Contesté pour ses mesures d’austérité, François Bayrou entame un automne à haut risque. Depuis Madrid, Zurich ou Londres, la presse européenne s’alarme de l’instabilité politique française et de ses répercussions pour l’Union européenne.

L’automne 2025 s’annonce houleux pour Paris – et préoccupant pour Bruxelles. Alors que le Premier ministre François Bayrou s’apprête à affronter une rentrée sous le signe de l’impopularité et des tensions sociales, plusieurs médias européens pointent le risque d’un délitement politique en France, pilier de la construction européenne. Une fragilité nationale qui pourrait rejaillir sur l’ensemble de l’Union.

Dans un article publié le 18 août, le quotidien espagnol El País dresse le portrait d’un Premier ministre déjà sur la sellette, engagé dans un « marathon budgétaire » incertain jusqu’à décembre. La correspondante Raquel Villaécija rappelle que cette bataille parlementaire avait déjà fait chuter son prédécesseur, Michel Barnier, fin 2024, contraint d’utiliser le 49.3. Bayrou, soupçonné de devoir recourir au même mécanisme, n’a guère de marge de manœuvre, d’autant qu’il dépend d’alliés d’extrême droite pour conserver sa majorité.

La réaction populaire, elle, se structure. Le journal suisse Tages-Anzeiger observe que le mouvement citoyen « Bloquons tout », prévu pour le 10 septembre, s’étend au-delà des habituelles forces d’opposition. Signe d’un rejet plus large de la politique budgétaire, qui prévoit notamment la suppression de jours fériés et des réductions massives dans la fonction publique. Même les vidéos explicatives postées sur YouTube par Matignon pour justifier les mesures n’ont pas suffi à convaincre : « Presque personne ne les regarde », ironise le quotidien zurichois.

De son côté, The Economist, influent hebdomadaire britannique, s’inquiète d’un isolement croissant de la France. Dans un contexte d’instabilité européenne (avec les élections allemandes à venir, la poussée des droites en Europe centrale et les doutes sur le pacte de stabilité), un affaiblissement du leadership français pourrait bloquer des chantiers cruciaux à Bruxelles. La perspective d’une seconde dissolution de l’Assemblée nationale, évoquée par Courrier international, achève de peindre un tableau inquiétant d’un pays en crise chronique.

À cela s’ajoute l’impopularité persistante du président Emmanuel Macron, tombé sous la barre des 20 % de satisfaction selon un sondage Ifop cité par Courrier international. Il reste, aux yeux de nombreux Européens, l’incarnation d’un centrisme technocratique jugé déconnecté, malgré son rôle clef dans l’équilibre franco-allemand et la défense de l’autonomie stratégique européenne.

Pour les observateurs, la France est à un carrefour. Soit elle parvient à contenir la contestation sociale et à imposer un cap économique crédible, soit elle glisse dans une paralysie politique dangereuse pour toute l’Union. Car plus que jamais, une France bloquée, c’est une Europe ralentie.

Source : Courrier international.