaine chez les Verts pour définir leur ligne. La crainte de se voir accusés de récupération politique ou de prêter le flanc à un mouvement encore mouvant les pousse à la prudence.
Les syndicats non plus ne se sont pas encore prononcés officiellement, bien que plusieurs fédérations de la CGT aient annoncé leur volonté de déposer des préavis de grève. Une intersyndicale est prévue le 1er septembre. Leur participation active pourrait faire basculer le rapport de force, et redonner une dimension plus structurée à cette initiative pour l’instant fluide, sinon incertaine.
À droite, le Rassemblement national a dans un premier temps semblé attiré par les mots d’ordre initiaux du mouvement, à tonalité anti-fiscalité et anti-immigration. Mais depuis l’entrée en scène des Insoumis, le RN temporise. Le député Matthias Renault, qui s’était félicité d’une mobilisation populaire à venir, a rétropédalé, dénonçant une instrumentalisation « par l’extrême gauche ».
À trois semaines de l’échéance, les contours de la journée du 10 septembre restent flous. Sera-t-elle l’acte fondateur d’une nouvelle vague de contestation sociale, à la manière des gilets jaunes ? Ou bien une tentative avortée, faute de structuration et de convergence politique ? La rentrée s’annonce électrique, et pourrait bien redéfinir les équilibres entre partis, mouvements citoyens et mobilisations spontanées.
Sources : La Tribune Dimanche, Le HuffPost, Le Parisien, AFP