Publié le 13 novembre, le livre posthume Dissolution française d’Olivier Marleix connaît un engouement spectaculaire. Rupture de stock en librairies, débat politique relancé, émotion toujours vive après le suicide du député : l’ouvrage apparaît comme un testament politique devenu phénomène éditorial.
À Dreux, impossible de trouver un exemplaire de Dissolution française. Une semaine après sa parution, l’ouvrage posthume d’Olivier Marleix a disparu des rayons aussi vite qu’il y est apparu. À La Rose des Vents, les libraires racontent avoir vendu « presque tout » dès les premiers jours, au point de recommander d’urgence 160 exemplaires supplémentaires, déjà quasi tous réservés. L’engouement dépasse la simple curiosité : c’est un hommage, mais aussi la découverte d’une analyse politique devenue, malgré elle, un legs.
Olivier Marleix, député Les Républicains de l’Eure-et-Loir, s’est donné la mort le 7 juillet 2025, à 54 ans. Quelques jours avant son suicide, il envoyait à son éditeur un dernier message : son manuscrit était « quasiment finalisé ». Le silence qui a suivi a donné à ce texte une dimension tragique, presque prophétique. Publié quatre mois plus tard, l’ouvrage est désormais lu comme un adieu lucide et brutal.
Dans Dissolution française. La fin du macronisme, Marleix analyse la crise politique française, les fractures sociales et ce qu’il décrit comme l’épuisement du modèle actuel de gouvernance. Il évoque sa circonscription de Dreux comme un « laboratoire du réel », un lieu où se perçoivent avant tout les inquiétudes et les espoirs des habitants. L’universitaire Éric Anceau, de l’université de Lorraine, salue un livre « fin, nuancé », dont certaines investigations – notamment sur les grandes ventes industrielles françaises – éclairent selon lui « un scandale politique majeur ».
Marleix, connu pour son attachement à la souveraineté industrielle, avait depuis longtemps dénoncé les errances stratégiques ayant affaibli de grands groupes nationaux. Dans des formulations, on peut citer celle-ci :
« Depuis quarante ans, une élite veut liquider la France, Depuis 2017, cette élite est au pouvoir et il n’y a plus personne pour défendre l’intérêt national ».
Il prévient aussi, sur un ton sombre, d’un pays « au bord de l’embrasement » si aucune refondation n’est engagée. Ces phrases, relevées comme des avertissements, résonnent aujourd’hui avec un écho particulier.
Derrière la force de ses convictions se cachait pourtant un homme ébranlé. L’enquête ayant suivi son décès évoque une dépression nourrie de souffrances personnelles et professionnelles. Loin de la rigidité que lui prêtait parfois l’arène politique, Marleix apparaît ici comme un élu fatigué, lucide, parfois désabusé. L’essai porte la marque d’une plume déterminée, mais aussi d’un homme en quête d’un cap pour son pays comme pour lui-même.
L’œuvre posthume, désormais lue comme un testament, interroge sur ce que la politique exige de ceux qui la font. À quoi ressemble l’engagement quand il devient fardeau ? Que reste-t-il de l’énergie militante lorsqu’elle se heurte au doute, à la solitude ou au désenchantement ? Le livre, par son succès soudain, révèle un besoin brûlant de compréhension collective. Il souligne aussi l’impact silencieux, souvent invisible, du poids porté par ceux qui exercent des responsabilités publiques.
Olivier Marleix laisse derrière lui un texte dont la force ne tient pas seulement à sa portée politique, mais à sa sincérité. Dans un pays où la défiance atteint des sommets, sa parole, désormais posthume, a su toucher un lectorat bien au-delà de son camp. Un livre qui restera, comme le pressentent nombre de lecteurs, non pas comme un réquisitoire, mais comme le geste d’un homme qui, jusqu’au bout, a voulu croire en un idéal.